« La sécu c’est bien, mais les gens en abusent, alors il faut la réformer ! »
Vous pensez que c’est une idée neuve ? Non, c’est une critique aussi vielle que l’institution.
Un fil à partir du débat à l’assemblée nationale de… 1949.
Lors du débat de 49 la question de la fraude et des abus des assurés est probablement celle qui occupe le plus les députés.
Voici quelques extraits des débats (illustrés par des copies du journal officiel).
Un antidote à ceux qui disent que la sécu serait victime de son succès.
Le député Jean Masson, radical-socialiste membre du gouvernement, énumère la liste des abus "biens connus » que le « gigantisme » de la Sécurité sociale laisse proliférer dans l’anonymat et l’irresponsabilité".
Selon le député, les abus « multiples » vont de « la multiplication des dossiers à l’approche des vacances ou au moment des grèves, avec l’absentéisme qui en résulte » au « simples rhumes » […] qui auraient couté des dizaines de milliards ».
Pourle député Fredet, «Quoi qu'en disent les statistiques les plus optimistes, il n'en est pas moins vrai qu’à l'occasion du fameux rhume de cerveau, grâce à la complicité possible d'un médecin sans vergogne, l’intéressé est tenté de s'accorder des congés supplémentaires, […].»
Le député Pierre André adopte une posture plus étonnante : si l’ouvrer français fraude la sécurité sociale ce n’est pas pour « pêcher à la ligne » mais pour « bêcher son jardin ou parce qu’il a promis à un camarade […] de lui donner un coup de main pour finir un ouvrage. »
« Ce sont ces resquilleurs […] que je voudrais voir dépister car ils n’ont pas le sens de la solidarité nationale que cherche à développer la sécurité sociale. »
Le dérembourssement en tant que moyen de lutte contre la fraude est alors… au service de la solidarité nationale !
Selon le député Joseph Delachenal, la fraude est massive : « accroissement des frais médicaux, pharmaceutiques, dentaires et indemnités journalières. » Les entreprises sont victimes de « maladies fictives » qui génèrent de l’absentéisme.
Les abus condamnés ne concernent pas que le risque maladie mais aussi les allocations familiales. Le ministre SFIO Daniel Mayer est ainsi amené à défendre la circulaire du 22 avril 1949 qui prévoit la suppression des allocations familiales pour les enfants absents à l’école.
D’après lui, "si les enfants d’âge scolaire ne fréquentent pas effectivement l’école, il est infiniment vraisemblable que c’est parce que ces enfants sont utilisés plus ou moins régulièrement à des besognes rémunérées et qu’ils cessent alors d’être une charge pour leur famille".
Cette circulaire est d’ailleurs un point de tension important entre PCF et SFIO, les premiers reprochant au second de mépriser les familles ouvrières et de préférer la « dépenser l’argent pour la guerre » plutôt que de construire des écoles.
Le PCF aussi se saisit de la question des abus, mais celle des employeurs qui ne versent pas leurs cotisations!
Pour le député Marius Patinaud, il s’agit d’une véritable "escroquerie" et demande quand le gouvernement récupérera les sommes dues avec les pénalités correspondantes.
On pourrait multiplier les exemples : dès 1949, les députés se disputent sur les abus et la fraude qui menaceraient la viabilité financière et morale de l’institution. D’un côté, la majorité condamne la fraude des assurés tandis qu’une minorité pointe la fraude des entreprises.
Depuis toujours, la thématique des « abus » des assurés permet d’occulter le fait que la sécurité sociale a largement développé l’accès au soin. Cette thématique justifie toutes les réformes destinée contre la sécu : déremboursement, contrôle, etc.
Or, ce n’est seulement parce qu’on invente les médicaments que les gens se soignent, c’est aussi parce qu’on organise le financement et la production de ces médicaments… grâce à la sécurité sociale qui le fait de manière économe et égalitaire.
Ce fil fait partie d’une série sur l’histoire économique de la sécurité sociale dont on trouve l’architecture générale ici :
Bientôt le projet de loi de financement de la sécurité sociale et l’élection présidentielle. On connait la musique : il va falloir faire des efforts et lutter contre le "trou de la sécu" !
J’ouvre un fil d’histoire éco pour montrer que cela n’a aucun sens.
Dans ce fil, je propose de montrer le non-sens du débat sur le trou de la sécu en rappelant que tous les arguments que l’on donne aujourd’hui sont en réalité aussi vieux que l’institution – l’enjeu étant moins le débat économique que le rapport de force politique.
La sécu telle qu’on la connait aujourd’hui nait des ordonnances du 4 et 19 octobre 1945. Or, très tôt les oppositions sont nombreuses et il faut se défaire de l’idée d’un grand consensus sur la construction de cette institution jusqu’aux terribles années 1980.
La sécu, au bord du gouffre depuis sa création. 🙃
Un fil à partir des archives du Figaro (@Le_Figaro) entre 1945 et 1949.
L’ordonnance du 4 octobre 1945 institue la sécurité sociale en remplacement des Assurance sociales (crées en 1928-1930). Et c'est le début des contestations...
Dès le premier jour, le 4 octobre 1945, un article du figaro souligne le déficit des Assurance sociale à la libération (1 milliard par an) et, constant un bénéfice prévu de 1,5 milliards pour 1945, pose la question :
« Le gouffre est comblé. Le restera-t-il longtemps ? »
Sur le volet sanitaire, il est possible d'obtenir le passe avec un test de moins de 72h (et plus 48h). Déjà que 48h n'est pas suffisant pour assurer la non contagiosité, 72h n'en parlons pas...
Le masque n'est plus obligatoire dans les lieux imposant le passe sanitaire... alors que même vacciné le virus se transmet et qu'il y aura dans ces lieux des gens avec des tests peu fiables.
Je me demande quand même si on ne peut pas inverser la proposition : le gouvernement renforce le chantage à l’emploi au nom de la santé. La santé est un prétexte de formes de contrôle renouvelées dans le monde du travail.
On assiste probablement à une nouvelle étape de récupération de la critique par le capitalisme :
👉 Le capitalisme est mauvais pour la santé...
👉 Au nom de la santé on renforce les fondamentaux du capitalisme : le capital et l’Etat sont dotés de plus de pouvoirs.
👉393 000 lits d’hospitalisation complète, soit une diminution de 76 000 depuis 2003.
👉 79 000 lits d'hospitalisation partielle, soit une hausse de 29 000 depuis 2003.
Par ailleurs, le nombre d'établissements (public et privé) continue sa baisse.
La double stratégie continue sa progression : 1) regroupement/fermetures 2) remplacement de la prise en charge classique par de la prise en charge courte.
Du côté des effectifs, après une hausse entre 2003 et 2016, on constate une baisse en 2017 et 2018.
Oubliez un instant le Gaël Giraud vrai/faux candidat à 2022, écoutez le Gaël Giraud économiste. Il était récemment chez @Tiphainederock : c’est punchline sur punchline contre la théorie néoclassique.
"L’économie néoclassique essaie d’imiter l’appareil extérieur des mathématiques, de la physique, de la mécanique et en réalité il lui manque complètement les bases épistémologiques pour y prétendre puisque son lien au réel est extrêmement ténu.
Par exemple, la plupart des modèles qu’utilisent les économistes mainstream n’ont pas de matière, pas d’énergie. Lorsque les physiciens, en particulier du GIEC, regardent ça ils tombent de leur chaise.