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1/ Tu es Claire. Edgar, ton fils de 17 ans, te laisse en ce vendredi soir il va un concert de rock avec deux de ses potes au Bataclan
Tu es tranquille en train de bouquiner et de profiter de ta solitude à la maison mais ton portable n’arrête pas de vibrer
« Ça va ? » « Tu es à l’abri avec Edgar ? » les textos se suivent, tu ne comprends pas et puis tu allumes la TV.
Sur BFM le bandeau indique « Attaque en cours au Bataclan », tu comprends. Tu appelles Edgar 1 fois, 2 fois, 10 fois, 100 fois, rien.
Tu vacilles, tu as le numéro d’un de ces deux potes : tu l’appelles. Il est vivant mais non, il ne sait pas pour Edgar.
Ils étaient dans la fosse près de la régie. Dès les premiers tirs, ils se sont perdus de vue tous les trois.
Lui a couru sans se retourner, comment lui en vouloir ?
Tu appelles la Police, ça ne répond pas et puis quand ça répond on ne peut rien te dire. On note le nom et la description d’Edgar c’est tout
L’heure passe, l’assaut est terminé au Bataclan depuis déjà de longues minutes et toujours pas de nouvelles…
Des amis d’Edgar postent sa photo sur les réseaux sociaux. Des inconnus commentent mais ne savent rien au final.
Tu appelles les hôpitaux, ils n’ont pas de Edgar chez eux mais il y a tellement de blessés qui arrivent, ils ne savent pas.
Tu leur décris Edgar, ses vêtements, sa taille, ses signes distinctifs bref, tout ce qui pourrait permettre de le reconnaître.
Tes proches commencent à te rejoindre à l‘appartement. Ton téléphone sonne sans discontinuer mais ce n‘est jamais LE numéro que tu attends.
Au petit matin, on te parle d’un numéro vert, tu l’appelles machinalement tu répètes la même description.
Tu commences à imaginer le pire, tu imagines la vie sans lui, la vie qu’il aurait pu avoir. Chaque coup de téléphone te fait frémir.
Puis vers 12h30, un appel, c’est la Pitié-Salpêtrière, la description d’Edgar correspond à un blessé. Tu fonces.
C’est bien lui, il est en réa, il a été opéré dans la nuit avec trois balles de Kalach dans le corps qui ont fait des sacrés dégâts.
Ta vie change du jour au lendemain, tu arrêtes tout pour t’occuper de lui.
Tu passes tes journées à l‘hôpital, puis tu l’accompagnes pour ses rdv médicaux, chez le psy, pour aller voir son avocat etc.
Les indemnisations du fonds de garantie seront pour lui, toi tu n’as droit à rien.
On t’a parlé de ce préjudice d’attente et d’inquiétude, c’est ce que tu as vécu, cette souffrance que tu as ressenti avant de revoir Edgar
Oui mais tu n’y as pas le droit, il aurait fallu qu’Edgar décède ce soir là pour que tu puisses en bénéficier.
Estomaquée tu finis par demander « Pourquoi ? », On ne te répond pas clairement, à vrai dire on ne sait pas bien…
Pourtant cette nuit, ce que tu as imaginé ce soir-là, cette douleur ne te quitte pas. Tu n’en dors plus.
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