Thread by @Ngamvit

Je crois que je l’avais déjà raconté ici. C’est une histoire que j’ai vécue avec un de mes cousins dans un car de transport entre Douala et Yaoundé. Cela m’amuse souvent car cela fait penser aux préjugés qu’on a devant une personne en fonction des présupposés nourris. #thread

Je suis en vacances au pays et je fais généralement en peu de temps une boucle passant par trois coins du triangle National: Douala-Yaounde-Tokombere. A Douala, je vais prendre un bus pour Yaounde, puis train vers N’Dere (avion pour Maroua) ainsi de suite.

A l’agence de Douala, je tombe sur une Une de Dikalo parlant de l’âge de ceux qui nous gouvernent. Je récupère le journal et je monte à bord. Quand on sort de la ville, je commence à taper les commentaires dessus avec mon cousin. On s’offusque de ce que le pays n’est pas normal.

On pointe l’âge des Obama, Cameron, Kabila, Sankara etc pour dire que nous aussi on peut. Que nous aussi on peut gérer comme les Popaul qui étaient cadre à la présidence à 20 ans et tout.

Voilà alors qu’un monsieur assis devant nous se retourne, ajuste sa cravate achetée devant la SNI et nous dit sur un ton doctoral: vous mêmes là, vous parlez trop que vous avez déjà fait quoi? Vous croyez que le pays ci fonctionne comment? Attendez votre tour

Je lui demande sur un ton blagueur de me montrer où on prend le ticket et je vais chercher. Son collègue commence alors à rire en disant que je suis un mbenguiste, que ohh on lave les cadavres, on vit dans un 6m2 à dix, etc. Que nous sommes des sans papiers, bref vous avez.

J’essaie de leur expliquer que le pays se fourvoie en écartant une bonne partie de la jeunesse quand il ne met pas sur pied un système meritocrate. Le gars lap encore en me parlant de théories, et tjrs en me parlant du fait que nous les mbenguistes sommes inutiles.

Que lui il est prof dans les univ en Afrique, il est cadre depuis 20 ans au ministère des finances, que moi je vaut quoi? Que c’est la mbeng, toussa toussa. Je ne sais pas, mais j’ai gardé étonnement mon clame.

On arrive à Boumnyebel sur un contrôle de police. On descend, fait la queue et un des gendarmes parle avec moi quelques minutes. Les gens étaient déjà dans le bus et ça a attiré l’attention. Quand je remonte, les gars recommencent à me cosh que ohhh je n’ai pas de CNI...

Que ohhh je suis un braqueur, que ohhhbref. Or, le policier avait vu mon passeport et reconnu ma fonction. Puis m’a dit qu’il a travaillé en CI, Haïti et devrait retourner dans le pays où le me trouvais à l’époque. Je lui ai remis ma carte de me contacter quand il arrive.

Le policier revient donner le dossier du chauffeur et me encore que chef, je vais vous contacter sans faute. Et puis il lance à son collègue que tu vois comme ça là, le gars ci est un boss dans les Nations unies comme ça là.

Cette découverte a changé la conversation avec les autres. Que ohh c’est dur d’entrer là-bas, on fait comment? Qui a le réseau? C’est la secte il parait. Depuis qu’il postule, on ne l’appelle jamais. Que vraiment il faut que je lui dise.

Je lui ai dit que en fait c’est la compétence. Qu’il continue de postuler, peut être ça va marcher. On pourrait en discuter et tout. Je lui donne ma carte et il voit mon poste et tout.

Il me tend aussi sa carte avec le drapeau du Cameroun dessus, et son titre bien écrit. J’étais content et on continue la route. On arrive à Yaoundé, sa Mercedes vient le chercher et il me retrouve deux minutes plus tard au carrefour en train de héler un taxi.

Il me propose de me déposer, mais je refuse poliment, à vrai dire à contre cœur car les embouteillages de Mvan et la chaleur voulaient ma mort.
Bref, c’était intéressant de voir comment la perception change du tout au tout.