Thread by @dav_cayla

Reformulation du #thread ci-dessous pour clarifier certains raisonnements.

1/ L'état de droit procède d'une Constitution. Par définition aucun texte n'est supérieur à une Constitution.

https://twitter.com/dav_cayla/status/1446220830720118787

2/ Si le droit européen s'impose sur le droit national c'est parce que les Constitutions nationales le permettent, ou plutôt ne s'y opposent pas explicitement.

Ainsi, en France, l'appartenance européenne est inscrite dans la Constitution et cette dernière a été régulièrement modifiée pour éviter toute incompatibilité du texte constitutionnel sur le droit européen.

3/ La meilleure preuve en est que cela fait maintenant plusieurs années que l'Union européenne ne parvient pas à imposer à la Pologne et à la Hongrie qu'elles respectent un certain nombre de principes qu'elle défend.

C'est d'ailleurs cette faille que nous expliquions dans l'introduction de La Fin de l'Union européenne avec la regrettée Coralie Delaume. ⤵️

4/ Ainsi, comment une organisation peut-elle prétendre la supériorité de son droit tout en s'avérant incapable de le faire appliquer dans un certain nombre d'États: Pologne, Hongrie...

... mais aussi l'Allemagne dont la Cour de Karlsruhe n'oublie jamais de rappeler que le droit européen ne prime pas sur les textes constitutionnels allemands.

5/ D'ailleurs ces pays qui contestent la primauté du droit européens ne sont aucunement inquiétés et bénéficient de larges subventions européennes ou, pour l'Allemagne, d'un substantiel rabais. On voudrait démontrer l'impuissance de l'UE on ne s'y prendrait pas autrement.

6/ Par ailleurs, faut-il le rappeler? La Commission européenne est une autorité exécutive et non une autorité judiciaire. Elle n'a pas le pouvoir de dire le droit européen. C'est à la Cour de justice de l'UE de définir la légalité européenne.

A minima, la Commission aurait dû renvoyer cette affaire à la CJUE en lui demandant de trancher au lieu de publier un tel communiqué qui démontre sa fébrilité.

7/ C'est mal connaître la manière dont le droit européen fonctionne que d'oublier que celui-ci ne s'impose dans les États membres que grâce à la collaboration active de la justice de ces États.

Si la justice polonaise refuse d'appliquer certains dispositifs des traités européens je vois mal comment les autorités européennes parviendrons à les imposer, sauf à exclure la Pologne de ses droits en tant que membre de l'UE, ce qui entrainerait une crise politique majeure.

8/ Aussi, ce communiqué relève en grande partie d'un bluff qui sera forcément réglé par la voie diplomatique, selon les principes du droit international et non par un arrêt de la CJUE qui risquerait de ne pas être reconnu par la justice polonaise.

9/ Non seulement rien n'est au-dessus d'une Constitution, mais il n'existe pas de Constitution européenne. Et s'il est vrai que les traités font office de Constitution du fait d'un certain nombre d'arrêts rendus par la CJUE...

... (c'est ce que les juristes appellent la Constitution matérielle), ils ne sont en aucun cas supérieurs aux Constitutions nationales. Ils doivent être compatibles avec ces dernières. Le droit national doit "laisser entrer" le droit européen pour que ce dernier s'impose.

10/ En dernière analyse, la légitimité d'un texte relève du crédit que lui prête un peuple de citoyens. En piquant une telle crise d'autorité, la Commission démontre à quel point sa légitimité est faible. Car celui qui a besoin de dire "je suis le chef!" est rarement un chef.

Réflexions complémentaires dans @OuestFrance: ouest-france.fr/europe/pologne…