#AujourdhuiAuTribunal Deux jeunes hommes comparaissent pour trafic de stupéfiants : arrêtés en flagrant délit d’échange d’un sac contenant 70 grammes de cannabis, en grois moitié herbe, moitié résine.
Chez l’un des deux, la perquisition permet de découvrir 126 grammes d’herbe de cannabis et de multiples emballages couramment utilisés pour de la cession en détail.
En garde à vue, ils parlent (grosse erreur) et disent qu’ils ne se connaissaient pas. Leurs téléphone dûment exploités démontrent le contraire.
Le premier prévenu, Primus, explique qu’il avait eu un accident de vélo (il en justifie) et a perdu ses revenus, se lançant dans la vente de stups pour compenser.
Le président : que pouvez-vous nous dire sur ça aujourd’hui ?
Primus : Sur mon opération ?
— C’est à dire que vous n’êtes pas poursuivi pour avoir été opéré.
Le tribunal a un message à faire passer, je le relaie avec plaisir :
L’histoire de l’accident de scooter qui crée une dette à l’égard d’un grand qu’il faut rembourser en trafiquant du stup, ça me marche pas, il faut arrêter maintenant. Merci de varier pour éviter la lassitude.
Primus : la CAF a tardé trois mois à actualiser ma situation et me verser mes indemnités. Je ne pouvais pas travaille, je ne pouvais pas bouger, et je me suis retrouvé dans une situation difficile.
— Vous ne pouviez pas bouger, et vous avez donc décidé de livrer des stups ?
Le président, avec une amabilité sans faille, pointe chaque contradiction, chaque mensonge, chaque incohérence dans les propos du prévenu.
C’est peu dire que Primus n’a pas le profil des livreurs habituels. Champion régional du jeu de go, informaticien. Intelligence supérieure, mais pas criminelle.
C’est le tour de Secundus. Il a été dénoncé par Primus comme étant son fournisseur. Primus n’est pas au courant des usages : ça ne se fait pas.
Tout le désigne comme le donneur d’ordre, et son téléphone révèle des déplacements nombreux dans toute l’île de France.
C’est chez Primus qu’on a trouvé 126g.
Secundus a un filet de voix, étouffé par son masque, il est à peine audible. Il se lance dans des explications confuses, s’interrompt à moitié, et demande à ce qu’on répète la question.
La bonhommie du président est mise à l’épreuve.
Il reconnait du bout des lèvres.
« Ce n’est pas ce que vous avez dit en garde à vue.
— Ah ? J’ai dit quoi en garde à vue ? »
NdEolas : quand on garde le silence, on n’oublie jamais ce qu’on a dit, on ne se contredit jamais.
Secundus explique qu’il n’est qu’un simple livreur, et qu’il sous-traite une partie de sa marchandise à Primus.
Le tribunal lui rappelle qu’il a chez lui tout le nécessaire à conditionnement, et qu’il en garde chez lui.
Qu’il a prétendu ne pas connaitre Primus. Qu’il a prétendu ne jamais sortir de son arrondissement. Que tout cela a été battu en brèche, et que désormais il est difficile de le croire.
Bref, il n’a pas gardé le silence.
« On n’a l’impression qu’en garde à vue, vous n’avez pas dit spontanément toute la vérité ».
Secundus est en formation de magasinier dans une enseigne de grande distribution. Il gagne environ 1000 euros par mois. Plutôt 900. En fait 800. #Déflation
Secudnus a été placé sous contrôle judiciaire, il est allé à la première convocation du conseiller de probation, mais pas la seconde, il dit qu’il pensait qu’il suffisait d’envoyer des justificatifs.
Casier judiciaire : 300 euros d’amende pour un recel de vol remontant à 4 ans, c’est tout. (Primus a un casier néant). Primus a parfaitement respecté son contrôle judiciaire.
Le tribunal demande aux prévenus s’ils accepteraient de faire un travail d’intérêt général plutôt que d’aller en prison.
Parole au parquet.
Elle rappelle la peine encourue pour ces faits : 10 ans. Bien sûr, on sait que la première fois, on ne prend pas dix ans. On banalise.
(Elle a raison de souligner l’effet délétère d’augmenter sans cesse tous les quantums encourus par effet d’annonce)
« A qui la faute ? Aux parents, à la société ? En bout de course, c’est nous, la justice, qui constatons l’échec et devons faire avec. »
Elle rappelle les quantités saisies. Les déplacements de Secundus, nombreux, fréquents.
« La téléphonie a révélé 200 déplacements suspects chez Primus, bien plus chez Secundus. » Elle démontre la détention, le transport, la cession de stupéfiants, qui sont les éléments matériels du délit.
« Primus mérite mieux : doué en math, arrêt brutal de ses études par l’accident, il faut qu’il reprenne ses études pour mettre à profit son don pour les maths.
Secundus a une insertion professionnelle. Il faut l’encourager. »
Ce qui m’importe est de leur offrir un encadrement. La pénitentiaire pourra le faire. Pour Primus, 6 mois avec sursis probatoire, obligation d’étude ou de travail.
Secundus : 10 mois avec sursis probatoire de 2 ans, avec obligation de travail.
Parole à l’avocat de Primus.
Tout est parti de son accident en juin dernier. Son employeur a douté de la réalité de son accident (qui était sur le trajet domicile travail) ce qui a retardé sa prise en charge par la sécu. Il a fait le mauvais choix pour gagner de l’argent.
C’était pour lui la seule issue, provisoire, illégale. Il en a eu conscience. Son arrestation l’a marquée.
Des personnes sont parfois confrontées à des situations apparaissant sans issue légale.
Cela arrive ; cela explique, sans excuser. Primus reste profondément honnête, et travailleur. Il travaille comme livreur de repas, et compte reprendre ses études (c’est un informaticien autodidacte, pas diplômé).
Elle est réticente sur le TIG, difficilement compatible avec son travail.
Elle demande une non inscription au B2 du casier judiciaire, disant que les entreprises donneuses d’ordre vérifient le B2. Le tribunal :
Le procureur est peu enthousiaste sur la non inscription au B2. Elle n’est pas opposée à la restitution du téléphone placé sous scellé.
Parole à l’avocat de Secundus.
Alerte avocat plaidant sans masque.
Il réfute l’idée que Secundus soit le donneur d’ordre. En croisant les exploitations téléphoniques, on n’établit que quatre rencontres entre eux.
De même, ses déplacements dans tout Paris correspondent à des déplacements normaux de tout parisien non confiné.
Il reconnait les faits devant le tribunal, plus lucidement que le tribunal ne semble le percevoir. En outre, ce n’est pas un oisif, il travaille, à plein temps, même les samedi, pour gagner un peu plus. Il a trouvé son emploi après son arrestation, a fait de vrais efforts.
A trouvé dans un contexte difficile, qui rend les conditions de travail difficile. Il refuse de se contenter de l’éternelle précarité que son milieu semble lui destiner. Il faut encourager cette insertion professionnelle.
Lui estime que le TIG conviendrait, et demande aussi une non inscription au B2 pour cette insertion.
Les prévenus n’ont rien à ajouter, délibéré en fin d’audience.
• • •
Missing some Tweet in this thread? You can try to
force a refresh
⚠️ Ce n’est pas du tout ce que dit cet arrêt. Mais pas du tout. D’ailleurs, cherchez la partie citée entre guillemets dans le texte de l’arrêt. Allez-y. Il n’est pas très long.
Un de ces quatre, je vous dirai ce que je pense de ces militants qui, au nom d’une cause qu’ils trouvent noble, s’estiment affranchis de la moindre parcelle d’honnêteté intellectuelle. Spoiler : il y aura plein de gros mots. En attendant, voyons ce que dit VRAIMENT cet arrêt.
Une jeune femme de 19 ans porte plainte pour des faits qu’elle a subis de la part de son parâtre depuis ses treize ans, selon ses déclarations.
Le parâtre est mis en examen pour viol par personne ayant autorité et agression sexuelle.
Encore le piège des solutions simplistes. Un peu de recul critique ne fait jamais de mal.
1 - la corruption est passible de 10 ans de prison, le braquage, 15, mais là il y a risque direct de mort ou de blessure, inexistant pour la corruption.
10 ans c’est déjà le sommet des peines délictuelles, et augmenter la peine ça veut dire basculer au criminel, donc introduire potentiellement des obligés et des clients parmi les juges, et retarder considérablement le jugement. Fausse bonne idée donc.
2 - 12 mois entre l’ouverture d’info et la cassation est déconnecté de toute réalité. La célérité c’est bien, mais là c’est de la précipitation. Comment un honne peut-il se défendre devant quatre juridictions différents en 12 mois, sachant qu’après, tout est irrévocable ?
Cette histoire d’auto-attestation pour pouvoir sortir, absurde en apparence, m’a fait réfléchir. J’ai une hypothèse sur la ratio legis de cette obligation. #Thread
Le décret du 16 mars créait une amende de 1re classe frappant ceux qui sortaient en violation des restrictions imposées par le confinement, i.e. pour une autre des raisons prévues. Amende montée à la 4e classe par décret du 17 mars (avec amende forfaitaire applicable)
Mais une contravention, infraction passible de peine d’amende seulement, ne permet que retenir sur place la personne verbalisée le temps de constater son identité et de dresser le procès verbal. Pas de privation de liberté, pas de garde à vue (art. 67 CPP).
D’ailleurs, payez-vous le luxe de mieux parler que le gouvernement. Il n’y a pas de virus COVID-19. La COVID-19 (féminin), mot créé par contraction de l’anglais coronavirus disease 2019, est la maladie causée par le coronavirus SARS-CoV-2.
SARS-CoV-2 est un mot créé par contraction de l’anglais Severe Acute Respiratory Syndrom CoronaVirus 2, coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère 2, par opposition au 1 qui a causé l’épidémie de SRAS en 2003. Si vous dites « le coronavirus » ça ira, pas d’ambiguïté.
Réponse : Article R.610-5 du code pénal : le fait de violer un arrêté municipal, préfectoral ou ministériel est puni de l'amende de 1re classe soit 38 euros max.
La somme de 135€ annoncée à bref délai suppose que soit pris un décret en Conseil d'Etat qui 1) fera de la violation des mesures prises dans le cadre de cette épidémie une contravention de la 4e classe (750€ max) ET 2) ...
2) ajoutera ces contraventions à la liste de l'article R.48-1 du CPP pouvant faire l'objet de la procédure dite de l'amende forfaitaire, qui fait payer tout de suite 135€ et évite des poursuites devant le tribunal de police où là le maximum de l'amende serait encouru.
Quand j’ai le plaisir et l’honneur de participer à la formation de jeunes confrères et consoeurs, un des conseils que je leur donne est, dans leur plaidoirie, de ne pas répondre aux réquisitions du procureur. C’est contre-intuitif mais c’est important. Pourquoi ?
Parce que c’est un travers de civiliste. Au civil, procédure parfaitement accusatoire, le demandeur expose ses demandes, et le défendeur réplique point par point. Puis le juge tranche dans sa décision, et accorde un article 700 ridicule à la partie qui gagne.