Première question qu'on traitera :
Déjà, comme on a vu dans cette présentation rapide et générale, on est loin du fatalisme mais la théorie de Bourdieu nous permet de dresser des pistes de solution, comme par exemple mettre en place une sociologie explicite, dite "rationnelle".
Du point de vue individuelle, si on dit qu'il existe des codes implicites permettant la réussite, il me semblerait a-priori que le but d'un élève ne sera pas de tout laisser tomber mais de tenter de comprendre et d'intégrer ces codes (pour aller vite).
Bourdieu ne militait nullement pour l'abolition de la culture scolaire "classique" mais au contraire pour son accessibilité (sinon, je ne sais pas trop pourquoi il a fait, entre autres, un livre entier sur Flaubert et un cours au Collège de France sur Manet). Mais je m'éloigne.
Mais après tout, mon affirmation n'est corroborée par rien et nous continuerons de parler dans le vide s'il n'y avait pas des faits. Après, j'ai envie de dire, en l'absence de faits, il vaut mieux ou ne rien dire ou rester très prudent...
Bon, à ma décharge, Blanquer semble connaître (d'on ne sait où) un élève qui a ressenti du fatalisme suite à la rencontre avec la théorie de Bourdieu, ce qui fait qu'il serait devenu résigné. Néanmoins, ça reste très léger comme preuve pour une affirmation aussi grande...
Il y a néanmoins d'autres témoignages (avec un N>1) qui semblent dire : "c'est plus compliqué que ça". Il est en effet maintenant nécessaire de tenter de réaliser une sociologie de la réception des thèses Pierre Bourdieu (largement enseigné en secondaire, surtout dans l'ancienne
filière ES). (Et par intuition, il y a de grandes chances que cette réception soit conditionnée par les dispositions des agents...)
Je commence par un texte de Fabien Truong, témoignage de son expérience d'enseignant dans un lycée du 93 lorsqu'il a dû transmettre les thèses de Bourdieu (au programme) journals.openedition.org/socio-logos/24…
Si on peut observer certaines interrogations pouvant conduire à une forme de résignation (qui restent à l'état d'interrogations posées à l'enseignant)... 
Il semble néanmoins que l'enseignant parvient à trouver des portes de sortie, notamment grâce à des citations du sociologue :
Truong conclut ainsi (et écrit aussi que la découverte de la violence symbolique peut être riche d'enseignement, autant pour le professeur que pour les élèves, devant ajuster leurs pratiques) :
(Ce n'est pas forcément ad hoc, mais il y a également ce texte, qui permet de prendre un peu de hauteur sur la réception des sciences humaines à travers un cas, article découvert via @MathieuArbogast ) cairn.info/revue-agora-de…
@MathieuArbogast Il serait donc intéressant de tester si la proximité avec les thèses de Bourdieu amène à l'échec scolaire
@MathieuArbogast (vu la réussite de ses trois enfants, dont on peut supposer une certaine connaissance des théories de leur père, cela invaliderait grandement ^^, mais il faut tester à plus grande échelle)
@MathieuArbogast Il est tard donc je vais pas m'amuser à faire des statistiques très poussées... Mais prenons le postulat suivant : un élève ayant suivi une filière ES aura été en plus grande proximité avec Bourdieu qu'un élève ayant suivi une autre filière. Les élèves en Bac général ont
@MathieuArbogast également une plus grande proximité avec Bourdieu que les élèves de bacs professionnels ou technologiques. Alors y a plein de variables parasites mais testons leurs réussites IUT (trouvé dans un article de S. Beaud journals.openedition.org/formationemplo… )
@MathieuArbogast (je tiens à dire que je suis parfaitement conscient de l'idiotie de la chose, comme il serait idiot de penser que cette réussite serait due à une meilleure connaissance des thèses de Bourdieu. C'est juste pour dire "tiens en fait, il ne semble pas que les élèves les plus
théoriquement exposés à Bourdieu soient ceux qui réussissent le moins, mais ça tout le monde s'en doutait... Enfin j'espère !)
Tout ça pour dire : on attend les preuves de l'affirmation du ministre, parce que le gros des indices qu'on peut avoir, qui n'est absolument pas suffisant, hein, n'indique pas ça. Et comme la charge de la preuve ne m'incombe pas, je vais pas davantage me fatiguer...
(on peut continuer de tester notre postulat, pour rigoler, avec des données trouvées ici education.gouv.fr/cid57096/reper… :
On peut également opérationaliser l'hypothèse non plus en fonction de la filière du bac mais de la filière dans l'enseignement supérieur, où les étudiant·e·s en sciences humaines et sociales auront théoriquement une plus grande proximité avec Bourdieu que les autres
Enfin, fautes de données disponibles, revenons à du qualitatif, Blanquer utilisant Stéphane Beaud (qui, je pense, serait très surpris d'une telle utilisation de ces travaux, où Bourdieu serait vu comme un facteur d'échec scolaire)
Voilà ce qu'on peut trouver gratuitement et rapidement concernant le témoignage dont Blanquer fait référence :
(J'ai pas accès au livre donc si quelqu'un a le passage en entier...)
Il n'y a aucunement une preuve de résignation, bien au contraire, on sent la motivation dans ces paroles. Ce témoignage n'est pas celui d'une personne désabusée, mais plutôt celle d'une personne qui ne reconnaît pas sa trajectoire dans ce qu'on lui présente comme une réalité
statistique et qui voit en l'école des possibilités d'ascension sociale, ce que Stéphane Beaud et d'autres sociologues de l'éducation, proches ou non de Bourdieu, ont pu constater. Mais ça, nous le verrons dans un autre thread...
