L'analyse #MMT montre que la dette publique n’est pas un problème, jamais. Cette analyse s’applique également aux États-membres de l’Eurozone. Les craintes que la dette publique suscite sont le fruit d’une profonde méconnaissance des mécanismes sous-jacents.1
Avec une devise nationale à taux fixe/convertible, la « base monétaire » n’inclut pas les titres d’État, car il s’agit de créances sur les réserves de l’État (or, devise étrangère, etc.), qui font partie de ce qu’on appelle l' « épargne nationale ». 2
Avec la devise fiat (taux de change flottant/non convertible), les titres d’État (détenus en dehors de l’État) sont des augmentations de la "base monétaire" , car la notion de réduction des réserves de l’État (or, devise étrangère, etc.) est inapplicable à la monnaie fiat. 3
La devise nationale ne peut être créée que par la dépense publique. Elle correspond aux «Actifs Financiers Nets», c’est-à-dire ce que le secteur privé reçoit lorsqu’il bénéficie d’un paiement de l’État, qui n’a pas à être remboursé. 4
La dette publique équivaut à la devise nationale créée par la dépense publique qui n’a pas encore été utilisée par le secteur privé pour payer les impôts. Elle représente le cumul (stock) des déficits publics passés (flux). 5
En d’autres termes, la dette publique correspond à la devise créée par la dépense publique mais que l’État n’a pas encore retirée avec la taxation. Elle représente donc la richesse financière nette des agents du secteur privé. 6
Ainsi, lorsque qu'un Etat cherche à diminuer son déficit en augmentant les taxes et/ou en diminuant sa dépense, l’épargne du secteur privé se réduit. Le fait que l’État retire plus de devise nationale par les taxes qu’il n’en crée par la dépense crée de l’austérité. 7
La dette publique est donc assimilable à tout ce qui représente le passif de l’État : à savoir la somme du cash + les réserves bancaires + les titres d’État. Cette définition rejoint celle des banques centrales, ainsi que celle de la BCE selon le traité de Maastricht. 8
Lorsque l’État émet des titres, il n'y a pas "création monétaire", mais seulement un changement de forme de la devise, de "réserves" à "titres d'Etat", tel un simple transfert d'un compte de dépôt qui ne rapporte pas d'intérêt, à un compte d'épargne, qui, lui, rapporte intérêt. 9
Et, lorsque les titres d’État arrivent à échéance, il n'y a pas un "remboursement", au sens utilisé pour la dette privée, mais un changement inverse de la forme de la devise, de « titres d'Etat» à « réserves », donc sans diminution de la quantité de devise. 10
L’analyse qui précède s’applique également aux États-membres de l’Eurozone, étant précisé que les limites financières qui contraignent ces Etats ne sont pas techniques. Elles sont fondamentalement politiques, donc en réalité auto-imposées. 11
S’agissant d'abord des intérêts sur les titres d'Etat, il est important de bien comprendre que, s’ils augmentent, ce n'est que parce que la BCE décide de les laisser augmenter. Les taux d'intérêt sont complètement sous le contrôle de la BCE. Il s’agit de choix politiques 12
Le Whatever it takes de Draghi en 2012, ainsi que la situation qui prévaut depuis le début de la crise covid sont suffisamment éloquents quant au fait que le niveau des taux d’intérêt est fondamentalement une variable politique. 13
MMT analyse les intérêts non sous l’angle des seuls comptes publics, mais sous celui de l’économie. Sous cet angle, ils sont vus comme participant au déficit public, certes d’une façon socialement régressive, car profitant aux seuls rentiers. 14
Si les intérêts doivent être considérés comme une charge, cela doit être non sous l’angle financier, mais sous celui d’une charge au niveau de la société (justice sociale), car ils ne profitent qu’à ceux qui ont déjà de l’argent. 15
Mais ni le niveau de la dette publique, ni celui des intérêts ne contraint l’espace budgétaire des États. En effet, la BCE peut décider, quand elle le veut, quel que soit le niveau d‘endettement d’un pays, que ce pays puisse continuer à dépenser, ou bien doive faire défaut. 16
Les marchés financiers ne sont à l’œuvre que si la BCE en décide ainsi, les laissant faire. Ainsi, tous les discours selon lesquels la capacité de dépenser des États-membres de l’Eurozone dépendraient de l’humeur des marchés financiers sont infondés. 17
Aucune publication scientifique n'a jamais pu démontrer un lien de causalité entre niveau de dette publique d'un pays dans sa devise et espace budgétaire. Ce n'est qu'une vue de l'esprit, sans aucune base concrète, et/ou l'expression d'une idéologie en faveur de l'austérité. 18
Certains économistes s'y sont essayés, notamment Reinhart et Rogoff, avec le ridicule que l'on sait, en raison d’une erreur dans leur feuille de calcul, découverte par la suite par un doctorant… 19
Il n’y a donc pas de « carcan », ni de « mur ». La dette publique n’est pas synonyme de « cancer », mais de richesse financière nette du secteur privé. L’utilisation de cette sémantique n’est que le reflet d’une profonde méconnaissance du système. 20
Le déficit public et la dette publique ne devraient pas être perçus comme des « maux », car en réalité ils sont les instruments absolument indispensables pour atteindre les objectifs de l’économie réelle, notamment celui du plein emploi. 21
La dette publique n'est pas un problème, jamais, sauf si on décide qu'elle le soit... Et toute tentative de sa réduction, qu’elle soit détenue par les agents privés ou bien par la BCE, est une erreur logique, car on ne détruit pas quelque chose qui ne pose pas problème. 22
Les taux des bons du trésor américain ne dépendent pas du marché, ou de la prétendue solvabilité du gouvernement fédéral des États-Unis, mais essentiellement des taux directeurs de la Fed. Ils sont fondamentalement une variable politique. #MMT
De même, lorsque la Reserve Bank of Australia décide d'un taux directeur, le taux de la dette publique s'aligne sur lui. Il n’y aura en Australie jamais de crise de la dette souveraine, pas plus que dans un autre pays disposant pleinement du monopole d’émission de sa monnaie.
De même au Canada, à chaque fois que le Trésor, ou les banques commerciales veulent réemprunter, la banque centrale complète l’offre et la demande de prêt à son taux directeur, et non selon une quelconque hypothétique spirale de surendettement public.
@EmmanuelPgd@jcs_mbf@france_mmt@InstitRousseau@VeblenInstitute Ecrire «Non, le pouvoir monétaire n’appartient plus aux Etats» c’est ignorer l’évidence du fait que le déficit public a pour contrepartie l’épargne financière nette du secteur privé. Il s’agit d’une simple identité comptable qui se vérifie partout, ici en France aux USA.
@EmmanuelPgd@jcs_mbf@france_mmt@InstitRousseau@VeblenInstitute Tout d’abord je salue tes efforts @EmmanuelPgd pour que les différents courants se rencontrent. Les objectifs sont certainement proches: contrer la pensée néolibérale dominante, lutter contre les politiques d’austérité, pour le plein emploi, éradiquer la pauvreté, etc 1
@IzouletMaxime MMT considère que la comptabilité est absolument fondamentale pour comprendre la «monnaie», comme la statistique l’est pour l’économie. Cependant, elle doit être utilisée et interprétée en prenant en compte les rapports de forces que l’on rencontre au sein du système.1
@IzouletMaxime Pour apprécier la relation entre monnaie et créance, il faut aller au-delà de la seule classification comptable, qui, effectivement, ne les classe pas dans le même type de comptes. L’analyse MMT sur ce point ne remet pas en cause l’importance qu’elle accorde à la comptabilité.2
@IzouletMaxime Fondamentalement, il faut avoir à l’esprit que, contrairement à toutes les autres approches, MMT considère que ni la devise (nationale), ni l’économie, ni le marché ne sont a priori de l’État. Au contraire, ils sont des épiphénomènes de l’État.3
@threadreaderapp@tblrj@AvinoLoredana@RobertoBazzichi@ArthezD@russeurope Merci, @tblrj de ton retour. Nous sommes maintenant au cœur du sujet.
Je te propose de commencer par ce qui me semble le plus important, à savoir la nature de la devise. Au niveau sémantique, ce n’est pas une coquetterie de parler de devise plutôt que de monnaie.1
@threadreaderapp@tblrj@AvinoLoredana@RobertoBazzichi@ArthezD@russeurope Chaque théorie dispose de son propre « jargon », et il me semble très important de le respecter, au risque de ne plus savoir de quoi on parle. Pour MMT, la devise est la « monnaie » créée par l’État, et par lui seul, lorsqu’il dépense.2
@threadreaderapp@tblrj@AvinoLoredana@RobertoBazzichi@ArthezD@russeurope Quant à la nature de la devise, dans la logique MMT, elle est fiscale, et elle débouche sur une vision selon laquelle le marché est d’abord un système généralisé d’échange de devises, avant d’être un système d’échange de biens et de services.3
Thread à l'attention de celles et ceux qui s'intéressent à MMT (Théorie Monétaire Moderne - Modern Monetary Theory)
Pour aller plus loin :
- le blog de MMT France : mmt-france.org
- la page Wikipedia en français de MMT : fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9o… #MMT
1. Tout d’abord une définition : le terme «monnaie» est trop générique. Il signifie à la fois la «monnaie» créée par l’État lorsqu’il dépense et le crédit bancaire. Pour plus de clarté, MMT retient donc le terme « devise » dans le 1er cas et le terme « crédit » dans le second.
2. La théorie monétaire moderne (MMT : Modern monetary theory) est une théorie qui présente un aspect descriptif, ainsi qu'un aspect normatif, fournissant des instruments de politiques économiques, notamment pour le plein emploi et la stabilité des prix.
1. Tout d’abord une définition : le terme «monnaie» est trop générique. Il signifie à la fois la «monnaie» créée par l’État lorsqu’il dépense et le crédit bancaire. Pour plus de clarté, MMT retient donc le terme « devise » dans le 1er cas et le terme « crédit » dans le second.
2. La théorie monétaire moderne (MMT : Modern monetary theory) est une théorie qui présente un aspect descriptif, ainsi qu'un aspect normatif, fournissant des instruments de politiques économiques, notamment pour le plein emploi et la stabilité des prix.