Thread by @nourrirlemonde

Pesticides #néonicotinoïdes : histoire d'une tentative de manipulation
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La procédure de ré-autorisation des néonicotinoïdes (pesticides dits "tueurs d'abeilles") sur les betteraves prend un tour des plus inquiétants, mêlant déni scientifique et passage en force.
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J'ai été nommé, au titre de l'association @APEnvironnement dont je suis administrateur bénévole, au "Conseil de surveillance chargé du suivi et du contrôle de la recherche et de la mise en œuvre d’alternatives aux néonicotinoïdes". Avant d'envisager lesdites alternatives, /
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... le "Conseil de surveillance" avait pour 1ère mission de donner un avis sur l'arrêté de ré-autorisation et de définir ses limites. Les données dont nous disposions en amont étaient notamment :
1. Des projections météorologiques (pour estimer le risque de prolifération /
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... des pucerons cette année et donc le risque de jaunisse) basées sur des données obsolètes et n'intégrant pas les nouveaux calculs de Météo-France qui prévoient un hiver 2021 plutôt rigoureux en France par déplacement du vortex polaire.
(cf. francetvinfo.fr/replay-radio/l…)
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2. Des données partielles sur les rendements betteraviers 2020, sans les comparer aux baisses de rendements constatés sur toutes les cultures (qui n'ont aucun lien avec le puceron mais bien avec la sècheresse),
3. Un avis de l'ANSES (mais toujours pas l'avis sur les /

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... alternatives aux néonic que l'ANSES était censée rendre avant le 31 octobre dernier),
4. Un cadre apparemment assez rigoureux pour éviter que les néonic ne contaminent les abeilles, via une interdiction de cultures à fleurs dans les 2 ans suivant les betteraves.
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Ce point 4 est fondamental. Les néonicotinoïdes sont systémiques (diffusés dans toute la plante à partir d'un simple traitement de la semence initiale) et extraordinairement rémanents (présents et actifs pendant plusieurs années dans la parcelle).
Déroger à leur stricte /
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... interdiction n'est concevable qu'avec un contrôle rigoureux des "rotations" (successions de cultures) excluant toute plante à fleur pendant au moins deux ans.
La première réunion du "Conseil de surveillance", convoquée à la hussarde, devait donc valider ces démarches.
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Il va de soi que l'absence de crédibilité du point 1, l'enfumage du point 2 et la désinvolture du point 3 (et j'en omet, pour résumer) suffisaient à ce que les représentant·e·s des associations et des apiculteurs émettent un avis défavorable.
Mais il y a pire. Et grave.
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Durant la réunion, les représentant·e·s de l'industrie sucrière, du syndicat betteravier de la FNSEA et de l'institut de la betterave (connectés depuis la même salle : bel aveu de la collusion FNSEA-industrie) n'ont eu de cesse de proposer de déroger au point 4.
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Par ex., ils ont demandé à pouvoir cultiver du colza dès N+2, en s'appuyant sur une étude suggérant que, si l'on sème à côté de la parcelle traitée une bande de fleurs précoces (floraison avant le colza), les abeilles semblent rester sur la 1ère culture fleurie et ne pas /
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... butiner le colza voisin.
Pas de chance pour eux, je suis agronome et j'ai pu réagir "en direct". J'ai souligné que 20 à 30% des rendements du colza viennent de pollinisation croisée (dont très peu par le vent), et que leur proposition reviendrait donc soit à /
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... perdre 20% du rendement du colza (évidemment absurde dans le cadre d'une procédure destinée justement à éviter des pertes de rendement), soit à laisser mourir les pollinisateurs sauvages à la place des abeilles. Car il faut être clairs : avec le protocole proposé, si /
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... les abeilles domestiques ne pollinisent pas le colza, c'est forcément que d'autres pollinisateurs sauvages s'en chargent. Et comme ils sont autant (voire plus) sensibles aux néonicotinoïdes, cette proposition revient cyniquement à "cacher sous le tapis" l'hécatombe /
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... de biodiversité.
Étrangement (en fait non...), ma remarque n'a pas donné lieu à débat sincère et constructif, ce qui est censé être le rôle de ce Conseil, mais uniquement à une attaque ad personam de la part d'un sénateur UDI, puis... à *aucun* débat agronomique ou /
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... écologique sur la "proposition" fantaisiste de l'ITB. Hop, nous sommes passés à autre chose 🤨. "Bon, me disais-je, c'était juste une idée en l'air dont nous parlerons plus sérieusement la prochaine fois".
Enfin, je craignais pire et j'avais raison. Car le vote final /
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... de "l'avis favorable" a intégré au pied levé la proposition fumeuse destinée à ne pas respecter la règle "pas de cultures à fleurs pendant 2 ans" (colza mais aussi maïs... voire autres). Mais cette intégration était floue : des pistes à débattre ? C'est sans doute /
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... ce qu'ont pensé quelques institutions qui ont ensuite voté "pour" l'avis final. Si c'est le cas, elles ont été trompées et devront demander des comptes (ou en rendre).
Car l'assouplissement des règles sur les rotations n'est désormais plus présenté comme un "sujet /
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... à débattre par la suite au sein du Conseil", mais comme un fait acquis et partagé (pardon ?). Le président du Conseil de surveillance lui-même l'affirme publiquement & explicitement.
lebetteravier.fr/2021/01/28/il-…
Cet assouplissement criminel, contraire aux avis des agences /
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... sanitaires et proposé sans débat, sur la base d'arguments fantasmatiques qui insultent l'agronomie et l'écologie, oralement et sans aucune référence scientifique à l'appui, se retrouve intégré aux forceps dans notre avis sur la ré-autorisation des néonicotinoïdes. 😱 /
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Ou bien le "Conseil de surveillance" n'est qu'une imposture où nous sommes pris pour des imbéciles, ou bien nous avons été victimes d'un passage en force anti-scientifique et anti-démocratique de la part de la filière betterave, avec la complicité des animateurs. /
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Que les "dispositions allégées" imposées sans débat soient révélées au public par le président du Conseil de surveillance (l'interview citée plus haut) alors même que le compte-rendu de notre réunion n'était même pas encore définitif ni officiel, laisse perplexe. /
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Face à cette volonté manifeste de nous mettre devant le fait accompli, nous n'avons hélas pas d'autre choix que de prendre la parole à notre tour pour exposer la manipulation.
Bien évidemment, ce passage en force visait à éviter tout débat, malgré le petit grain de sable /
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... que j'ai constitué en soulevant "à chaud" des premières objections agronomiques et écologiques. Une réflexion "à froid" impliquant des écologues conduirait à soulever encore plus d'objections, notamment le fait que même les bandes extérieures à la parcelle de /
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... betteraves ne sont pas indemnes de néonicotinoïdes comme le souligne le comité d'experts britanniques sur le sujet.

https://twitter.com/factsory/status/1355610926112792581

D'ailleurs, toute l'étude de ce comité britannique est édifiante & contredit l'optimisme français pro-industriels. Il est utile /
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... de la lire en contrepoint des affirmations et décisions françaises :
assets.publishing.service.gov.uk/government/upl…
Sans oublier que la réduction des insectes provoque celle des oiseaux, etc. :

https://twitter.com/factsory/status/1355610971889422344

Quoi qu'il en soit, le lobby betteravier a clairement instrumentalisé /
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... notre "Conseil de surveillance", avec la complicité assumée (et le porte-parolat, cf. plus haut) de son président, pour faire croire que l'assouplissement proposé émanait d'un débat et de réflexions partagées, alors qu'il n'a fait l'objet d'AUCUNE expertise et /
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... d'aucun débat, et que les avis critiques ont carrément été ignorés. Si cet "avis" est invoqué pour la prise de décision gouvernementale, ce sera une imposture et une forfaiture. Celleux qui jouent ce vilain petit jeu doivent assumer leurs responsabilités.
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NB : Je n'aborde pas ici la vraie raison économique de la "crise du sucre". Mais plutôt que de m'y coller et d'alourdir ce thread, je vous recommande cet article de la revue Mazette (si le lien ne marche pas c'est que vous n'êtes pas encore abonné·e) :
mazette.media/quimporte-la-b…

En fait vous êtes verni·e·s car cet article est accessible y compris aux non-abonné·e·s, faisant partie d'un échantillon en libre accès.
Mais ça reste une bonne occasion de vous recommander de vous abonner à @MazetteBD (avec le prochain Lapinot en avant-première, entre autres).

La suite de l'histoire ce matin : ils ont osé.

https://twitter.com/nourrirlemonde/status/1358001415730450434