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Nicolas Vanderbiest @Nico_VanderB
, 28 tweets, 6 min read Read on Twitter
Pas mal de journalistes se posent des questions sur l'analyse des réseaux sociaux suite au phénomène #giletsJaunes

On est à 10 M de tweets en un mois. Le volume a dépassé aujourd'hui ce qu'il est possible d'analyser à une simple échelle (API, Processeurs, etc.)
Ce volume, comme celui de l'affaire Benalla, dépasse tous les volumes jamais observés. Les attentats de Paris avaient 1 M de tweets. Londres, 2 M mondialement,Berlin 300 000, Nice 1,5 M mondialement, Balance ton Porc en France 450 000 sur 5 mois.
Forcément, cette augmentation de volume tout à fait soudaine pose question : s'agit-il d'une évolution démographique de Tw ? (Plus d'utilisateurs actifs ?) D'une évolution des usages ?(Un militantisme plus exacerbé ?)Une tension politique (convergence des luttes contre Macron ?)
En l'état, cette analyse prend plus de temps que la circulation des choses. Cette analyse va se confronter à plusieurs freins :
- Les chercheurs sont payés et sont évalués sur leur propension à publier des articles scientifiques. L'analyse de l'actualité fait pas partie de ce jeu
La publication d'article est en effet davantage orienté vers la recherche de la théorie, que la description du réel. Il faut donc relier son analyse de l'actualité à des théories existantes (Economie de l'attention, travailleurs du clic, etc.)
- Les chercheurs doivent constituer eux-mêmes leur équipes. Face à un torrent de 10 M de tweets, pour isoler des enseignements, il faut aller au-delà du quantitatif afin d'éviter les poncifs. Seul, l'analyse est impossible. Cela prend du temps et des personnes.
Vient ensuite le cas des possibles ingérences étrangères. Celles-ci sont extrêmement difficiles à prouver. Un pseudo restant un pseudo, les méthodes actuelles restent très éloignés des enseignements des sciences dures où l'on cherche à prouver sans doute le réel.
Les chercheurs sont obligés de rechercher des indicateurs. Ces indicateurs ont toutes les faiblesses qu'ont les indicateurs traditionnels car ils peuvent être manipulés, peuvent être expliqués par d'autres variables, etc. Pensez aux indicateurs d'autres sciences comme le PIB
le taux de chômage, l'indice de bonheur, le salaire moyen (jugé comme nul et remplacé par le salaire médian), etc. Un indicateur n'est qu'une indication et non pas une valeur en soi. Les indicateurs en ingérence étrangères sont :
- Le degré de production.

Beaucoup de littérature scientifique pointent le fait d'assister à du sockpuppet, botting et consors lorsqu'un certain degré d'activité est observé. Généralement entre 800 et 1200 tweets oar jour.
Le parti pris est de se dire que s'il y a farm trolling, C'est une activité intense sur des séries de 8 heures de travail. Seulement (merci l'affaire Benalla) parmi ces auteurs ultractifs, il y a également une partie de personnes ultra active au chômage et ultra motivée...
Cet indicateur n'est donc qu'un indice de contamination et comportant de nombreux biais.

- La comparaison avec un écosystème pro-russe.

Autre méthode,le comparatif entre les ultra actifs et un écosystème de réference pro-russes.
Cette méthode part du principe que s'il y a troll farming, cela est organisé sous des horaires de travail de 8h avec ultra activité et sert également à pusher les médias ayant une lunette des événéments pro-russes.
Cette méthode a donné de bons indicateurs pour identifier des réseaux de désinformation mais souffre d'un biais certain : Corrélation n'est pas causalité. Il est logique que les désinformations soient axés contre le pouvoir et que le contre-pouvoir exercé par ces médias soient
reliés ensemble.

- La comparaison avec une base de données de désinformation antérieures.

La constitution d'une base de données de désinformations ayant circulés auparavant pour identifier les nouvelles est une méthode qui a fonctionné mais qui a le gros souci d'avoir
sa base de données détruite du fait des blocages de comptes par Twitter. Par ailleurs, dans certaines opérations de désinformation (Emmanuelle Macron financé par l'Arabie Saoudite, l'utilisation des blogs de Mediapart / l'Express)
Les réseaux utilisés pour assurer la propagation avait été créés pour l'occasion et ne pouvaient donc pas se retrouver dans les bases de données.
Les indicateurs ont donc tous des faiblesses et des biais inhérents à leurs méthodes. De plus la recherche en la matière se retrouve bloqué par rapport au fait que :
- Ces recherches s'ancrent autour de débats extrêmement politique pour lesquels il est presque impossible
de participer au débat sans recevoir une volée de commentaires dans tous les sens.
- Tous ces indicateurs utilisent des bases de données d'individus. Les réactions au cas du Disinfolab cet été a bien prouvé à quel point cela est sensible car cela implique un choix de société
entre une société de la surveillance et une société de la liberté.
- Si les preuves et indices d'ingérence sont nombreux, leur impact est incertain et la narration selon laquelle les fake news ont conduit à l'election de Trump et du Brexit n'est pas étayée.
De manière générale, le débat des fake news est un axe diplomatique et d'influence énorme entre d'une part l'axe atlantique et l'axe russe / chinois, chacun s'accusant l'un l'autre. (Voir encore ici les gilets jaunes entre USA et russes)
De plus, il restera toujours le débat de l'oeuf et la poule. Si de simples messages sur les réseaux sociaux arrivent à fonctionner, cela serait qu'il y a au moins des failles exploitées qui sont réelles. Le constat est donc que la problématique ne peut pas être adressée
En combattant par l'analyse et l'enquête les désinformations, mais en agissant sur d'autres champs. Dans les débats contre la désinformation, deux solutions ont émergé : le fact-checking (poussé par un lobby médiatique en manque d'argent) et l'éducation aux médias.
La première solution envisage les individus comme des personnes perdues et troublées par une désinformation à qui il faut injecter un remède. Seulement, la plupart des études sur les désinformations prouvent que les personnes propageants celles-ci sont complètement eloignées
de l'écosystème médiatique et on se retrouve face à des personnes qui voient la désinformation, mais jamais l'infirmation tandis que les personnes voyant l'infirmation n'avaient pas vu la désinformation en premier lieu.
La deuxième solution, celle de l'éducation aux médias, est une solution qui prend tellement de temps qu'elle apparait lointaine par rapport à la problématique actuelle.
Par ailleurs,il n'existe presque aucun expert par rapport à ces questions; Je resterai à jamais marqué par une audition auprès d'un ministre belge où un expert interrogé me dit en sortant "de tout façon, moi je m'en fiche, c'est surtout que ca consomme de l'énergie cette affaire"
Bref tout cela pour dire que nous sommes copieusement dans la merde parce qu'aucune question n'a de réponse (^_^) et je n'encourage aucun chercheur à monter au créneau sur cette question là sous peine d'y perdre plus que l'apport qu'il pense pouvoir donner au débat.
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