Ce commentaire est l’opportunité de vous parler #stockage d’électricité et des limites technologiques associées. Clairement j'aurais pu l'ignorer vu le ton, mais j'ai pensé à vous chers followers 😉
Alors, où en est-on aujourd’hui ? #Thread ⤵️
Précision : j'ai orienté ce thread sur les aspects technos/matériaux. C'est à dire ce que je connais. 😉
Autre précision : je parle de variabilité mais pour certains c'est de l'intermittence. La terminologie est en soit un débat mais au final les conséquences sont les mêmes
Toutes les sources d’énergie ne sont pas égales face au stockage. Le succès des énergies fossiles s’explique en partie parce qu'elles se stockent très facilement.
L’électricité, elle, peut être stockée mais sous une forme différente ce qui nécessite des transformations.
Le courant électrique peut être converti sous une autre forme d’énergie qui elle peut être stockée et qu’on pourra utiliser en fonction du besoin : énergie mécanique, thermique, chimique ou électrochimique.
Le stockage peut être :
➡️Stationnaire : c’est ce qui permet de participer à l’équilibre entre la production et la conso sur les réseaux électriques et de pallier la variabilité de l’éolien/solaire. Les technos de stockage existantes ont des puissances allant de quelques kW à plusieurs GW
➡️Embarqué : Ce sont les batteries des VE ou des smartphones. La puissance de stockage est de l’ordre du kW.
Certaines technos ne peuvent être que stationnaires comme les STEP, d’autres peuvent être stationnaires et embarquées comme les batteries
Parlons maintenant des 5 principales technologies de stockage existantes.
1/ La STEP (station de transfert d’énergie par pompage) qui est LA technologie de stockage la plus utilisée dans le monde. Le stockage repose sur le principe de l’énergie gravitaire
une STEP est constituée de 2 bassins dont l’un est au-dessus de l’autre comme présenté ⤵️. Lorsque l’électricité est produite en excès, l’eau du réservoir inférieur est pompée vers le réservoir supérieur qui reçoit l’énergie potentielle.
Source image : encyclopédie de l’énergie
Lorsqu’il faut restituer cette énergie, l’eau du réservoir supérieur est vidée par gravité et passe par une turbine qui produit de l’électricité
Cette techno permet de stocker de grandes capacités mais avec une certaine inertie qui ne permet pas un chargement/déchargement rapide.
C’est également une technologie qui demande beaucoup de surface puisqu’elle nécessite la construction de 2 grands réservoirs.
98% du stockage d’énergie dans le monde repose sur cette technologie, soit 145 GW au total.
La France dispose de 6 STEP mises en service entre 1976 et 1987 pour une puissance de pompage de 4.2 GW. La plus grande STEP du monde est aux USA 3GW (Bath Country)
Quelques éléments techniques
- Temps de stockage : de quelques heures à plusieurs mois
- Puissance : jusque 3GW aujourd’hui, potentiellement plus en fonction de la taille de la STEP
- Rendement : 65-80%
- Réactivité 10min
2/ Le stockage par air comprimé (mécanique) : on utilise ici l’énergie pneumatique par un mécanisme de compression d’air. Pour utiliser l’air il suffit de relâcher l’air comprimé. Bon ça parait simple mais c’est quand même assez complexe techniquement.
Source : CEA
Dans les faits l’air comprimé est injecté avec du gaz dans chambre de combustion puis passe par une turbine+alternateur pour produire de l’énergie électrique. La décompression nécessite un apport d’énergie sous la forme de gaz pour chauffer l’air.
Côté conception, le stockage est réalisé dans des cavités souterraines. Le dimensionnement des cavités dépend de l’installation en surface, et pour de grandes installations il faut pouvoir maitriser les risques de fuite et de vieillissement des réservoirs.
Quelques éléments techniques
- Temps de stockage : de quelques heures à plusieurs mois
- Puissance : de 1MW à 2,7 GW (projet USA)
- Rendement : 40-50% (systèmes conventionnels) à 70% (adiabatique)
- Réactivité : quelques min
3/ Le stockage par volant d’inertie : dans ce cas l’électricité est stockée sous la forme d’énergie cinétique par accélération d’une masse tournante. Elle est restituée en électricité via un alternateur. Le stockage dans ce cas peut être maintenu plus de 15 min.
Source : CEA
L’avantage de ce système est le temps de charge/décharge très court. Cette technologie est ancienne, elle a été utilisée par les artisans potiers de Mésopotamie, il y a environ 5500 ans, qui utilisaient des masses tournantes pour emmagasiner et restituer de l’énergie.
Quelques éléments techniques
- Tps de stockage : quelques minutes
- Puissance : jusque 10kWh
- Rendement : 85-95%
- Réactivité : 5ms
4/ L’hydrogène produite par électrolyse. La restitution en électricité se fait via une pile à combustible entre autres. Le gaz recombiné à l’oxygène produit de l’eau et de l’électricité
Source : CEA
Quelques éléments techniques
- Temps de stockage : plusieurs mois
- Puissance : jusque 10GWh
- Rendement : 25-35%
- Réactivité : 100ms
5/ Les batteries (stockage électrochimique), le moyen de stockage le plus connu. La batterie est constituée de deux électrodes et d’un électrolyte (substance conductrice). Les électrons circulent dans la batterie au moment du chargement et du déchargement.
source: CEA
Il existe plusieurs types de batteries : lithium-ion, plomb-acide etc. Chaque type a des capacités différentes et une durabilité dépendante des matériaux utilisés. Les batteries lithium-ion sont de loin les plus utilisées et les plus matures d’un point de vue industriel.
Quelques éléments techniques
- Temps de stockage : de quelques heures à une semaine
- Puissance : du kW au MW
- Rendement : 70-80%
- Réactivité : 1ms
❓Pourquoi a-t-on besoin de stockage pour la transition énergétique?
Pour que le réseau électrique soit stable et le courant de bonne qualité il faut qu’il y ait un équilibre entre l’électricité injectée (issue de la production ou du stockage) et celle extraite (ou consommée)
Le stockage permet aussi de distribuer la charge et l’énergie sur le réseau avec l’utilisation massive de sources de production variables (éolien/solaire) qui nécessitent, pour conserver cette stabilité, de pouvoir stocker en cas de surproduction
et de restituer en cas de pic de consommation, ou de compenser leur variabilité par des technologies de production pilotables (nucléaire, hydraulique) et de stockage entre autres.
Voici comment la flexibilité est gérée aujourd’hui en France
Pour ce qui est du stockage stationnaire, le diagramme de Ragone permet de comparer les performances des technologies de stockage ce qui permet d’identifier les différences en termes de puissance de stockage et de temps de charge/décharge :
Les technologies de stockage sont donc très différentes entre elles et n’auront donc pas le même usage pour stabiliser le réseau électrique. Chaque technologie est potentiellement un levier de flexibilité avec des effets différents sur le réseau.
Ainsi les besoins journaliers peuvent être assurés par les batteries et les besoins hebdos par les STEP. Pour l’inter-saisonnier, ce sera avec l’hydrogène/STEP. Le parc de stockage actuel en France (chiffres RTE 2020) est de 4 850 MW dont 4810 hydrauliques et 40 MW de batteries.
Le Parc de stockage évolue avec le temps, il y a des prévisions d’évolution pour ces prochaines années. En attendant RTE a lancé les expérimentations Osmose et Ringo avec des sites de stockage de 12 à 10MW contenant des batteries de différents types sur 1 ou plusieurs sites.
❓Alors pourquoi dit-on que les technologies de stockage ne sont pas matures aujourd’hui ?
Pour comprendre il faut avoir en tête quelques éléments en tête. Concernant le devenir du mix électrique :
➡️La PPE envisage la réduction du nucléaire dans le mix électrique à 50% en 2035
➡️Les scénarios RTE/IEA présentent des possibilités de mix avec une part plus faible de nucléaire, jusqu’au 100% Enr,
nécessitant une flexibilité importante et donc la mise en place, entre autres, d’une grande capacité de stockage
➡️L’électrification des usages (industrie, transports) nécessitera une augmentation des moyens de production d’électricité
Concernant les besoins en stockage :
➡️La PPE envisage l’augmentation de 1,5GW de la capacité en STEP (durée construction + procédures : 10 ans). De manière générale les possibilités de construction de nouveaux barrages ou STEP en France sont très limitées en France
➡️RTE envisage la mise en place d’une capacité de stockage par batteries supplémentaire de 500MW d’ici 2022
➡️ Selon le rapport RTE/IEA, le besoin en flexibilité à l’horizon 2050, avec le développement des ENr serait d’au moins 80GW.
La capacité installée actuelle du Parc nucléaire français est de 61.4GW. Le besoin serait donc supérieur à la flexibilité apportée par le nucléaire aujourd'hui. Avec la baisse du nucléaire et le maintien de l'hydraulique les autres solutions de flexibilité seront très sollicitées
La flexibilité peut être obtenue de plusieurs manières Le stockage est un levier important mais il y en a d’autres qui nécessitent un fort dévlp technique et règlementaire. Tout en considérant les évolutions de la conso et les risques associés aux aléas climatiques ou accidentels
Par exemple, la décharge des batteries sur le réseau électrique (Vehicle-to-Grid), ainsi que la seconde vie des batteries de véhicules électriques (pour des usages de secours tertiaire ou de cyclage faible puissance du PV) sont des possibilités à considérer
Je vous conseille le rapport RTE/IEA qui l’explique bien, ou deux threads sur ce rapport qui présentent bien où ça coince techniquement quand la proportion d’ENr devient très importante :
Le stockage par batterie est intéressant pour un stockage court-terme mais il n’est pas suffisant pour réguler le réseau et le sécuriser à différentes échéances (journée, semaine, saison, année…).
il est bien plus adapté à la production solaire (journalière) qu’à l’éolien par exemple, qui a des profils de production bien plus variés pouvant durer plusieurs jours.
La technologie Lithium-ion, la plus développée aujourd’hui, est limitée par différents facteurs :
➡️ Adaptée uniquement pour des quantités d’énergie faibles à moyennes
➡️Durée de stockage courte (qq heures à qq jours)
➡️Renouvellement des batteries tous les 10-15 ans max
➡️La sensibilité à la température qui réduit sa durée de vie
➡️Les risques de départ de feu et d’explosion
➡️Leur impact ressources et matière, notamment en termes de disponibilité (stratégique) de certains éléments constitutifs
➡️Leur coût
Pour ce dernier point, bien qu’il diminue fortement avec les effets d’échelle de production, il n’en reste pas moins que les quantités nécessaires associées aux durées de vie courtes sont un frein important.
Le développement de nouvelles technologies de batterie pour des applications en stockage stationnaire est donc nécessaire pour intégrer les besoins anticipés qui sont énorme en France et dans le monde. On est loin de solution miracle.
Sur la question des matériaux, les besoins vont devenir très importants ces prochaines années, que ce soit pour atteindre les objectifs 2035 ou encore 2050 en fonction du scénario choisi.
Il y aura énormément de demandes ces prochaines années et décennies dans le monde
Il est donc nécessaire d’anticiper le besoin en termes de ressources et de développer en parallèle des technologies utilisant des matériaux plus communs. Comment se situe la France sur ces deux aspects ? nous sommes mieux positionnés sur le 2e aspect que sur le 1er...
Et même si on déployait des moyens de stockage rapidement, il ne suffit pas de les connecter au réseau, il y a toute une infrastructure à repenser en fonction des usages, du mix et de la position géographique des capacités de production, de stockage et de consommation.
Ceux qui font miroiter une possibilité de stockage par batteries importante n’ont juste aucune idée de ce que cela implique d’un point de vue technique, technologique, industriel, environnemental et bien sûr économique.
Le problème est donc d’adapter un moyen de stockage avec des limites techniques, à une échelle conséquente en termes de puissance et de flexibilité. Tout en conservant la recyclabilité de la solution et un impact enviro compatible avec les objectifs visés.
Et si vous avez bien lu ce thread vous comprendrez qu'il n'y a pas une mais plusieurs solutions qui contribuent ensemble à la stabilité du réseau en fonction du scénario et donc du mix choisi
Pour aller plus loin, je vous conseille cette vidéo de @leReveilleur qui parle stockage et réseau électrique.
Comment les fondations des tours du #WorldTradeCenter ont pu être construites ?
Quelques explications concernant la méthode de la paroi moulée dans ce contexte. #Thread ⤵️
Les travaux de construction du WTC ont débuté en 1966 sur l’île de Manhattan à New York. Le site se situait à l’emplacement d’une ancienne décharge publique, avec un substratum rocheux accessible à plus de 20 m de profondeur.
Il a donc fallu creuser jusqu’à la roche et extraire plus d’1 million de m3 de terre et déchets enfouis (poutres des anciens quais, épaves de navires enterrées). Le lieu de construction impliquait de creuser dans un sol gorgé d’eau, avec de forts risques d’inondation du site.
Parier sur le scénario 100% #ENr sans possibilité de backup par le #nucléaire c’est prendre un énorme risque de dépendance aux #fossiles.
La stratégie manque de cohérence au regard de l’objectif.
Les constructions de réacteurs nucléaires doivent être anticipées. D’après le rapport RTE/IEA la date jalon pour le développement technologique (flexibilité) est 2035. C’est demain… le programme pari là dessus sans backup.
Delphine Batho n’est pas la seule, loin de là, à proposer un programme sur l’énergie avec des incohérences. S’appuyer sur des hypothèses aussi fortes est très risqué. Les programmes devraient être confrontés aux réalités techniques, technologiques et industrielles.
Être responsable @yjadot c’est surtout arrêter de propager des #fakenews sur le #nucléaire et sortir de cette vision dogmatique du sujet.
Un exemple ? 1/3
Dire que la question climatique est une priorité pour ensuite prôner l’arrêt du nucléaire au profit des énergies #fossiles c’est contradictoire et irresponsable.
3/3
#LeSaviezVous?
Dans son dernier rapport, le #GIEC précise que le phénomène de carbonatation du béton contribue à absorber 50% du #CO2 émis au cours de sa production. Etonnant non ?
Avant de réagir à cette information, quelques explications semblent nécessaires #Thread ⤵️
Certains matériaux absorbent ou réagissent avec le CO2 au cours de leur vie, ce qui peut être considéré sous certaines conditions comme une séquestration carbone.
La première condition est la durée de vie du matériau et donc de séquestration, qui sont souvent associées.
Comme pour le #bois. Mais comme déjà expliqué, la séquestration CO2 pour le bois ne peut être prise en compte que pour des durées d’utilisation très longues, 100 ans, comme c’est le cas dans la construction. J’avais écrit une tribune sur ce sujet : forbes.fr/environnement/…
Actuellement il y a beaucoup d’attaques envers les candidats @EELV dont @sandrousseau@EricPiolle et @julienbayou qui n’est pas candidat.
Au-delà du problème de com’ de certains candidats je pense que ces polémiques sont stériles et ne permettent pas de débattre sur le fond ⤵️
J’ai réagi hier sur les propos de Sandrine Rousseau parce qu’il me semblait important de le faire. On galère suffisamment sur le sujet de la féminisation des métiers techniques
Mais je ne fais pas dans l’ecolo bashing. Ca ne fait pas avancer les débats et ça ne m’intéresse pas.
Personnellement je suis pour un débat sur le fond des sujets. Quand je réagis c’est qu’il me semble nécessaire de le faire. Quelle que soit la personne et le parti politique. Les débats sont nécessaires avec un fond technique factuel.
Comme je passe devant la centrale de @EDFGolfech, je partage une photo 😉
L’aéroréfrigérant est un échangeur eau-air permettant de refroidir l’eau du circuit de refroidissement.
💡L’évaporation d’une partie de cette eau crée le panache de vapeur que vous voyez sortir de l’aéro
Un réacteur #nucléaire fonctionne avec 3 circuits d’eau permettant de réaliser les échanges thermiques nécessaires à la production ⚡️. Ces 3 circuits sont indépendants et leurs fluides ne sont jamais en contact.
Le circuit de refroidissement (ou circuit tertiaire) peut être :
✅ ouvert : dans ce cas l’eau est puisée et rejetée dans la mer ou la rivière après passage dans le condenseur
✅ fermé : le refroidissement de l’eau est alors assuré par l’aéroréfrigérant