Féminisme & Rupture Générationnelle

Tiens, je vais profiter de ce tweet de Tristane pour tenter de structurer une pensée qui me turlupine.

Ce n'est que du témoignage et du ressenti, donc aucun intérêt en soi, sauf pour passer le temps au bureau.
Je discutais tantôt de féminisme avec une amie chère et plus récemment avec une féministe beaucoup plus jeune, et j’en suis venu à poser des mots sur le sentiment diffus qui m’habite sur le « nouveau féminisme ».
Si je devais me positionner par rapport au sujet, je me définirais comme un « enfant du féminisme ». J’ai en effet grandi dans les années 80-90, et sans avoir conscience des luttes entre adultes qui se déroulaient pendant que je jouais aux Playmobils, il me semble avoir été...
nourri d’un soft-power féministe qui m’a fait considérer les femmes comme mes alter égos sans avoir à me poser de questions. En outre je grandissais dans un milieu bourgeois urbain où les femmes travaillaient à des postes enviables, "la femme au foyer" étant une figure abstraite.
Thatcher était au pouvoir au UK, Benazir Bhutto au Pakistan, les 2 journalistes politiques vedettes d’une époque à 5 chaines s’appelaient @Ockrent et @anne_sinclair, G.Halimi, F.Giroud et E.Badinter étaient des intellectuelles respectées, Simone Veil déjà une icône,
Arlette Laguiller et Isabelle Adjani coexistaient dans le poste, les finales Graaf/Navratilova égalaient dans leur attrait celles d’Edberg/Becker, Claudie Haigneré décollait pour l’espace, Florence Arthaud se déroutait pour porter secours à Loïc Caradec,
Jeannie Longo était le plus grand sportif français, Catherine Destivelle défiait la haute montagne, MJ Perec fascinait par la grâce de ses performances… et je n’ai eu besoin d’aucune recherche Google pour me souvenir de tous ces noms qui ont accompagné ma construction d’homme.
Et même si à l’époque une femme se dénudait les dimanches après-midi dans l’émission de Collaro, provoquant mes premiers guiliguilis sous le nombril, ça ne provoquait pas chez moi une quelconque rupture cognitive.
Je ne dirais pas que ma perception était « la femme est un homme comme les autres », mais bien que « la femme est un individu comme un autre ». Déjà universaliste à 12 ans dis donc.
En grandissant, avec l’apparition (tardive dans mon cas) du désir qui compliquât un chouia mes relations avec les femmes et avec la prise de conscience progressive des conditions matérielles d’existence objectivement très différentes entre les sexes, je m’intéressais aux écrits
féministes mais un peu à la façon dont on ouvre un livre d’histoire. J’en arrivais à la conclusion que oui, nous étions des individus comme les autres, mais qui n’affrontaient pas les mêmes obstacles. Les luttes, auxquelles je n’ai jamais participé activement ni collectivement,
pour faire tomber ces obstacles me semblaient donc aussi nécessaires que banalement normales et tout à fait souhaitables. Rétrospectivement j’ai donc le sentiment d’avoir été « élevé » par un féminisme de femmes fortes, libres et indépendantes.
« Ne nous libérez pas on s’en charge » n’est pas un slogan dont je me rappelle de l’époque, mais un bon résumé de comment je percevais alors les combats féministes. Alors j’ai tout à fait conscience qu’il ait eu sa part d’effets indésirables pour les femmes,
donnant l’image de la Wonder Woman capable de gérer dans un même élan carrière professionnelle et vie de famille, et mettant sur la gent féminine peut-être autant de nouvelles injonctions que de promesses d’émancipation.
Peut-être que de l’injonction patriarcale séculaire à choisir entre « la mère et la putain », nous passions à l’injonction d’être les deux à la fois, ce qui nécessitait un retour de balancier pour que les femmes puissent enfin être des individus comme les autres.
Il n’en demeure pas moins qu’il y a – pour moi – un vrai choc, une véritable incompréhension au sens premier du terme, avec, en dehors même des combats menés, les termes utilisés par le féminisme moderne, en tout cas celui qui a l’honneur des gazettes de gauche.
Je trouve qu’il me dépeint une femme fragile, à protéger, à préserver, jamais responsable, dont on parle comme on parle d’un enfant et à qui certes on ne doit plus ouvrir la porte, mais tout de même lui céder la place, quand celle-ci est de pouvoir. Une sorte de femme-enfant roi.
Il n’est pas rare de lire dans la même journée et dans le même media un article se lamentant du nombre de femmes au CAC 40 et une autre sur « la charge mentale du dîner de Noël ». Je vous jure que c'est compliqué à réconcilier.
Bref, ce thread n’est pas une critique du nouveau féminisme (qu’il faudrait mettre au pluriel si c’était le cas), et peut-être simplement le signe que je suis dépassé. Mais bon courage pour me déconstruire.
Simplement un témoignage qui n’a aucune autre prétention que de partager un ressenti et à me projeter sur comment les garçons de 10 ans aujourd’hui vont construire leur rapport aux femmes dans les représentations féministes actuelles. Quels enfants du féminisme deviendront-ils ?

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15 Sep
Cet extrait a pas mal tourné, et à mon avis (mais c'est un biais fort chez moi), @rglucks1 fait une erreur sur le "contre-récit" à opposer à Zemmour.

Oui Zemmour est un conteur, c'est sa force. Il raconte une grande histoire dans laquelle la France est une héroïne et a un destin particulier, voire une destinée et qu'il y a un "génie français". Faut pas se voiler la face, c'est séduisant comme discours.
On est naturellement plus enclin à vouloir passer du temps avec qq'un qui nous dit qu'on est beau et intelligent que moche et con. Sauf si t'es journaliste à Regards, mais ça...

Et c'est dur à contrer autrement que par "mais non on est laid !", ce qui ne fonctionne pas bien.
Read 16 tweets
16 Aug
Y a un moment où va falloir accepter que reprendre de volée les néo-antiracistes et leur mettre le nez dans leurs incohérences, ce n'est pas du vulgaire trollage de "nininninnin je te l'avais bien dit".
Ces "erreurs de jugement" (pour être poli) ont des conséquences sérieuses.
Face à l'offensive des droites dures sur le "péril musulman", on peut pas se permettre de défendre l'indéfendable.C'est leur donner raison. La réponse à "en tout musulman sommeille un méchant fondamentaliste" ne peut pas être "en tout fondamentaliste sommeille un gentil musulman"
Cette mouvance a soutenu Bouteldja 2 ans de trop, Dieudonné 2 ans de trop, Ramadan 2 ans de trop et là Sihamedi 2 ans de trop.
Et c'est uniquement quand la dénégation n'est absolument plus possible qu'on consent un "oups, oui mais c'était contre Valls/Darmanin qui sont méchants"
Read 11 tweets
18 Jul
Tiens, je vais m'appuyer sur ce post inepte pour aborder un sujet qui me tient à cœur.
Comme je suis vent debout contre "les accommodements raisonnables" et la laïcité à la Baubérot, je reçois plein de commentaires sympas mais qui fustigent l'islamo-gauchisme, terme que je récuse
...de toutes mes forces.

Pourquoi ? Parce qu'il adjoint 2 concepts flous en un seul pas vraiment plus éclairant. C'est un mot pensé pour désigner l'ennemi sans nuance, ce qui m'intéresse assez peu, et qui selon moi rajoute de la confusion dans un moment qui n'en manque pas.
Le clientélisme électoral actuel de LFI et EELV envers ce qu'ils regroupent sous le terme "musulmans" n'a rien à voir avec la conception protestante de la laïcité de Baubérot. Ca n'a pas de sens de les mettre dans une "même boîte" même s'ils vont saluer Bianco & Cadene par calcul
Read 20 tweets
4 Jun
En parallèle de cette critique de Marylin que je recommande chaudement, il y a un truc qu'Aphatie ne semble pas du tout prendre en compte : il a l'air de penser que c'est lui qui va fixer les limites du "respect" dû aux religions. ⤵️⤵️
Sa position est littéralement inapplicable puisque les accommodements qu’il suggère ne sont liés qu'à sa propre perception de ce qui est important/respectueux et de ce qui ne l'est pas. Or ce n'est pas le non-musulman qui va décider pour les musulmans le licite de l'illicite.
Caricaturer le Prophète, on peut s'en passer, oui, mais la théorie de l'évolution, ça, pas touche par exemple ? Sauf que comment tu justifies que critiquer le Prophète faut pas le faire, mais démontrer que le Coran est bourré de contre-vérités scientifiques serait acceptable ?
Read 8 tweets
3 Jun
Dis @libe, mon petit, je ne voudrais pas te paraître vieux jeu ni encore moins grossier… L'homme du Twitter, parfois rude, reste toujours courtois, mais la vérité m'oblige à te le dire, ton Sylvain commence à me les briser menues ! ⤵️⤵️
C'est une partie de la gauche intellectuelle, médiatique et politique qui a laissé proliférer, voire qui a soutenu en guise de cache-misère de ses échecs dans la lutte contre les pauvretés, des concepts extrêmement clivant comme la déconstruction du genre ...
... et la réhabilitation de la race, ou des théories holistiques très discutables sur "la culture du viol" ou tout ce qui serait "systémique". Cette gauche qui ne trouvant plus de solutions sur l’économie s’est tout entière tournée vers la sociologie.
Read 14 tweets

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