Thread by @Mangeon4

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Sur une affiche de campagne pour l’élection présidentielle de 1981, Valéry Giscard d'Estaing pose devant un réacteur #nucléaire emblématique, la « boule de Chinon ».

Thread à 4 mains avec @RenanViguie : 1965-1981, Affiches et visions de la modernité.

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1/ Avant-propos : Évidemment, il n’est pas question d’expliquer que ce sont les affiches qui font gagner/perdre une élection, mais celles-ci nous montrent l’évolution des rapports au progrès et à la modernité dans la communication politique (avec un fil rouge sur le nucléaire !).

2/ Commençons par l’élection présidentielle de 1965 avec 2 affiches aux styles très différents pour les candidats au second tour. De Gaulle mise sur son image de libérateur avec un drapeau tricolore et le peuple représenté comme quasiment « à ses pieds ».

3/ A contre-courant de l’affiche de de Gaulle qui mise sur son aura, l’affiche de François Mitterrand cherche à représenter le candidat de la gauche comme celui du progrès. Mitterrand qui a alors 49 ans (De Gaulle 75 !) va jouer à fond la carte de la jeunesse et de la modernité.

4/ Un peu austère, l’affiche sépia (pas forcément associé à la modernité) montre Mitterrand au premier plan, regard vers l’avenir, devant un pylône d’une ligne THT et en fond la fumée des cheminées d’usines… Un paysage moderne mais aussi rural avec ce décor d’un champ labouré.

5/ Mitterrand veut incarner le progrès qu’il associe alors à ce décor exprimant les formes de modernité typiques des années 1960. En 1965, ce sont également les grands débuts du nucléaire civil à Chinon, même si le programme nucléaire est encore limité…

6/ Si le nucléaire civil est absent des débats, dans des interviews, on voit néanmoins Mitterrand attaquer De Gaulle sur le nucléaire militaire. Ce dernier gagne finalement l’élection présidentielle.

7/ Lors de l’élection présidentielle de 1969, les partis de gauche, très divisés, sont éliminés au 1er tour, après les évènements de mai 1968 puis le raz-de-marée gaulliste lors des législatives de juin. Voici la réaction de Mitterrand à la déroute des législatives...

8/ Le second tour oppose Georges Pompidou, un fidèle du général de Gaulle, face à Alan Poher, un centriste, qui fut chargé d'exercer la fonction de président de la République à titre intérimaire après le départ de de Gaulle le 28 avril 1969. L’affiche de Poher est très classique.

9/ Pompidou opte, comme Mitterrand auparavant, pour l’image du progrès avec le Concorde, l’avion de ligne supersonique français, qui effectue son premier vol le 2 mars 1969. Cette fois le progrès semble parler aux électeurs et Pompidou remporte l’élection présidentielle.

10/ En 1974, la France lance un programme nucléaire massif (le plan Messmer, voir vidéo) mais la thématique du progrès et de la modernité ne s’affiche pas durant l’élection présidentielle même si elle va être au cœur des discours Valéry Giscard d'Estaing…

11/ En effet, le candidat Valéry Giscard d'Estaing veut casser l’image de technicien austère et pose avec sa fille quand François Mitterrand affirme vouloir rendre le pouvoir aux Français, de manière plus radicale.

12/ Lors du débat télévisé du second tour, Valery Giscard d’Estaing attaque Mitterrand, « l’homme du passé ». La modernité a encore le vent en poupe, matérialisée notamment par le programme nucléaire en cours, ardemment défendu par Giscard.

13/ Valéry Giscard d'Estaing est élu président de la République. Mais, pendant son mandat, l’image du progrès est écornée par la seconde crise pétrolière (1979) et la montée du chômage, alors que les mouvements écologistes et antinucléaires se développent en France.

14/ En difficulté en 1981, Valéry Giscard d'Estaing propose plusieurs affiches, l’une d’elles le présente devant le réacteur nucléaire Chinon A1 (boule de Chinon), arrêté en 1973, alors que la France a abandonné cette filière (Uranium Naturel graphite Gaz). Choix étonnant non ?

15/ Mais Giscard joue à fond l’image de l’homme d’expérience, à la stature internationale (« il se bat pour la paix »). Président sortant à l’image négative, il ne peut pas incarner le changement comme en 1974 et mise sur le nucléaire qu’il a défendu pendant tout son mandat.

16/ Par conviction ou par opposition à la politique de son adversaire, François Mitterrand fait le choix d’une campagne critique sur le programme nucléaire, avec la promesse de pas construire de nouvelles centrales et d’abandonner le projet de centrale nucléaire de Plogoff.

17/ Son affiche célèbre « La Force tranquille » est imaginée notamment par Jacques Séguéla. Cette affiche évoque la tradition, les racines, l’harmonie avec la nature…

18/ Mitterrand a oublié les pylônes et lignes THT, remisé les usines pour les remplacer par le petit village de Sermages, près de Château-Chinon dont il a été maire. C’est une rupture totale avec 1965 : il n’est plus le candidat de la modernité mais exalte son ancrage territorial

19/ François Mitterrand est élu président de la République. Si la promesse de ne pas construire Plogoff sera respectée, le programme nucléaire civil continuera (à un rythme moins soutenu) pendant tout son mandat. Mitterrand fera même la promotion du nucléaire français en Chine.

20/ Cette évolution (1965-1981) de la communication de Mitterrand est aussi certainement un symbole de l’évolution des représentations des paysages de l’électricité qui ont été longtemps des signes de la modernité, et qui doivent dorénavant se cacher, s’enfouir.

21/ Les années 1980-1990 marquent réellement la fin de l’euphorie moderniste et laisse place à une période de doutes sur l’avenir. Plus aucun candidat n’a jamais utilisé une centrale nucléaire sur une affiche électorale !

Fin du Thread !

22/ Sources :

cairn.info/revue-societes…

actualite.nouvelle-aquitaine.science/affiche-de-cam…

vivelapub.fr/affiches-elect…

jaimemonpatrimoine.fr/fr/module/81/1…

23/ Sources vidéo :

ina.fr/video/CAF94038…

ina.fr/video/CAF94054…

ina.fr/video/CAB77008…



m.ina.fr/video/CAF94058…

ina.fr/video/R1122124…

fresques.ina.fr/mitterrand/fic…