Thread by @nourrirlemonde

#Trahison
Ce qui vient de se passer en Nouvelle-Calédonie est infâme et extrêmement grave, et je suis sidéré et choqué de voir que, à part @Mediapart et quelques allusions dans peu d'autres médias, cela est passé inaperçu jusqu'à (et y compris) aujourd'hui.
Quelques mots 🔽
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Depuis le XIXe siècle, la Nouvelle-Calédonie était le théâtre d'un colonialisme constant, inégalitaire, raciste - et caché sous le tapis. Les Kanaks s'étaient pourtant plusieurs fois révoltés, et ils le firent de façon spectaculaire dans les années 1980 (avec enfin un /
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… relai médiatique en France métropolitaine). Ce soulèvement tragique déboucha sur un processus de décolonisation et de paix, très imparfait et critiquable, mais qui ouvrait des portes. Les "accords de Matignon" de 1988 permettaient une reconnaissance de l'antériorité et /
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… de la culture kanake, et promettaient un référendum d'auto-détermination (protégé statutairement contre une "colonisation opportuniste électoraliste", qui fut en effet limitée même si elle s'est malgré tout poursuivie). Mieux encore, l'accord de Nouméa de 1998 fixait /
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… un cadre fécond à l'évolution constitutionnelle, au débat public et au(x) référendum(s). D'abord, il prévoyait la possibilité d'aller jusqu'à 3 référendums si les 2 premiers ne débouchaient pas sur l'indépendance. Ensuite, il garantissait que tout le processus et /
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… a-fortiori les référendums soient préparés et menés par consensus entre les deux camps. Je répère : par consensus. Négocié, arraché, discuté, mais consensus quand même.
Cette règle a été respectée pour le premier référendum. Puis pour le deuxième.
Et là, patatras.
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Au mépris de l'accord de Nouméa, au mépris de la raison politique, au mépris du respect humain, le gouvernement français (Macron, Castex et Lecornu) a décidé d'imposer une date refusée par les indépendantistes. En période de Covid (qui a circulé en Nouvelle-Calédonie ces /
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… derniers mois), les Kanaks ne pouvaient pas mener correctement campagne (population particulièrement à risque + règles coutumières de deuil qui empêchait les familles des défunts de s'impliquer puis d'aller voter). Mépriser des règles culturelles de deuil, c'est en soi /
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… une affirmation colonialiste violente & insoutenable : la prise en compte de la légitimité culturelle kanake est l'objet-même du débat ! Refuser de déplacer le scrutin à 1 date faisant consensus, c'est par définition bafouer l'esprit & la lettre de l'accord de Nouméa.
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Ainsi, en maintenant le scrutin ce 12 décembre, non seulement la France a renié sa parole et trahi un accord qu'elle avait signé, mais en plus elle l'a fait en insultant ouvertement l'une des parties (= réaffirmation coloniale par le refus de prendre en compte le deuil /
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… coutumier).
Oh, personne n'est dupe : le deuxième référendum n'avait donné qu'une courte victoire au "non à l'indépendance", et tous les colons tremblaient dans l'attente du troisième. Le "oui" était peu probable, mais il devenait possible, et un État colonial n'aime /
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… pas ce genre d'incertitude.
Macron, Castex et Lecornu ont trahi la République et tout honneur humain. Le référendum d'aujourd'hui n'a aucune valeur (il ne respecte pas le protocole de l'accord de Nouméa), et cela devrait être un (énième) scandale en une de la presse.
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NB : L'ethnologue Alban Bensa (hélas décédé il y a 2 mois), qui fut mon directeur de Master II, était un ami de Jean-Marie Tjibaou et "le" spécialiste de la région, et m'avait un peu informé. Je ne suis pas expert : d'autres pourront utilement compléter, iels sont bienvenu·e·s.