Sans revenir sur Deray et sa capacité à diagnostiquer la maladie d'Alzheimer sur les IRM (qu'il a démenti le lendemain) je suis assez surpris par le nombre de gens qui ont eu l'air surpris que cela soit impossible.
Je ne parle pas des JeanThérèse63 qui ont répondu que je ne savais pas de quoi je parlais parce que leur tata Micheline a eu une IRM et est morte de l'Alzheimer ce qui prouve bien que c'est vrai, mais de pas mal de médecins.
Donc micro thread sur l'Alzheimer en 2021 presque 2022
Du coup je vais tenter de faire simple et vous allez voir que les choses sont compliquées 😬
1/ les démences primaires définies comme une altération des fonctions cognitives non liées aux AVC, tumeurs, SEP etc... Ont une prévalence qui double tous les 5 ans.
1% à 60 ans / 2% à 65 ans /.../ 32% à 85 ans.
2/ On vient de terminer la partie facile.
3/ les critères diagnostiques les plus fiables sont, depuis 2001 (!) ceux de Démence de type Alzheimer probable NINCDS-ADRDA
Pour porter ce diagnostic il faut :
- un déficit d'au moins deux fonctions cognitives
- une installation progressive
- sans troubles de la conscience
- chez une personne entre 40 et 90 ans
- en l'absence de toute autre cause
Quand tous les critères sont réunis (je vous ai épargné deux trois trucs qui sont disponibles sur internet pour les curieux) vous obtenez une sensibilité de 93% et une spécificité de 70%.
Notez que pour l'instant personne ne parle d'IRM ni même d'imagerie.
4/ pourtant on peut faire des images.
On peut faire des scanners, des IRM et des scintigraphies.
Mais pourquoi faire ?
5/ pour répondre à ces questions il fait se rappeler ce que dans la cadre des démences ces examens montrent.
Les scanner montrent essentiellement des volumes (à partir des densités)
Les IRM montrent des volumes de neurones, de substance blanche et de vaisseaux (à partir des intensités des différentes séquences).
Et la scintigraphie montre des fixations relatives de traceurs par rapport à des zones présumées saines.
Alors pourquoi avec tout ça, ça ne permet pas d'améliorer la sensibilité et la spécificité du diagnostic ?
Même un peu ?
Même dans des cas hyper contrôlés ?
Même en 2021 ?
6/ parce que depuis le début de ce thread j'ai fait comme si la clinique était corrélée à la physiopathologie de la maladie d'Alzheimer.
Et vous avez fait pareil en le lisant.
Sauf que 7/ la clinique n'a absolument aucune forme de corrélation avec ce qui provoque la démence. La clinique est corrélée à la région du cerveau altérée, mais pas à la cause de cette altération.
Et c'est là que ça devient très compliqué.
Il existe au moins 4 types de maladies d'Alzheimer.
Celle qui se traduit initialement par troubles de la mémoire.
Celle qui se traduit initialement par des troubles du langage
Celle qui se ... Troubles du comportement
Et celle qui se .... troubles visuels
Ces quatre formes qui n'ont cliniquement RIEN à voir entre elles sont TOUTES les quatres et de façon indifférente causée par une accumulation de protéines SOIT hors des neurones SOIT dans les neurones.
Donc on a deux phénomènes totalement antinomiques qui peuvent donner les mêmes quatres formes de maladies qui n'ont rien à avoir entre elles.
Et si vous trouvez ça compliqué, attendez la suite.
Ces protéines qui s'accumulent soit dedans doit dehors sont les formes anormales de protéines....normales qui sont elles mêmes codés par plusieurs gènes. Qui peuvent être altérés de façon indépendante.
La protéine qui s'accumule hors de la cellule est en général de la A beta
qui est la forme anormale des protéines A beta 42 ou 40
qui sont respectivement codées par 7 gènes différents (au dernier recensement).
Et si la vous avez laissé tombé l'effort de comprendre, je vais vous achever en vous disant que si l'anomalie est une accumulation anormale intracellulaire de protéine, alors cette même accumulation, de cette même protéine....
...peut donner une démence fronton temporale, qui est une démence qui n'a rien à voir avec les démences de type Alzheimer
Pour résumer tout ça :
-> des gens qui ont exactement les mêmes symptômes peuvent avoir des maladies totalement différentes.
-> des gens qui n'ont aucun symptôme commun peuvent avoir la même maladie
-> la même maladie peut provoquer des symptômes identiques par des voies =/=
-> la même voie peut provoquer des maladies différentes.
Et dans tous les cas. Absolument tous, il n'y a aucune forme de corrélation entre la clinique et l'imagerie.
Parce que vous pouvez avoir des gens très malades avec des images normales, et des gens avec des images très anormale sans aucun symptôme.
Bon bref, si on ne peut pas faire de diagnostic d'Alzheimer avec une IRM, c'est tout simplement parce que la maladie d'Alzheimer est un mot, pas une maladie, qui décrit une association de certains signes.
En bon français on devrait parler de syndrome démentiel point.
Quand à JeanThérèse63, il faudrait aussi à un moment que les médecins soient honnête avec lui, en lui disant qu'en l'absence de traitement, le diagnostic exact de la protéine altérée, on s'en tape.
Et que vouloir le savoir est un gâchis de temps et de moyens.
Et il faudrait également avoir l'honnêteté de dire à JeanThérèse63, que non seulement on s'en tape, mais que tout ce temps qu'il perd à essayer de trouver le meilleur spécialité pour le meilleur diagnostic dans le meilleur centre mémoire, avec tout le stress que cela représente..
...pour lui et pour son proche, serait mieux dépensé en assiègeant les seuls qui pourraient lui apporter une aide concrète et qui le balladent, c'est à dire les services sociaux des départements, qui font tout pour ne pas assumer leur charge.
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Tiens j'ai un patient qui bosse pour une chaîne de grandes surfaces qui m'explique que c'est super compliqué de gérer les promotions liées aux grands événements de foot.
Parce que c'est impossible de les ignorer, et que les produits associés au foot se vendent super bien.
Mais qui les marges dessus sont très faibles, et que l'ambiance "foot" éloigne les clients qui achètent le plus.
Donc au total, à part la coupe du monde et encore, la nouvelle stratégie depuis quelques années est de concentrer dans un coin les trucs à footeux, et de tout faire pour que les autres ne voient rien.
Tiens encore un thread sur la personnalité et la pathologie. Et encore une fois une histoire racontée par une patiente dans les groupes de pairs de sclérose en plaques.
Mme X (la famille X est très très grande et il leur arrive toujours plein de trucs), est née, a grandi, et s'est développée dans ce qu'on peut appeler une famille très très très conservatrice. Très. Mais vraiment.
À tel point que vers 16 elle a commencé à militer pour un candidat de droite particulièrement à droite (pas le RN parce qu'ils étaient pas assez catholiques et pas assez royalistes). Bref je pense que vous avez perçu l'ambiance : on n'est pas chez des zadistes en sarouel.
Bon pendant que j'attends une thrombolyse qui visiblement ne viendra jamais (mais je suis sympa, j'attends jusqu'à la 4e heure 30), je lis plein de trucs sur COMMENT RÉFORMER NOTRE SUPER SYSTÈME HOSPITALIERS (que bien entendu tout le monde aime tant qu'il s'agit pas de payer).
Et de façon fort peut surprenante, toutes les solutions proposées consistent à déplacer un curseur imaginaire, sur une ligne qui l'est tout autant, allant de "plus de pognon" à "une meilleure gouvernance".
La partie "plus de pognon" tout le monde la connait.
La partie "meilleure gouvernance" un peu moins, mais en gros c'est toujours le même combo : plus de pouvoir de décision aux équipes de terrain et moins de paperasse inutile.
Mais il existe en France des médecins généralistes dans certains syndicats qui son encore meilleurs que lui, meilleur que moi, et bien évidemment que tous les kinés réunis.
Ces médecins qui ne connaissent ni la neuro, ni la rééducation, ni la kinésithérapie savent mieux que tout le monde de quel type de kiné les patients neurologiques ont besoin en rééducation.
Si.
Ils sont groupés dans des syndicats comme @MGFGrandest.
Comment passer du risotto aux stratégies des femmes au foyer italiennes des Pouilles dans les années 50 pour avoir un peu de temps.
Ou la recette de risotto de Mme X.
Aujourd'hui j'ai vu en consultation Mme X, qui a vécu presque toute sa vie dans les Pouilles avant de venir finir ses jours en France auprès de sa fille.
Mme X est en super forme malgré un AVC dont elle garde une séquelle motrice.
On discute, et de fil en aiguille elle me dit que le plus pénible est de ne plus pouvoir cuisiner. Et en particulier de ne plus pouvoir préparer SON risotto.
- voir un patient maire
- lui annoncer que je ne pourrais pas le revoir sauf urgence
- l'entendre dire qu'il n'a plus de MG traitant
- lui montrer la démographie des MG avec retraite de 50% d'entre eux en 5 ans
- le voir comprendre qu'il est pas au fond mais au bord du précipice.
C'est pour ça que les débats sur le généraliste comme filtre, comme gestionnaire de dossier ou comme coordinateur de soins, sont dépassés. La question va être de comment organiser le sauve-qui-peut pendant le 10-15 prochaines années.
Je ne sais pas comment cela va se passer, mais je suis sûr d'une chose : face à l'ampleur du phénomène, ni l'état, ni les syndicats, ne pourront éviter une dérégulation massive où ceux qui n'ont pas les moyens de payer (cher) et de se déplacer (loin) pour leurs soins, vont perdre