Thread by @3emeDroite

[Thread 12] Comment je n’ai pas été un héros.

Aude a disparu. Enfin pas vraiment. Je sais où elle est.

Mr K l’a emmené à la cave.

Je pense à ce qu’elle doit subir. Être droguée et vidée de son sang dans le noir.

Cela me rend fou. Littéralement.

Je me mets à parler tout seul dans mon appart. Je monte des plans pour la sauver. Puis je me rends compte que je parle à voix haute et qu’on peut m’entendre. QUEL CON !

Alors j’appelle Cisco.

Cisco: Préviens la police. Signale une disparition inquiétante.
Moi: T’as raison.
Cisco: J’ai souvent...
Moi: Je sais ta gueule !

J’appelle la police et je fais ce que Cisco m’a dit. Ils prennent des notes.

Et puis rien.

Le lendemain. Je rappelle alors. Je leur dit que c’est un poil urgent. Genre vitale quoi.

On me dit que ça ne l’est pas.

Moi: Faîtes votre boulot, MERDE !
La police (représentée par une fonctionnaire sans âme): Monsieur, calmez-vous.

La phrase qui a TOUJOURS l'effet inverse.

Moi: MAIS POURQUOI JE ME CALMERAI BORDEL DE FILS DE ...
La police: Votre amie va bien.
Moi: Heu...pardon ?

La police: Nous avons eu sa famille. Elle va bien. Arrêtez de nous appeler maintenant.

J’ai du mal à y croire. D’ailleurs, je n’y crois pas. Je sais ce qu’il se passe. Mr K se fait passer pour elle par SMS.

Ou alors, il l’oblige à parler au téléphone et à dire qu’elle va bien !

Je passe un cran au niveau de la folie. J’arrive au stade De Niro dans Taxi Driver ou Shia Laboeuf dans sa vie de tous les jours.

Il faut que je récupère la clé de Mr K. C’est la seule façon d’accéder à la cave.

Pour ça, il faut que je le surprenne un soir quand il a pris un somnifère.

Une nuit, je décide d’aller frapper chez lui directement. Il va être foncedé. Je ne vais pas avoir du mal à le mentaliser comme la dernière fois. Il s’en rappelle même pas le con.

Il m’ouvre.

Lui: Vous voulez quoi ?
Moi: Je peux entrer ?
Lui: Non.
Moi: Je peux entrer ?
Lui: Ça ne marchera pas cette fois.

Merde il s’en rappelle.

Moi: Aude. Je veux la voir.
Lui: Elle est plus là. Et c’est de votre faute.
Moi: QUOI ?

Moi: Il fallait pas lui parler.
Moi: Arrêtez de retourner ça contre moi ! C’est vous le …
Lui: Le quoi ?
Moi: Le suiveur. Le clébard de Mia !

Il me fixe comme s’il allait m’en mettre une. Sauf qu’il a un gros bide et zéro force dans ses bras flasques. J’ai plus peur de lui.

Lui: Vous ne savez pas de quoi vous parlez.

C’est vrai. Mais je sais faire semblant. Alors je l’emmerde. Et j’ai rien à perdre. Alors je lui dis.

Moi: Je vous emmerde.

Lui: J’ai tout fait pour vous aider. Je peux plus rien pour vous.
Moi: Donnez moi les clés de la cave.
Lui: Non.
Moi: DONNEZ MOI LES PUTAINS DE CLÉS !

Et là, contre toute attente...
...il me fout une droite.

Je l’ai tellement pas vu venir. Je tombe en arrière sur le sol.

COMME. UNE. MERDE.

Il me toise. Il a l’air plus grand. Il serre les poings.

Lui: Maintenant, cassez-vous.

Et il claque sa porte.

Je remonte chez moi. Mais pendant tout le trajet, je me dis que je devrais redescendre et lui mettre aussi mon poing sur la tronche. À la surprenante, comme lui putain !

Parce que oui, c’est juste parce que j’étais pas prêt qu’il a réussi. C’était un coup de traître.

Pas du tout l’esprit Coubertin.

Puis je passe devant chez Aude. Et je me rappelle pourquoi je fais ça. Pour elle.

Faut que je trouve un autre moyen d’entrer dans cette putain de cave.

Je rentre chez moi et je décide de googliser “Comment forcer une serrure”. Je trouve un milliard de réponses.

Y’a vraiment des tutos pour tout sur le net.

C’est alors que je reçois un message.

“Je vais bien. Arrête de me chercher”

Aude

J’ai le coeur qui s’arrête pendant un moment. Elle va bien ? Pour de vrai ?

Mais je sais que c’est faux. C’est Mr K qui utilise son téléphone.

Je réponds direct “Bien tenté connard”.

BIM ! PRENDS ÇA !

Puis je vois que la correction automatique m’a fait écrire “canard”.

MERDE !

La conversation SMS continue

Fausse Aude: Mais pourquoi tu dis ça ?
Moi: Je voulais dire canard. Pas canard ! Merde ça l’a refait ! Bref c’est pas Aude qui me parle je le sais.

Moi: Je vais défoncer la porte de la cave. Je m’en bats les coudes !

Moi encore: Putain de correction ! Les coudes ! Pas les coudes !

Moi encore encore : Bref, je vais défoncer la porte.

Et là...je reçois un appel FaceTime.

No way...

Je décroche. Et je vois le visage d’Aude.

Elle est dans une maison. Elle va bien.

Je suis sans voix. Je comprends plus rien.

Aude: Je vais bien, tu vois ? Je suis chez mes parents.
Moi: Mais...pourquoi tu me l’as pas dit !
Aude: Pourquoi tu m’as pas appelé TOI ?!

J’avoue.

Moi: Donc t’as déménagé…
Aude: Oui, parce que TU me l’as conseillé. Mais toi, t’es toujours dans l’immeuble ?
Moi: Heu...oui.

Je réalise la gravité de la situation. Je suis le prochain donneur. Mr K a essayé de me protéger. Mais il va recevoir un ordre de Mia.

Et il va venir me chercher.

Elle: Il va falloir que t’arrêtes d’être con là.
Moi: Oui Madame.

Je raccroche. Je prends quelques affaires. Et je quitte l’appartement.

Pour de bon.

La descente des marches est la plus longue de ma vie. J’essaie de courir à pas feutrée. C’est à la fois épuisant et ridicule à voir.

J’arrive au deuxième étage. Personne.

J’arrive au premier étage. Personne.

J’arrive au Rez-de-chaussée.

Personne. Pardon, j’ai fait un tweet pour rien.

J’arrive enfin dehors. J’accélère le pas. Je prends le métro à Reuilly-Diderot. Je vais y arriver.

Je trouve une place assise. Je souffle enfin. Je regarde mon sac. Il y a encore moins d’affaire que quand j’ai emménagé.

Je n’ai rien gagné en allant dans cet appart. J’ai même perdu des choses. Quelques t-shirts. Et une part de moi.

Celle qui pensait que tout était possible dans la vie.

Et là...devant des dizaines d’autres usagers de la RATP…

Je pleure.

Je n’arrive pas à me contrôler. J’ai tellement honte. Les autres voyageurs m’ignorent.

Sauf une dame qui me tend une pièce. Je l’accepte.

Le métro part. Je fais toute la ligne sans m’en rendre compte. Puis je prend le RER. Machinalement. Je sais où je dois aller.

Je rentre chez mes parents.

Non.

Je rentre chez moi.

Je sais que mon père va me dire qu’il avait raison et qu’il savait que j’allais revenir tôt ou tard. Mais je ne vais pas le supplier.

Je vais supplier ma mère.

Je préviens ma mère que j’arrive. Que j’ai eu un soucis. Je sais pas quoi dire de plus. J’ai pas envie de mentir. Mais j’ai pas envie d’expliquer non plus.

J’arrive à la maison. Ma mère me fait un câlin. Heureusement que j’ai déjà pleuré juste avant.

Mon père me salue vaguement. Je lui demande si je peux aller dans ma chambre. Il semble gêné. Je rentre dans la pièce.

Ma chambre est devenue son bureau.

“Je ne pensais pas que tu allais revenir. Et puis, t’avais trouvé un travail. T’avais l’air de savoir ce que tu faisais.”

Je le prends bizarrement bien.

Comme j’ai plus de lit, on doit sortir le vieux matelas gonflable. Mon père décide alors de m’aider à avec le gonfleur. Je me mets a pomper. Ça fait un bruit bien naze.

Fiout Fiout Fiout Fiout
Moi: Je vais essayer de pas rester longtemps.
Fiout Fiout Fiout Fiout
Mon père: Ok.

Fiout Fiout Fiout Fiout
Moi: J’ai essayé tu sais...d’être un adulte tout ça.
Fiout Fiout Fiout Fiout
Mon père: Oui.

Fiout Fiout Fiout Fiout
Moi: Mais y’a des choses qui me dépassent. Et qui me font peur. Je pensais pouvoir gérer...
Mon père: Tu fais ça mal.
Moi: Oui bah je sais !
Mon père: Je parle de la pompe. Tu fais ça mal.

Mon père prend ma place au gonfleur et me fait un tuto-pompe.

Et j’aime ça.

Mon père m’explique juste comment gonfler un matelas. Et c’est la meilleure chose qui m’est arrivée depuis longtemps.

Puis, il commence à me faire un tuto-vie. Pareil, j’écoute avec bonheur et perplexité.

“Dans la vie, on essaie des choses. Et des fois ça rate. Mais on a essayé. Et essayer c’est déjà réussir. A part le saut à l'élastique. Ça si tu rates, t’es mort et puis c’est tout.”

J'acquiesce. La logique est impeccable. Mais je vois qu’il veut me dire autre chose. Et que ça le gêne. J’ai un peu peur du coup.

“La dernière fois, tu m’as dit que j’avais pas de couille. T’avais raison.
Moi: T’es pas mon père !? Ça explique tellement de choses !
Mon père: Je parle de courage.
Moi: Ok. Continue.

Mon père: J’ai quitté mon travail à la RATP.

Oh. Big news. Mon père s’est occupé de la maintenance des métros pendant 25 ans.

Mon père: J’ai toujours détesté ce job. Mais je me suis persuadé qu’ils avaient besoin de moi. Et que sans moi, y’aurait même plus de métro à l’heure.
Moi: Si ça peut te rassurer, mon RER a eu 20 minutes de retard.
Mon père: AH JE LE SAVAIS !

Lui: Bref. C’est grâce à toi. Et je me sens mieux depuis. Merci.

Mon père. me. remercie.

J’essaie de ne pas pleurer. J’échoue.

Il fait semblant de ne pas le remarquer. Je l’aime pour ça.

Mon père: Du coup...c’est un peu compliqué financièrement. Donc si tu restes, faudrait que tu paies un loyer. Voilà.

Et il s’en va. Merde. Je savais qu’il y avait un truc !

Je m’allonge sur mon matelas. Je sens déjà qu’il se dégonfle. Mon séjour ici s’annonce temporaire.

Mais j’ai besoin de répit.

Je branche mon portable pour le recharger. Et je vois que j’ai reçu un message.

Mais d’un numéro inconnu.

Le message est glaçant.

“Il ne fallait pas quitter l’immeuble.”

Moi: Qui c’est ?
Inconnu: Je vous avais dit de ne rien faire. Au supermarché.

Le gars au manteau marron ! Monsieur Equerre !

Moi: Comment vous avez eu mon numéro ?
Inconnu: Vous nous l’avez donné.

Mais n’importe quoi !

Moi: Vous voulez quoi putain ?
Inconnu: Vous devez retourner à l’appartement.
Moi: Mais non ! Mais pas du tout ! Mais jamais !
Inconnu: On a besoin de vous là bas.
Moi: MAIS VOUS ETES QUI ?

Inconnu: On a lu votre plainte en ligne.
Moi: Vous m’avez hacké ? Je vais prévenir la police !

Et là...

La suite dans le THREAD 13 ici ⬇️

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