Petit meme de génétique végétale (mais pas que végétale) qu'on va expliquer dans ce fil. On va parler d'un principe très important en génétique moléculaire dont la découverte a mené à un prix Nobel.
Dans les années 80, des chercheurs ont voulu rendre des pétunias violets encore plus violets.
Pour ça, ils connaissaient le gène responsable de la couleur violette.
Ils se sont dit qu'insérer plusieurs copies de ce même gène résulterait en un petunia très violet.
Sauf que les pétunias qu'ils ont obtenus étaient violets avec des taches blanches, voire entièrement blancs. Ils ont supposé des mécanismes de suppression sans trop savoir lesquels. jstor.org/stable/3869076
Plus tard, les recherches de Fire et Mello sur Caenorhabditis elegans ont permis de découvrir la cause de cela : l'interference par ARN.
Ça leur à valu un prix Nobel. nature.com/articles/35888
Contrairement à l'ADN qui est double brin, l'ARN est généralement simple brin.
Généralement.
Mais on peut trouver de l'ARN double brin.
En utilisant une forme double brin de l'ARN messager correspondant à leur gène, ils ont observé que le gène en question ne s'exprimait plus.
En fait, l'ARN double brin, c'est très souvent des structures virales.
On a donc des mécanismes qui reconnaissent ces structures pour les éliminer.
L'ARN double brin est découpé en petits ARN double brin d'une vingtaine de nucléotides, appelés siRNA (pour small interfering, en français petits ARN interferents).
Ces siRNA vont ensuite se lier à la séquence d'ARN messager dont ils sont complémentaires, ce qui va mener à la destruction de cet ARN messager. Du coup plus de traduction, plus de production de protéines à partir du gène.
Ce qu'on peut aussi faire pour former un ARN double brin, c'est apporter un ARN simple brin qui a la séquence complémentaire de l'ARN messager que l'on veut cibler.
Quel rapport avec nos pétunias maintenant ?
Honnêtement j'ai du mal à trouver une explication claire, la plupart des articles disent "c'est de l'interference ARN" sans détailler en quoi l'ajout d'un transgene causerait la formation d'ARN double brin.
En effet, ici on ajoute un gène normal, qui va produire un ARN normal, il n'y a pas vraiment de raison qu'il y ait formation d'ARN double brin.
Une première hypothèse c'est que certains ARN aberrants dépourvus de coiffe ou de queue poly-A, des caractéristiques très importantes des ARN messagers, pourraient s'accumuler à partir du transgene.
Leur structure aberrante est alors détectée par des mécanismes cellulaires qui mènent à la formation de siRNA ayant une séquence complémentaire.
Une autre hypothèse c'est que le gène en question a une séquence qui fait que les ARNm peuvent se replier sur eux même et former une structure double brin.
Il s'agit ici d'une d'une forme aberrante qui existe en faibles proportions mais on sait aujourd'hui qu'il existe de nombreux gènes dont les ARN vont avoir une structure double brin, et dont la fonction a souvent un rôle dans l'expression des gènes.
La surexpression du gène de petunia mènerait à une surexpression de ces structures double brin qui va donc inhiber beaucoup plus l'expression du gène.
Il y a plein d'applications de cette interference ARN.
Par exemple je m'en suis servi pour identifier la fonction d'un gène. En diminuant son expression, je peux voir la fonction qui aura été perdue et donc en déduire le rôle de la protéine.
Ici vous voyez un contrôle que j'ai utilisé. J'ai ciblé un gène impliqué dans la formation de pigments. L'intererence ARN va faire que l'expression du gène est affectée, donc on a plus de production de pigments, et la plante est blanche, à l'instar de nos pétunias.
J'aurais pu simplement muter mon gène pour stopper son expression, mais il s'avère que c'est un gène assez important, donc j'avais besoin qui soit un minimum exprimé, l'interference ne bloquant pas à 100% l'expression du gène.
Il y a aussi des applications plus concrètes, par exemple en créant des plantes transgeniques qui portent des siRNA qui vont cibler un gène d'un ravageur, quand il se nourrira de la plante il absorbera ces ARN qui iront agir sur l'expression de ses gènes, menant à sa mort.
Ce genre de processus existe d'ailleurs dans la nature, les pathogènes injectant des petits ARN pour agir sur les cellules de la plante, et la plante en produisant pour se défendre contre ces pathogènes.
On peut aussi penser à des applications en médecine, par exemple pour limiter l'expression de certains gènes liés à la formation de cancers, cibler des gènes du virus du SIDA, etc.
Et pour revenir aux pétunias, on retrouve le même phénomène qu'observé auparavant de manière parfaitement naturelle dans des cultivars comme le magnifique Night Sky. europepmc.org/article/pmc/59…
Ici ça semble lié à la présence de deux copies du gène responsable de la couleur, mais comme pour les pétunias transgéniques on en sait pas plus sur les mécanismes, à part qu'on observe des siRNA dans les parties blanches.
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Selon un journaliste du Monde, les arguments en faveur des nouveaux OGM ressemblent à ceux en faveur des anciens OGM, qui n'ont pas tenu leurs promesses. Qu'en est-il vraiment ? lemonde.fr/idees/article/…
On va commencer avec le titre même. « L’agriculture occidentale a déjà connu une révolution génétique dont les promesses n’ont pas été tenues ».
Elle a surtout connu une révolution génétique qui a permis l'explosion de la production agricole, et d'arriver à l'agriculture d'aujourd'hui, qui nourrit quasiment tout le monde dans les pays occidentaux, sans avoir impacté les surfaces cultivées. ourworldindata.org/grapher/index-…
On passera sur le fait que si de telles variétés ne sont pas sur le marché aujourd'hui, c'est en grande partie à cause de l'opposition d'organismes comme Greenpeace.
Comme l'a soulevé @saprinti on trouve par exemple des projets de riz développé pour dégager moins de méthane. phys.org/news/2015-07-s…
La France est rapporteure pour la réautorisation du glyphosate au niveau UE en 2022, et vu que la controverse médiatique sur le glyphosate, l'ANSES a entrepris de trancher en mettant en oeuvre une batterie d'études.
Un groupe d’expertise collective en urgence (GECU) a été mis en place à l'ANSES, et ce groupe a défini les études à mener, et a rédigé le cahier des charges devant les encadrer.
Les arguments favorables aux OGM seraient soumis à très peu d'esprit critique, selon Stéphane Foucart. lemonde.fr/idees/article/…
Dès le châpo, il annonce la couleur : les industriels influencent le débat scientifique.
C'est le seul prisme par lequel Stéphane Foucart voit le monde, celui des lobbies partout. A aucun moment il ne peut imaginer qu'on soit en faveur de quelque chose indépendamment de lobbies.
Et si vous être pro-OGM sans être en conflit d'intérêt avec les lobbies, c'est juste que vous avez été soumis aux éléments de langage pro-OGM de l'industrie et vous êtes manipulés sans même le savoir.
Récemment, un certain directeur d'un certain IHU disait ceci quand à la significativité des résultats d'un test clinique. En fait c'est contre-intuitif, mais c'est littéralement l'inverse.
Et niveau contre-intuitif, il y a plein de choses un peu contre-intuitives en stats, plein d'idées reçues auxquelles j'ai moi-même longtemps crues, donc même si je pense que ça a déjà été abordé des dizaines de fois, un rappel n'est peut-être pas inutile.
Donc on va parler biostatistiques, pvalues et significativité, entre autres. Et on finira par voir pourquoi la plupart des découvertes scientifiques publiées sont fausses (c'est suffisamment putaclic c'est bon ?)
En premier lieu, les auteurs mentionnent cette étude, publiée en octobre dernier, qui montrait qu'un passage au bio en GB causerait une hausse des émissions de gaz à effet de serre. nature.com/articles/s4146…
Ils contre-argumentent alors que cette étude est simpliste et ne prend pas en compte de nombreux aspects.
Ils mentionnent leur propre étude, pas encore publiée, pour affirmer que de nombreuses caractéristiques bénéfiques du bio sont négligées.