, 32 tweets, 7 min read
My Authors
Read all threads
L'ENTRETIEN PSY OBLIGATOIRE AVANT LA CHIRURGIE BARIATRIQUE (= de l'obésité) : Quand une personne décide d'avoir recours à la chirurgie bariatrique, elle doit suivre un parcours de soin établi et rencontrer plusieurs spécialistes. Parmi eux, il y a un rdv obligatoire avec un psy⬇️
Je ne vais pas ici juger de la pertinence de ces opérations. Certain.e.s y sont fortement encouragé.e.s pour des raisons de santé, d'autres y ont recours parce ne supportant plus leur surpoids. Ces opérations (il existe différents types : l'anneau, le by pass et la sleeve) sont
envisagées qd l'IMC est > à 40 ou à 35 avec de gros pb de santé associés (comorbidités), elles sont prévues comme des solutions de dernier recours (après échec d'autres méthodes non invasives et moins risquées). Ds le parcours de soin, il y a un entretien obligatoire avec un psy
POURQUOI ?
La haute autorité de santé émet des recommandations, vous pouvez trouver tout le dossier officiel ici : has-sante.fr/jcms/c_765529/…, elle demande au psy d'évaluer les facteurs de risque. C'est à dire, à la fois les conséquences que pourraient avoir une diminution de la
nourriture absorbée et du poids sur le psychisme de la personne, mais aussi les facteurs psy qui pourraient conduire à un échec de la procédure. Elle demande également d'évaluer si la personne est en capacité de donner un consentement éclairé et si elle ne subit pas de pression
L'ENTRETIEN PSY EST-IL VRAIMENT NECESSAIRE ?
Je pratique ces entretiens et je pense que, s'ils sont réalisés humainement et consciencieusement, ils sont nécessaires et peuvent sauver des vies. Des études ont mis en évidence qu'un patient opéré augmentait son risque de suicide de
50% (sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-… ou sfdiabete.org/sites/www.sfdi…). Et la façon de diminuer ce risque est de : 1. bien orienter les gens avant l'opération et 2. bien les accompagner après.

DEVELOPPONS :
Les causes de prise de poids sont multiples. Contrairement à l'image grossophobe,
il ne s'agit pas de personnes fainéantes qui n'ont aucune volonté. On peut grossir parce qu'on a une prédisposition génétique, un métabolisme qui facilite la prise de poids. On peut grossir à cause de médicaments qu'on n'a pas le choix de prendre. On peut grossir à cause du
stress sans parfois manger beaucoup, on peut grossir parce qu'on a des troubles alimentaires ou une dépression, on peut grossir comme réaction traumatique après une agression, etc. J'ajoute ici qu'on peut être en surpoids et bien le vivre, qu'une personne peut ne pas désirer
maigrir, même si un médecin pense que cela menace sa santé. Cette décision appartient à la personne concernée, c'est son corps. Nous ne parlons ici que des personnes qui décident d'elles-mêmes, pour des raisons qui leur appartiennent, d'avoir recours à la chirurgie. Donc
on récapitule : on ne sait pas pourquoi qqun est en surpoids (et on n'a pas à le savoir à moins que ce soit la personne qui en parle d'elle-même) et on ne sait pas comment il/elle le vit (donc on évite de projeter comment on le vivrait soi avec ses normes et ses représentations)
Mais une personne qui décide d'avoir recours à ces opérations va faire face à des conséquences extrêmement difficiles donc il faut s'assurer qu'elle puisse y faire face.
1.S'assurer que la personne ne vient pas pour faire plaisir à quelqu'un, parce qu'elle est victime de pression
2.S'assurer qu' il/elle est bien informé.e des étapes (douleurs, temps où ne pourra manger que liquide, repas où assis.e avec les autres on ne pourra manger qu'une entrée, etc.)
3.Comprendre les conséquences que cela peut avoir : si la personne a construit son identité autour de
ce corps. Que se passera-t-il après la perte de poids ? Et si la pers. découvre qu'on s'intéresse + à elle ? Est-ce que cela veut dire que les gens n'aiment que son physique ? L'auraient-ils regardé.e avant ? Est-ce sincère ? Comment faire confiance ? Et si ce corps a grossi
après une agression sexuelle ? La personne a-t-elle fait tout le travail nécessaire pour faire le deuil de cette protection qu'elle avait mise en place ? Est-ce que ça va faire ressortir des choses insoutenables ? Et si manger est sa manière de gérer les émotions ? Comment va-t
elle faire après ? Si elle n'avait que ce moyen et n'a pas appris à en parler, que fera-t-elle de ses émotions ? Il y a alors un risque de compenser par autre chose (alcool, mutilation, drogue) si on n'offre pas à côté un espace de parole. Et si une fois amaigrie la personne ne
se reconnait plus ? Que l'image dans le miroir ne colle pas à comment elle se sent ? Si finalement ça la déprime de ne pas se réjouir autant qu'elle le souhaitait ? Et si son entourage n'arrive pas à s'adapter ? Bref, c'est un bouleversement inouï et brutal car la perte de poids
est souvent rapide ds les cas d'opération. Voilà ce que le psy explore dans ces entretiens. Il évalue les risques : ces fameux 50% de risques suicidaires ou de dépression en +. Et surtout, si cela se passe bien, il ouvre un espace qui peut être réactivé si la personne se sent mal
après l'opération. Elle saura vers qui se tourner.

COMMENT SE PASSE L'ENTRETIEN ?
La HAS demande un certain nombre de choses au psy (vous trouverez le détail complet page 12 du pdf has-sante.fr/upload/docs/ap…) mais les psy sont libres de procéder un peu comme ils le souhaitent.
Mon conseil : évitez les psy qui prétendent faire cela en un entretien de 30 minutes même si les prix peuvent défier toute concurrence (et ce n'est pas tjrs le cas, certains en profitent pour monter les tarifs sachant que c'est obligatoire). Voici comment je procède (c'est un
exemple mais ça vous donne une idée d'un processus complet) :
Un rdv d'1h15 avec la personne où on parle un peu de son histoire, de son rapport à son corps, du poids, de ce qu'elle imagine après, etc.
Un rdv de 20 min juste après où un membre clé de l'entourage nous rejoint
(ça peut être un conjoint, parent ou ami : c'est la personne qui décide). Ce n'est pas obligatoire, évidemment, mais ça permet de vérifier le soutien reçu, les pressions éventuelles et d'expliquer de quoi la personne opérée aura besoin et comment la soutenir.
Un temps de réponse
aux questions. Puis un délai pendant lequel je rédige un compte rendu détaillé et où je peux être amenée à faire passer des tests complémentaires par internet à la personne (si j'ai un doute sur le risque de dépression, si je veux lui donner une représentation concrète et
visuelle d'une problématique, etc.)
Enfin, un 2e rdv où je lis en détails avec la personne le compte rendu, en m'arrêtant pour discuter les termes techniques ou les hypothèses. Durant ce rdv, je demande aussi s'il y a de nouvelles questions, des réflexions qui se sont faites, etc
Je remets à la personne une feuille récapitulative avec des ressources (association, grpe de parole, livre, vidéo, texte officiel)+ une feuille personnalisée avec les signes à surveiller qui pourraient être des drapeaux rouges en fonction de son histoire et de ses fonctionnements
ainsi que des recommandations de prise en charge (par ex : il serait bon de consulter un mois avant l'opération pour travailler ça et ça puis 6 mois après pour travailler ça et ça). Cette feuille est un guide personnalisé et j'encourage la personne, si plus tard elle veut
consulter, à l'amener à son nouveau psy. Je précise qu'elle n'a aucune obligation de continuer avec moi et lui propose une liste de dispositifs gratuits si besoin. Enfin, je dis que je reste disponible s'il y a la moindre question. Et j'envoie le compte rendu relu avec lui/elle
ET APRES ?
La Haute Autorité de Santé (HAS) recommande un suivi de six mois minimum post-intervention.
Il est important de faire au moins une visite par an pour faire le point tous les ans : la 1ere, 2e et 3e année mais le suivi psy n'est pas obligatoire, juste conseillé.
Après l'opération, à côté de toutes les problématiques évoquées plus haut, reste la question de la perte de poids. Les différents types d'intervention n'offrent pas la même rapidité de perte de poids et le corps peut mettre du temps à "recevoir le message" avec une décroissance
plus lente que prévue au début. De plus, la reprise de poids est possible avec certaines méthodes alors comment faire face à ce découragement ? Les patient.e.s sont très encadré.e.s avant la procédure avec tout ce parcours de soin mais ils peuvent se sentir complètement perdus et
abandonnés face aux difficultés qui suivent. Et si les raisons qui ont contribué à la prise de poids n'ont pas été entendues alors le combat est constant. Un accompagnement empathique, protégé par le secret, peut aider à intégrer ce séisme de l'intervention qui n'est pas aussi
"magique" qu'on pourrait le croire.
Merci d'éviter tout commentaire grossophobe & psychophobe.
Thread relu par une amie ayant eu recours à cette procédure (merci !)
Missing some Tweet in this thread? You can try to force a refresh.

Enjoying this thread?

Keep Current with Lapsyrévoltée

Profile picture

Stay in touch and get notified when new unrolls are available from this author!

Read all threads

This Thread may be Removed Anytime!

Twitter may remove this content at anytime, convert it as a PDF, save and print for later use!

Try unrolling a thread yourself!

how to unroll video

1) Follow Thread Reader App on Twitter so you can easily mention us!

2) Go to a Twitter thread (series of Tweets by the same owner) and mention us with a keyword "unroll" @threadreaderapp unroll

You can practice here first or read more on our help page!

Follow Us on Twitter!

Did Thread Reader help you today?

Support us! We are indie developers!


This site is made by just three indie developers on a laptop doing marketing, support and development! Read more about the story.

Become a Premium Member ($3.00/month or $30.00/year) and get exclusive features!

Become Premium

Too expensive? Make a small donation by buying us coffee ($5) or help with server cost ($10)

Donate via Paypal Become our Patreon

Thank you for your support!