Jadis, pour éponger une montagne de dettes, les gouvernants avaient recours à:
- l'augmentation des impôts
- la manipulation sur la monnaie
- le défaut de paiement
- une flambée de violence ou la guerre contre les créanciers
Aujourd'hui, nous vivons une situation inédite !
Thread
La crise de 2008 est venue sanctionner une économie qui ne carbure que par l'excès de dettes.
Lorsque le monde fictif de la finance dérive trop de la réalité économique, les crises permettent de remettre les compteurs à 0. Le prix à payer est cher : crise économique et sociale.
Mais au lieu de revoir notre modèle économique, ce qui demande de la vision et du courage politique, les dirigeants qui n'avaient rien anticipé, ont décidé d'agir dans l'urgence. Leur solution fut de sauver le système qui nous avait foutu dans la mouise, à savoir la finance.
Les dirigeants politiques se sont sentis pris en otage par le "too big to fail" (trop gros pour faire faillite). S'ils laissaient les banques faire faillite, alors les conséquences auraient été ponctuellement désastreuses pour l'économie, mais surtout pour l'équilibre social.
Qu'ont fait les États ? Ils ont sauvé nos bourreaux, les cupides de la finance. Comment ? En s'endettant. C'est un comble ! Face à une montagne de dettes qui nous a mené à la crise, les États ont répondu par encore plus de dettes.
Ce sauvetage a affaibli financièrement les États.
Une fois sauvés et remise sur pied, qu'ont fait les acteurs de la finance ? Ils ont attaqué financièrement sur le marché de la dette les États devenus vulnérables. C'est ce qu'on appelle la crise de la dette souveraine. Une étrange manière pour la finance de montrer sa gratitude.
Pour calmer ces attaques de la finance sur les États, le Président de la #BCE de l'époque, Mario Draghi, un ex de Goldman Sachs, a menacé les gens de la finance qui attaquaient les États sur le marché de la dette 😏. C'est le fameux "whatever it takes" (quoiqu'il en coûte).
Quelle fut donc cette menace de la BCE ? Créer de la monnaie à partir de rien pour acheter de la dette publique et des multinationales, et faciliter ainsi l'endettement. Un comble encore une fois ! Pour répondre à un problème de dettes immenses, la BCE répond par plus de dettes.
Alors que jadis la manipulation monétaire servait à réduire les dettes, aujourd'hui la politique monétaire de la BCE permet de l'augmenter. Comment est-on arriver à penser que pour réduire la cause de nos problèmes, notre solution fut de l'amplifier. L'histoire rira de nous !
Comble des combles, cette politique monétaire présentée comme une riposte de la #BCE aux attaques de la finance contre les États, a surtout permis une bulle des actifs financiers : jamais dans l'histoire les riches ne se sont enrichis aussi vite. Il y a pire comme sanction 😅
Rendez-vous compte de la séquence incroyable :
1/ la finance cupide se gave jusqu'en 2008 provoquant une énorme crise
2/ les États se mettent en danger pour la sauver, plongeant leurs citoyens dans l'austérité
3/ la finance attaque ses sauveurs devenus vulnérables
4/ la BCE promet d'agir contre les attaques de la finance ingrate
5/l'action de la BCE présentée comme une riposte sanglante contre les spéculateurs de la finance crée une hausse des bourses sans précédent, gonflant ainsi le patrimoine de ceux qui sont riches financièrement !
On dirait la séquence d'un cauchemar. Pourtant nous vivons bien les conséquences de toutes ces décisions prises dans l'urgence, par des dirigeants qui ont cherché à tout prix à sauver les responsables de nos malheurs !
Nous agissons sans vision, sans prendre le temps de prendre de la hauteur pour se rendre compte qu'une société qui abuse de la dette ne fait qu'accelérer le temps, et finit toujours par se prendre les pieds dans le tapis. Un tapis roulant dont personne ne maîtrise la cadence !
La réponse des dirigeants politiques et monétaires a été une réponse lâche, indigne. Elle consiste à fuir ses responsabilités, à éviter de se confronter au réel. La création monétaire qui permet toujours plus de dettes ne fait que repousser l'échéance de la pénitence économique.
C'est une politique de la fuite en avant, celle de repousser à plus tard les problèmes, à passer aux générations futures les conséquences de notre médiocrité. Les vertueux cherchent le bonheur de leur enfants, nous les ferons hérités de problèmes, fruits de nos inconséquences.
Non seulement l'action des dirigeants est injuste pour les générations futures, mais elle est aussi le comble de l'injustice vécue au présent : les cupides de la finance sont sauvés, ils nous attaquent, nous les enrichissons toujours plus, et nous devons payer par de l'austérité.
En résumé, non seulement nous abusons de la création monétaire, mais en plus, au lieu de réduire l'endettement de la société, nous l'augmentons. Jadis, la création monétaire générait de l'inflation des produits et services, aujourd'hui elle gonfle la richesse des plus riches.
Cela exacerbe injustement les inégalités de richesse. Mais surtout cela met en danger la paix sociale et la démocratie, car l'augmentation de la richesse des milliardaires se traduit par une augmentation de leur pouvoir médiatique et politique.
La situation que nous vivons est inédite et dangereuse. Keynes l'a très bien analysée:
"Il n'y a pas de moyen plus subtil et plus sûr de bouleverser la base actuelle de la société que de corrompre la circulation monétaire."
Malheureusement peu de gens comprennent ce qui se trame.

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23 Dec
Un économiste français qui travaille pour un gestionnaire de fond suisse milite contre l'annulation de la dette publique détenue par la #BCE.
Son seul argument est la baisse du taux d'intérêts.
Il feint de ne pas comprendre que la dette publique est une épée de Damoclès sur nous.
La dette est "une camisole de force sociale" selon Nietzsche. Selon Keynes, un illustre économiste du XXème siècle, la corruption de la circulation monétaire est le meilleur moyen de bouleverser les fondements d'une société. Mais seul "un homme sur un million peut le prévoir".
Cet économiste élevé au cartésianisme à la française ne comprend rien au caractère philosophique et politique de la dette. C'est sûrement un bon mathématicien attaché aux chiffres, mais un médiocre économiste selon la définition de Keynes.
Read 4 tweets
22 Dec
Excellent article de @0Vinz sur @LeMondeModerne_
Face à un scénario de faillites en cascade d'entreprises, l'UE autorise les banques à dissimuler dans des produits financiers leurs "mauvais crédits", avant de les refourguer à des investisseurs privés.
#BCE
lemondemoderne.media/cest-noel-pour…
"On ne se débarrasse pas vraiment des créances douteuses et de leurs risques, on le transfère à d’autres. En l’occurrence, en dehors du système bancaire, donc vers les assets managers et le shadow banking … qui sont moins régulés … Mais cela ne rend pas la chose moins risquée."
"Il s’agit surtout de mettre la poussière sous le tapis – loin des yeux loin du cœur. C’est l’occasion aussi de déréguler un peu le marché pendant que les gens regardent ailleurs. C’est potentiellement faire le lit d’une crise financière prochaine."
Read 5 tweets
21 Dec
Au lieu de proposer d'annuler la #dette publique française que nous devons à la Banque de France qui est détenue par l'État à 100%, @bayrou préfère l'idée de rejeter la dette sur les générations futures.
La dette est une épée Damoclès qui permet de dominer l'État et les citoyens.
Les décideurs politiques cèdent aux pressions des banques et de la finance, du gouverneur de la Banque de France, des économistes usuraires : la dette doit être gravée au plus profond de notre mémoire, au fer rouge.
Cette culpabilité imposée au Français est un moyen de contrôle !
Pourtant 20% de la dette publique, qui correspond à peu près à la dette détenue par la Banque de France, est une dette entre nous (État) et nous-mêmes (Banque de France, société détenue à 100% par l'État).
Pourquoi nous infliger alors cette culpabilité de la dette ?
Read 4 tweets
20 Dec
En temps normal, les taux d'intérêts élevés peuvent avoir pour cause :
- une rareté du capital
- une perspective de croissance élevée
- un risque de défaut élevé
- un décision de la banque centrale pour contrer l'inflation (-> rendre le capital plus rare en élevant son loyer)
De nos jours, les taux d'intérêts sont bas à cause de l'abondance de capital par la création monétaire :
- depuis le milieu des années 90 jusqu'en 2008 du fait de la création monétaire par le crédit immobilier
- depuis 2010 à cause des banques centrales.
En aucun cas les taux d'intérêts sont bas du fait d'un monde plus sûr. N'écoutez pas les mensonges qui nous présentent un tableau trompeur de la situation économique actuelle.
Read 5 tweets
20 Dec
*Thread*
La philosophie nécessite la sagesse de s'élever au-dessus de sa personne, de son ego, pour atteindre la conscience des choses.
Être philosophe n'est pas un titre, c'est un état d'esprit. Tout le monde peut l'être.
Étudier la philosophie ne fait pas de vous un philosophe.
La réponse de @picharbonnier est symptomatique de notre époque. Les "experts" n'acceptent pas de revenir à des concepts basics, à re-visiter "les classiques de leur domaine", à sortir du tourbillon de leurs connaissances. En somme à se remettre humblement en question.
Après des années de trading sur les produits dérivés, les produits les plus techniques en finance, je suis devenu maître dans mon domaine. Mais à ma "retraite", j'ai pris le temps d'une introspection professionnelle et tout mon monde et mes connaissances se sont effondrés.
Read 11 tweets
15 Dec
Thread
Deux nouvelles contradictoires sur les banques :
1/Le régulateur bancaire européen appelle les banques à se préparer au pire pour 2021
2/la #BCE pourrait autoriser les banques à verser des dividendes à leurs actionnaires.
Rappelons que jusqu'en 2009, dans le capitalisme ancien, celui où les banques centrales respectaient plus ou moins le libre marché, les actionnaires devaient renflouer les banques en périodes de crise.
Les actionnaires étaient sollicités lors d'augmentations de capital.
Bien entendu, le dividende était fortement réduit dans ces périodes, avec une incitation à le percevoir sous forme d'actions : il aurait été contradictoire de demander une aide financière aux actionnaires, pour ensuite leur rendre cet effort sous forme de dividende en cash.
Read 7 tweets

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