Thread by @LarrereMathilde

Le 23 février 1848 au matin, Paris se réveille érigé de barricades !
L’atmosphère est presque joyeuse. un peu tendue juste...

Mais pourquoi? vous demandez vous peut-être.

Laissez moi vous raconter la merveilleuse révolution de février 1848

1)Tout commence peu avant par un banquet interdit dans le 12e arrondissement (ancien arrondissements avant 1860) et une manifestation illégale…. Depuis plusieurs x mois un vaste mouvement réclamait la «réforme électorale »

2)Il faut savoir que dans la France de la Monarchie de Juillet il fallait payer 200 f d’impôt pour avoir accès aux urnes. 6% des hommes en âge de voter
c'est peu...
Les revendications démocratiques sont puissantes mais se heurtent au mur du conservatisme du régime orléaniste

3)Depuis 1847, une campagne des banquets réclame le suffrage universel. Des banquets car ils échappent à l’interdiction de rassemblement alors en vigueur, vu qu’il s’agit d’assemblées privées, dans des lieux privés

4)Donc les opposants se réunissent dans des salles, portent des toasts à la souveraineté du peuple, au suffrage universel et les journaux en rendent compte. les autorités surveillent ça de près mais laissent faire

5)Mais autant pisser dans un violon, le ministère Guizot n’a pas la moindre intention d’ouvrir les urnes…

6)Le tout dans un contexte de crise économique larvée, une crise agricole à prolongement industriel…
vous ajoutez à cela qq scandales politiques…. (pas de sexe tape mais quasi)
Et vous avez une situation bien gentiment explosive !

7)Or voilà que l’opposition démocratique veut organiser un banquet en plein Paris ! Dans la ville des Révolutions !
Alors ça, non, pas possible pour le gouvernement. Interdiction du banquet !

8)Ah mais non! cela ne va pas se passer comme ça!
L’opposition décide de maintenir le banquet (mais l’organise dans une plus petite salle et un arrondissement plus bourgeois)
(la médaille ci dessous fait référence au banquet interdit, dans le 12e arrondissement)

9)Aussi, le 22 février 1848, la foule s’assemble sur le lieu du banquet et commence à chanter…. La Marseillaise (alors interdite donc subversive!)

10)Le pouvoir mobilise les forces de l’ordre. Notamment la garde nationale qui ne répond pas à l’appel…
Elle était, il faut dire, très engagée dans le mouvement des banquets, d’autant que de nombreux gardes n’avaient pas le droit de vote
Certains gardes manifestaient même

11)Dans l’hémicycle les députés de l’opposition protestent contre l’atteinte au droit de réunion des citoyens

11)La manifestation (on ne donne pas ce nom à l'époque) se déploie donc dans Paris pour se rendre vers le lieu du banquet au cri de Vive la Réforme (électorale, soit le suffrage universel), A bas Guizot !

13)
En fin d’après midi, les premières barricades sont érigées rue Saint Florentin, Duphot, Saint Honoré. QQ casernes sont attaquées...
Rien de bien méchant encore

L'insurrection gronde, mais doucement

13)L’ordre semble d'ailleurs plus ou moins rétabli à la tombée de la nuit

« Les ouvriers sont rentrés chez eux. Après un pareil tumulte, un calme si morne a quelque chose d’effrayant » rapporte Daniel Stern.

(apparté : Daniel Stern, de son vrai nom Marie d’Agoult est donc une femme, mais comme George Sand elle écrivait ss un pseudo masculin. Elle a laissé un récit tout à fait intéressant de ces journées)

14) Le 23 fev donc, comme je vous le disais au début, après une nuit calme, des rassemblements se reforment. Des barricades se lèvent.
Les soldats n’ont pas d’ordres. Ils discutent avec les ouvriers. Tout le monde semble attendre.

15)Plusieurs incidents dans la ville.
Souvent la garde nationale s’interpose, empêche les soldats de détruire une barricade
Inquiet, le roi renvoie son ministre Guizot et demande à Molé, plus proche de l’opposition (mais monarchiste libéral) de former un nouveau gouvernement.

16) Au soir du 23, la foule célèbre le renvoi de Guizot.
Des lampions sont allumés.
Des cortèges, joyeux, déterminés, se forment.
« Rien n’annonçait que cette nuit qui commençait dans les splendeurs d’une illumination fut la dernière de la monarchie » Lamartine

17)Car à 21 h 30 ....
Le Cortège se déploie sur les boulevards, acclame les chefs de l’opposition, les directeurs des journaux républicains.
La colonne populaire arrive boulevard des Capucines
Soudain, un coup de fusil éclate

Suivi d’une série de détonations

18)C'est le massacre du boulevard des Capucines

La troupe vient de tirer sans sommation sur une foule pacifique. Des dizaines de personnes tombent sous les coups.

19) Les victimes de la fusillade des Capucines sont promenées aux flambeaux dans la ville.

« Vengeance ! Aux Armes ! Aux barricades ! »

20) Le gouvernement confie le maintien de l’ordre au général Bugeaud.
Le massacreur de la rue Transnonain.
Le « pacificateur » de l’Algérie
Le responsable des enfumades
(celui à qui Zemmour rendait hommage il y a peu ...)

21)Mauvaise idée ! voilà qui soulève la colère des Parisiens et des Parisiennes !
Toute la nuit, les gens entassent chaises, tonneaux, pavé, becs à gaz pour ériger des barricades.
Scient les arbres pour consolider les édifices défensifs
La révolution se dresse...

Que va-t-il se passer?
Le roi va-t-il envoyer ses troupes?

vous le saurez.....

demain
(et oui)

vous voulez la suite?

22) Le 24 février au matin, Les insurgés contrôlent presque tous les points stratégiques du centre ville.
Des centaines de barricades obstruent les rues. Des tessons de bouteilles sont disposés pour freiner l’artillerie.

23)Des arbres ont été abattus.
Bureaux d’octroi, guérites sont renversés.
Des hommes pénètrent dans les églises, y sonnent le tocsin
Partout on coule du plomb, on roule des cartouches.
Les combats commencent en différents points de la ville

24)La garde nationale ne rejoint pas la répression, mais pas l’insurrection non plus. L’armée hésite. Seule la garde municipale réprime.
« Crosse en l’air ! Crosse en l’air ! La paix ! » crient les émeutiers aux forces de l’ordre.

25)Le roi tente une nouvelle solution ministérielle avec un gouvernement Thiers- Barrot (à nouveau des monarchistes libéraux) (trop tard coco ! le sang a coulé)

26) A Midi, voyant que son nouveau ministère ne désarme pas la rue, le roi décrète la dissolution de la Chambre.
Mais le peuple est alors maitre de l’Hôtel de Ville et du Palais Royal et se dirige vers le Château des Tuileries.

27)Devant l’avancée de la foule révolutionnaire, Louis Philippe fuit, abdique, laissant le trône à son petit fils de dix ans et la régence à sa bru, la duchesse d’Orléans.

28) Pendant ce temps, le peuple prend les Tuileries

Un cri enthousiaste retentit pour la 1er fois: Vive la république !

29)
Les Tuileries sont mises à sac. La fête populaire se déploie dans les appartements royaux ! Le décor du pouvoir est brisé.
Seuls les symboles religieux sont préservés de l’iconoclasme

30) Le peuple s’empare du trône, le porte en cortège place de la Bastille…Et l’y brule ! (ça, c’est fait !)

30) Le peuple s’empare du trône, le porte en cortège place de la Bastille…Et l’y brule ! (ça, c’est fait !)

31)Pendant ce temps la duchesse d’Orléans tente non sans un certain courage d’imposer sa régence.
Son enfant à la main elle se rend au palais Bourbon.

32)Loupé. Les députés rejettent la solution de la régence et font sortir la duchesse. Ils discutent du gouvernement provisoire.

33) Durant l’après midi, les députés peinent à se mettre d’accord sur un Gouv prov.

Le peuple massé devant l’Assemblée réclame à grands cris la République et des ouvriers au gouvernement !

34) à 22 h, sous la pression de la foule, le Gouv provisoire est proclamé. Il mêle des républicains modérés comme Marie à des plus radicaux comme Ledru Rollin
mais surtout deux socialistes y sont présents : Louis Blanc, l’auteur de l’Organisation du travail, et l’ouvrier Albert

35) C’est une grande victoire pour le peuple parisien ! A la différence de 1830, il a réussi à imposer un Gouv provisoire.
Au soir du 24 la 1ère proclamation du GP est affichée dans Paris : on y dit vouloir la forme républicaine, « sauf ratification contraire du peuple ».

36) Bien que content de la proclamation de la République le peuple veille. Il n’entend pas se faire voler sa révolution qu’il veut sociale. Il se souvient de 1830 et sa révolution confisquée.

Les barricades sont consolidées dans la nuit du 24 au 25

Le peuple va-t-il se faire voler sa révolution par la bourgeoisie libérale???

vous le saurez au prochain épisode

demain

37) Le 25 février 1848 au matin, Les mots d’ordre du peuple sont de plus en plus précis. « Droit au travail » « vraie république » « droit à l’association »
Des groupes demandent la proclamation de la RÉPUBLIQUE SOCIALE Ils arborent le drapeau rouge

38) Dans la matinée est affiché dans Paris un décret de Louis Blanc qui instaure le droit au travail sans le nommer
et reconnaît le droit d’association (ce qui était une revendication essentielle des ouvriers ! la mort de la loi Le Chapelier)

39)C’est une énorme victoire pour le peuple parisien ! Il cherche alors à imposer que la nouvelle république adopte le drapeau rouge, drapeau de la république sociale, le tricolore étant associé à la monarchie libérale
(détail de la toile de Philippoteaux)

40) Mais Lamartine s’adresse au peuple place de l’Hôtel de ville et parvient à le convaincre d’abandonner le drapeau rouge….
Après la victoire du décret de Louis Blanc, le rejet du drapeau est la 1ère défaite de la Sociale….

41)« Le peuple savait bien, et Lamartine aussi, qu’à une société nouvelle il faut un drapeau nouveau », note, amer, Louis Ménard, Prologue d’une révolution.

42) Néanmoins confiants après la proclamation de Louis Blanc, les Parisiens démontent les barricades dans la soirée du 25.

43)Dans les jours suivants, alors que le Gouv prov se met au travail, clubs et sociétés fleurissent dans le Paris post révolutionnaire. hommes, femmes, fondent des clubs, débattent, rêvent un monde meilleur
(c'étaient des jetons de présence aux clubs)

44)Bientôt le Suffrage universel masculin (😡) est proclamé,

45)Une commission des travailleurs puis des travailleuses est réunie dans le Palais du Luxembourg. Elle arrache la réduction de la journée de travail, la fin du marchandage et entame un vaste travail de réflexion sur le travail

46)suivi de l’abolition de l’esclavage, immédiate (qd certains l'auraient voulue graduelle) mais... avec indemnisation des planteurs et sans aucune aide pour les anciens esclaves (😡)

47) ainsi quel’abolition de la peine de mort en matière politique…

48) L’annonce de l’élection d’une assemblée nationale constituante et la création d’ateliers nationaux pour donner du travail (décevants au regard des projets socialistes d'ateliers sociaux, m'enfin...)

49)L’atmosphère est à la liesse. Même l’Église est de la partie : les curés de Paris bénissent les arbres de la liberté !

50)Bientôt, les nouvelles de la révolution à Paris éveillent à Vienne, Berlin, Rome, Buda, Venise le Printemps des Peuple !
on parle de "Printemps des peuples"

51)La suite sera plus triste mais je la raconterai plus tard…

Un peu de biblio….

voila, c'est fini
j'espère que ça vous a plu

la révolution de février 1848 est une belle et grande révolution, injustement oubliée