Les trainées de condensation: pourquoi ne doit-on pas inclure leur effet dans celui du CO2?
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Les trainées de condensation (ou contrails) sont des nuages locaux et temporaires qui se forment en sortie de réacteur à une altitude comprise en 8 et 13 km. Ils peuvent induire la formation de cirrus persistants ayant un effet réchauffant (2/17)
La formation de ces cirrus persistants est un phénomène plutôt rare. Seulement 2% des vols participent à 80% du forçage radiatif (RF) liés aux contrails. Ce forçage a lieu surtout la nuit, en zone tempérée dans l'hémisphère nord et dure qq heures à qq jours
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Cette courte durée d'effet est une différence majeure avec le CO2: l'arrêt des contrails provoque l'arrêt immédiat de leur effet réchauffant.
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Or il existe des méthodes de mitigation efficaces: un changement d'altitude (+/- 2000ft) ou de trajectoire de 1,7% des vols peut réduire jusqu'à 91,8% de l'effet réchauffant des contrails.
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L'utilisation de carburants durables ou de kérosène plus "raffiné" (comportant moins de composés aromatiques) permet également de réduire significativement la formation de ces cirrus.
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Ces mesures sont envisageables à court/moyen terme. Mais l'incertitude sur l'effet des contrails est encore trop importante pour mesurer leur bénéfice réel.
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Parmi les effets temporaires, l'aviation a également des effets refroidissants, potentiellement forts (qui pourraient annuler l'effet réchauffant de l'aviation):
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Ces effets ne sont pas encore caractérisés de manière assez robuste: ils ne sont pas inclus dans le bilan total de l'aviation:
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Pourtant ces interactions nuages/aérosols (hors aviation) font partie du bilan du GIEC (contribution anthropogénique au réchauffement):
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Donc en associant les effet temporaires à l'effet du CO2, il y a des chances que dans les années à venir la contribution de l'aviation soit revue nettement à la baisse. Est-ce pertinent? (11/17)
Pas tellement: le CO2 émit, dont l'effet pourra être masqué temporairement par des effets refroidissants, restera dans l'atmosphère pendant plusieurs siècles. Ce qui pèse dans les études de compromis.
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La comparaison effets CO2/effets temporaires repose sur de nombreuses hypothèses et périmètres. Elle ne devrait être faite que dans un cadre scientifique précis.
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C'est par ailleurs ce que préconise l'EASA: l'utilisation du RF/ERF (qui permet la comparaison effets CO2 / effets tempo) ne doit pas sortir du cadre scientifique:
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Et l'ADEME rappelle que les effets des contrails ne doivent être pris en compte dans le cadre de l'information CO2:
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Bilan: les impacts hors CO2 temporaires ne sont absolument pas à négliger, c'est un point d'attention majeur. Mais on ne devrait pas les convertir à un % de CO2. c'est simplifier un problème qui n'est pas simple.
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Sources:
D. S. Lee et Al., 2020
Stettler, 2020
Avila et Al., 2019
Penner et Al. 2018
Burkhart et Al. 2019
EASA
ADEME
Effets hors-CO2 « Nous [industriels] on aimerait bien que les scientifiques se penchent un peu plus sur la question ». En effet, il est impossible de trouver une solution adaptée à un problème mal défini:
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Il existe des effets potentiellement très refroidissants: « on pourrait même imaginer qu’ils contrebalancent complètement l’effet réchauffant du reste »:
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Extrait du rapport de l’EASA (Nov. 2020) confirmant ces propos:
(20/)
Rappel de Glen Peters sur le « poids » du CO2 par rapport aux effets temporaires: 21/
Autre visualisation de ce poids particulier du CO2, avec l’effet de différents GES sur le delta température à long terme.
=> L’agrégation CO2 & effets temporaires n’est pas une mesure pertinente dans un cadre général. 22/
Synthèse d’une conférence de mars 2021 sur la mitigation des effets hors-CO2 de l’aviation. Article (accessible) à lire pour savoir où en est réellement la recherche à ce sujet:
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Extrait de la conclusion de cette conférence. On notera:
- Certains effets hors CO2 sont encore peu connus
- La nécessité de trouver une métrique représentative
- Des moyens de mitigation envisageables
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La réponse de D. Lee sur cette conférence faisant un focus sur la difficulté de faire un compromis entre diminution des effets des contrails et augmentation (même faible) du CO2 (pb de métrique associant des effets très différents) 25/
Le débat, l’argumentation, c’est essentiel pour avancer. Même si les sensibilités sont différentes (je dirais même: SURTOUT SI les sensibilités sont différentes). Merci @Laydgeur pour le RT!
Je me souviendrais pourtant de mon entrée sur twitter, un article qui m’avait valu quelques réactions épidermiques 😂. Il faut dire que le sujet s’y prêtait…
Beaucoup de réactions à ce thread, je vais donc tâcher d’éclaircir certains points (et de démasquer certaines entourloupes pas très fair play utilisées pour discréditer l’aviation) :
Thread #2 ⤵️⤵️ 1/
➡️ La méthode ICAO permet de distinguer la classe économie et la classe business 💺. C’est une hypothèse juste car le taux d’émissions est vraiment différent: exemple, selon l’ICAO, un pax premium émet 2 fois + (sur les vols ✈️ > 3000km) 2/
Eh oui, la non distinction des classes de siège peut engendrer des écarts significatifs! Par exemple, un A380-800 peut emporter un maximum de 868 passagers en classe full éco tandis que British Airways configure ses A380 en 4 classes pour 469 pax maxi.
3/
Je n’ai que quelques milliers d’heures de vol et la gestion carburant qui va avec, mais ces chiffres qui tournent sur différents réseaux sociaux me paraissent totalement aberrants.
En utilisant un comparateur d’une « petite institution aéronautique » (ICAO, Organisation de l’Aviation Civile Internat., dépendant de l’ONU), voici ce qu’on obtient:
ORY -> MRS: 93,7 kg
ORY -> FCO: 110,7 kg
CDG -> JFK: 333,6 kg
CDG -> HND: 411,1 kg
CDG -> SYD: 983,9 kg
2/
Les différences sont conséquentes, elles divergent d’un facteur 10 dans le pire des cas!
Train vs Avion, ce qu’on ne vous dit pas! Thread ⤵️⤵️
(1/ ) Aujourd’hui, on compare souvent l’avion et le train sur le plan du CO2 avec un résultat très défavorable à l’avion (rapport 1 à 40, jusqu’à 1 à 1500):
(2/) Mais ces résultats se basent sur des données et des arguments discutables:
(1/) Pourquoi le bilan carbone de la LGV Rhin-Rhône est « embelli » par ses hypothèses de report modal? Thread ⤵️⤵️
(2/) Ce tronçon de LGV fait 137,5 km entre Dijon et Mulhouse. Le bilan estime que cette portion de LGV ferait économiser 2,758 millions de tCO2 par report modal Avion->TGV. Cela représente 0.4 Milliards de Pax.km/an. Mais sur quelles lignes???
(3/) Le train devient pertinent pour des trajets inférieurs à environ 3h (selon le rapport « l’avenir du transport ferroviaire » 2018 et l’étude ci-dessous).