Thread by @ReveilEcolo

🏆 Ce matin, Challenges a sorti un classement des entreprises françaises “championnes du climat”.

Alors, véritable analyse critique ou prime au greenwashing ? On fait le point en thread 👇

Spoiler : on n’est pas d’accord sur les règles du jeu.

challenges.fr/green-economie…

(2/25)

Avant tout, saluons l’initiative : elle incite les entreprises à évoluer. Et il y a urgence quand on sait que les 100 compagnies les plus polluantes sont responsables de 70 % des émissions de GES au niveau global (source : @CDP).

cdp.net/en/articles/me…

(3/25)

La méthodologie utilisée par @Challenges compare 70 entreprises françaises sur un unique indicateur : l’évolution de l'intensité carbone du chiffre d’affaires sur les scope 1 et 2.

(4/25)

Quésaco ? En gros on mesure la quantité de gaz à effet de serre émis directement par l’entreprise pour chaque € qu’elle gagne. C’est une première approche assez efficace pour évaluer les impacts carbone des compagnies et les comparer entre elles.

(5/25)

Néanmoins, cet indicateur ne répond pas à certaines questions : l’entreprise a-t-elle mis en place un large programme d’efficacité et de sobriété ? Revu profondément ses process ? A-t-elle acheté ou vendu des actifs ?

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Par exemple, si une entreprise se sépare de ses activités les plus nocives, les laissant à des concurrents, souvent dans des pays à la réglementation peu contraignante, elle gagne des places au classement, mais le climat n’y voit pas la différence. 🌍🔥

(7/25)

De plus, le fait de se limiter au scope 1 et 2 pose problème. La méthodologie occulte en fait la majorité des émissions des entreprises. Pour comprendre les différents scope plus en détails, c’est par ici :

associationbilancarbone.fr/wp-content/upl…

(8/25)

Se passer du scope 3 c’est ignorer toutes les émissions en amont et en aval du produit dans la chaîne de valeur. C'est-à-dire cacher sous le tapis une part conséquente des émissions liées à l’entreprise (jusqu’à 90% dans certains secteurs !)

(9/25)

Après la méthodo, l’analyse vaut elle aussi le détour : Challenges annonce “Découvrez quelles sont les entreprises vertueuses”.

(10/25)

Sauf qu’on connaît les trajectoires globales actuelles désastreuses et cet indicateur qui ignore l’intensité carbone du scope 3 ne permet pas de dire que ces entreprises sont championnes du climat.

(11/25)

L’article loue les entreprises engagées sur des trajectoires qui visent la neutralité carbone… pour certaines à l’horizon 2050. L’engagement est notable, mais les effets d’annonce doivent nous inciter à la prudence. C’est dès 2020 que nous voulons des engagements.

(12/25)

Challenges sous-entend que toutes les entreprises peuvent atteindre la neutralité carbone. Mais avant cela , et à la vue des efforts à faire, ne faut-il pas questionner l'utilité sociale des produits ? En a-t-on vraiment besoin ?

(13/25)

Passons au classement. Tout d’abord, comparer des entreprises qui rendent des services très différents à la société n’a pas de sens.

(14/25)

Certains business models doivent s’adapter face à l’urgence écologique, d’autres doivent disparaître, et d’autres encore, se développer. Ce classement ne permet pas de l’expliciter.

(15/25)

En d’autres mots, certaines entreprises génèrent des émissions “nécessaires” au bon fonctionnement de notre société et dans cette mesure acceptables, comme l’électricité bas carbone, l’agriculture (cela n’empêche pas qu’il faut les réduire également !)

(16/25)

D'autres beaucoup moins et rendent des services superflus, dont nous pouvons et devrons nous passer dans un monde écologiquement contraint.

(17/25)

C’est pour cela qu’à Pour un réveil écologique nous préférons réaliser des analyses sectorielles qualitatives, questionnant l’usage, les trajectoires, l’impact sur l’environnement, etc.

(18/25)

Nous avons publié il y a 3 semaines celle sur le luxe et les cosmétiques et travaillons actuellement sur le BTP, l’automobile et la grande distribution, dont les rapports sortiront prochainement.

https://twitter.com/ReveilEcolo/status/1318218440025440257?s=20

(19/25)

Et comme @KeringGroup est visiblement le nouveau champion du climat (@EmmanuelMacron doit être jaloux) nous ressortons notre analyse sur leur stratégie:

https://twitter.com/ReveilEcolo/status/1319603974048276482?s=20

(20/25)

En bonus, l’étude nous dit que Kering a diminué ses émissions de GES de 42,3% entre 2016 et 2019, impressionnant non ?

(21/25)

En fait, pas tellement… Tout d’abord, ces émissions concernent uniquement celles liées à leur consommation d’énergie, soit moins de 1,8% des émissions totales du groupe (au scope 3) !

(22/25)

Ensuite, la diminution a uniquement touché la consommation d’électricité : non pas en la diminuant, mais en achetant massivement des certificats d’énergies renouvelables.

(23/25)

En conclusion :
A. Ce type de classement est inédit et va dans le bon sens.
B. L’indicateur est efficace mais incomplet et l’absence du scope 3 pose problème.

(24/25)

C. Les comparaisons intersectorielles n’ont pas beaucoup de sens tant les entreprises sont différentes et ne rendent pas les mêmes services
D. Bref, les vrais champions du climat, ce sont ceux qui rendent un service utile et qui ne polluent pas (ou peu 😉).

(25/25) Un thread collaboratif signé @Mathis_Perdriau @pezza_s et @BenoitHalgand 🤝