Aujourd’hui, #threadagri historique : on va parler de la plus spectaculaire et dramatique faillite du monde agricole, celle des établissements Bach en côte d’or, en 1991.
Attention, ça va parler gros sous, cavalerie, banques louches 💸💸💸
La chute du négociant privé , aussi brutale qu’inattendue, aura provoqué des faillites d’agriculteurs en cascade, mais aussi des suicides, des divorces, et en tout état de cause, des conséquences à très long terme sur l'agriculture de la région.
Petit point vocabulaire : un négoce agricole diffère d’une coopérative en ce qu’il est détenu non pas par les agriculteurs, mais par des propriétaires privés.
La plupart du temps ce sont des sociétés familiales, ce qui ne les empêche pas d’atteindre une taille très importante.
Et c’était le cas ici ! Les Ets Bach basés à Mirebeau-sur-bèze en côte d’or, rayonnaient sur plusieurs départements, comptaient près de 3000 clients agriculteurs, et visaient clairement la première place des négoces Français, la 1ere étant déjà à l’époque...
...occupée par la maison @GroupeSoufflet , basé à Nogent-Sur -Marne dans l'Aube.
Leur développement, au cours des années80, avait été spectaculaire : ils prenaient des parts de marché en parvenant à acheter les céréales des agriculteurs , plus cher que leurs concurrents.
On estime que les Ets Bach parvenaient à acheter entre 15 et 20% de la production régionale.
Ils achetaient les céréales, les revendaient aux industriels, ils distribuaient aussi des intrants (engrais et phytos), comme tout négoce ou coopérative.
MAIS eux semblaient avoir trouvé le secret pour acheter toujours plus de céréales, plus cher que les autres : Albert Bach était « le seigneur des plaines »
Charismatique, son seul nom suffisait a garantir les énormes prêts qu’il faisait contracter à son entreprise pour continuer à la faire tourner et à la développer.
Tout cela au prix d’intérêts et d’agios bancaires qui dépassaient l’entendement, mais la cavalerie était lancée : un prêt en remboursait un autre, et plus la rentabilité de l’entreprise baissait, plus les crédits augmentaient.
Les agriculteurs, confiants dans cette belle réussite régionale, lui vendaient leur récolte.
Les Ets Bach leur faisaient même crédit : ils étaient devenu le banquier des agriculteurs en difficulté !!
Mais voilà. Ce qui devait arriver …Arriva.
A court de trésorerie, ils ne peuvent pas régler les achats de céréales d’un agriculteur, déjà en difficulté.
Acculé à la faillite, ce dernier porte plainte , et de fil en aiguille, la justice va tomber des nues : le passif du négoce se monterait à plus de 600 millions de Francs de l’époque !!!
Une somme encore jamais vue dans le monde agricole.
Et de fil en aiguille, on découvre que les banques savaient, depuis au moins 1986/1987, que la rentabilité était nulle, que l’entreprise était structurellement déficitaire, mais … on ne refuse rien a Albert Bach.
Et puis la société a des actifs : silos, matériel…. Tout cela pourtant bien futile par rapport au gouffre creusé en quelques années.
Le négoce tombe brutalement en cessation de paiement , sans payer (comme son nom l’indique) la récolte de plus de 1000 agriculteurs qui donc, n’auront tiré aucun revenu de leur production.
La bataille judiciaire ne se terminera que dans les années 2018/2020 avec la condamnation des banques (près d'une douzaine à l'époque) pour soutien abusif.
La banque de France ainsi que l’ONIC (Office National Interprofessionnels des Céréales) ont également étés vivement critiquées pour le soutient qu’ils auraient apporté à l’époque, notamment sur les stocks d'interventions que les Ets Bach stockaient pour le compte de l'Onic
Albert Bach a été condamné en 1995 pour «escroqueries, abus de biens sociaux, faux bilans et exercice illégal de la profession de banquier. Les juges avaient également prononcé la faillite personnelle de M. Bach, lui retirant ses droits civils,civiques et de famille pour 5 ans»
Oui, ils étaient très colère.
Albert Bach fera une tentative de suicide peu après le dépôt de bilan, mais sera condamné à 5 ans de prison ferme.
La chute de la maison Bach laissera un énorme vide et poussera à la restructuration régionale autour des coopératives de Bourgogne , de Champagne, du @groupesouffllet et d'autres négociants privés
#unpopularopinion : au niveau mondial, l’agriculture vivrière a vocation à disparaître pour laisser place à une agriculture plus productive, qui génère des excédents permettant de nourrir au-delà du producteur.
La population mondiale est de plus en plus urbaine , et de moins en moins rurale .
Il faut donc que le travail de ceux qui sont à la campagne permette de nourrir ceux qui sont en ville, tout en faisant vivre correctement ceux qui sont à la campagne.
L’agriculture vivrière n’est pas un modèle d’avenir : c’est une agriculture de survie qui ne permet pas aux populations de s’extraire de la pauvreté et du risque de famines .
C’est toujours un choix par défaut, et on s’en échappe dès que c’est possible.
Il faudrait selon eux des « communautés autonomes », et il surtout « s’extraire du capitalisme ». Ca peut marcher à la marge : chacun est libre de vivre en totale autonomie sur sa ferme.
Les exemples cités ici sont soit des #ZAD comme a #NDDL, soit des jardins partagés : un des points communs est donc de n’avoir jamais acheté ou loué les terres en question, mais les avoir soit occupés par la force, soit en avoir obtenu la jouissance par une administration.