Thread by @Enthoven_R

Toutes mes excuses, chers amis, tant j’ai tardé !
Comme demandé et comme promis - et puisqu’on a tendance à trouver géniaux les gens qui pensent comme soi - voici une anthologie (fatalement incomplète) pour vous aider à entrer en philosophie, selon votre caractère. 👇🏿

Si vous avez la foi sans croire en Dieu (autrement dit : si vous êtes courageux sans autre espoir de récompense que votre courage lui-même), lisez et relisez toute La Peste de Camus. Vous y verrez qu’il n’est pas nécessaire d’espérer pour se battre.

Si vous êtes partisan de la peine de mort, et croyez en l’exemplarité du châtiment, lisez les « Réflexions sur la guillotine » d’Albert Camus, vous y comprendrez que la justice n’est pas la vengeance.

Si vous êtes tenté de vous suicider parce que vous avez peur de mourir, lisez enfin le Mythe de Sisyphe, du même homme.

Si la souffrance des animaux vous rend malade, mais que vous n’arrivez pas, pourtant, à mettre les abattoirs et les chambres à gaz sur le même plan, lisez « Le Silence des bêtes » d’Elisabeth de Fontenay. (Ed. Fayard)

Si vous croyez qu’en tuant vous accomplissez la volonté de Dieu, et qu’ensuite vous serez récompensé par des beuveries, bref, si vous êtes con au point de souhaiter (pour l’éternité) des plaisirs qui conviennent aux mortels, alors lisez Montaigne (Apologie de Raymond Sebond)

Si vous n’en pouvez plus, des vedettes qui s’engagent, lisez Chien Blanc, de Romain Gary.

Si vous aimez la corrida, lisez Hemingway (« Le soleil se lève aussi », ou bien « Mort dans l’après-midi »).

Si vous détestez la corrida, pas besoin de lire quoi que ce soit : c’est l’avantage du Bien.

Si vous êtes auto-entrepreneur et insoumis en même temps, et que vous vous arrangez avec vous-même en vous disant que « Tant qu’on ne peut pas changer le système, il faut faire avec » les morales par provision de Descartes ont été écrites pour vous (Discours de la Méthode, III)

Si vous êtes un gentil socialiste qui continue d’avancer dans le XXI en disant « oui d’accord mais enfin tout de même » à tout bout de champ, et qui cache des convictions molles sous un discours ferme, lisez vraiment Jaurès. Au lieu de dire que vous l’avez fait.

Si vous êtes madame Bovary, lisez.
Aucun chagrin n’y résiste.

Si vous avez la tentation diabolique ne PAS COUCHER avec les gens que vous aimez trop, lisez Le Banquet de Platon, et demandez-vous si Socrate a raison de refuser les avances d’Alcibiade. 🤡🙃

Si vous êtes fan de Bégaudeau, lisez Staline.
Vous préférerez l’original à la copie.
Ou bien Winnie l’Ourson.

Si vous avez envie de mourir, lisez Cioran. Les « Syllogismes de l’amertume » (ou « De l’inconvénient d’être né ») : vous y verrez que ce que vous prenez pour un handicap (l’envie d’en finir) est en réalité une richesse…

Si vous êtes féministe (ou si vous êtes misogyne) lisez le Marquis de Sade.

Si vous cherchez à sortir de la caverne de Platon, remplacez-la par la « caverne fécale » de Céline, que Bardamu visite juste après son arrivée à New York, dans le "Voyage au bout de la nuit"

Si vous cherchez une arme de guerre contre les Fake News, lisez (relisez, riez et méditez) l’admirable « Réel et son Double » de Clément Rosset.

Si votre enfant vous prend la tête avec la question « pourquoi ? », dont vous avez le sentiment qu’il vous la pose non pas pour comprendre quelque chose, mais pour vérifier que vous n’avez pas réponse à tout, lisez l’Appendice de la 1ère partie de L’Ethique de Spinoza.

Si vous voyez une construction sociale (au profit de certains) sous le constat physiologique de la différence des sexes, lisez le Rêve de d’Alembert (Diderot)

Si, tel @realDonaldTrump, vous vous prenez pour le seul de votre espèce alors que tout le monde vous ressemble, et si vous avez tendance à voir en vous le champion du monde de la modestie, lisez le début des Confessions de Jean-Jacques Rousseau.

Si la fantaisie d’être catholique, juif ou musulman prend trop d’importance dans votre vie, lisez Voltaire (en particulier la fin du Traité sur la Tolérance)

Si vous êtes de ces gens qui lisent les livres érotiques à une main parce que, de l’autre, ils prennent des notes, lisez LE paragraphe des 11 000 verges (Apollinaire) où il n’est question ni de viol, ni de coprophagie (p 56 ed.poche). Surtout : ne lisez pas le reste !

Si vous êtes un insoumis tenté par l’indigénisme, lisez la terrible réponse de @MarylinMaeso à @HouriaPIR , à la fin des « Conspirateurs du silence » (Ed. Observatoire) ça va bien se passer. Changer d'avis est une chance. profitez-en. 🙏🏿

Si vous préférez Poutine à Macron, lisez la deuxième partie du Léviathan (de Thomas Hobbes) qui porte sur l’organisation de l’Etat.

Si vous préférez Macron à Poutine, lisez « La société ouverte et ses ennemis » de Karl Popper.

Si vous avez le sentiment qu’on se moque de vous (et du ciel) quand on déclare « miraculeuse » la guérison (d’une paralysie) de Sœur Bernadette Moriau, lisez Spinoza (Traité théologico-politique – Chapitre 6)

Si, comme @T_Bouhafs, vous aimez insulter les flics parce que vous savez qu’on est en train de vous filmer, lisez le passage sur les lunettes noires dans les « fragments d’un discours amoureux » de Roland Barthes. (promis, ce n'est pas du racisme) 😎facebook.com/watch/?v=14240…

Si vous aimez raconter des trucs que vous n’avez pas vus et pleurer des larmes de sang tout en décrivant des violences imaginaires, lisez comme un autoportrait le « Paradoxe sur le Comédien » de Diderot.

Si vous êtes climatotruc ("réaliste" ou "sceptique"), lisez "Le principe responsabilité" de Hans Jonas, et méditez longuement l'impératif "In dubio pro malo".

Si vous êtes de ceux qui se demandent s’il eût mieux valu, pour Harvey Weinstein, de ne jamais se faire prendre, lisez dans le Gorgias le moment où Socrate explique à Polos qu’il vaut mieux «subir une injustice que la commettre».
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Si vous êtes cocu, lisez Guitry. Vous y apprendrez que c’est de votre faute.
Si vous êtes infidèle, lisez Guitry. Vous y apprendrez que vous êtes aussi cocu.

Si vous ne savez comment quitter La femme – ou l’homme - que vous n’aimez plus, lisez encore Guitry : « Allons, faisons la paix, veux-tu ? Séparons-nous. »

Si vous en avez marre d’entendre les gens s’étonner qu’un criminel ait eu, jusque-là, « l’air tout à fait normal » (comme s’il fallait avoir une gueule de monstre pour en être un), lisez « Eichmann à Jérusalem » de Hannah Arendt.

Si vous êtes encore communiste, lisez l’Opium des Intellectuels de Raymond Aron (si vous en avez le courage).

Si vous êtes encore gilet jaune, lisez Claude Ponti.

Si, dans l’examen de la beauté d’une femme, les jambes sont toujours ce que vous écartez en premier, lisez Casanova.

Si vous êtes un homosexuel radieux, combattant et libre, lisez les Nourritures terrestres, d’André Gide.

Si vous êtes un homo honteux, ou si l'homophobie ressemble à vos yeux à l'antisémitisme, lisez Sodome et Gomorrhe.

Si vous avez été séduit, au moins une fois, par l’argumentation de @ericcoquerel, de @thomas_guenole, de @MadjidFalastine ou de @GilbertCollard lisez « La ferme des animaux » de George Orwell, et concentrez-vous sur le personnage de Brille-Babil.

Si vous êtes complotiste, lisez le début de la Prisonnière de Proust, où le Narrateur décrit une méprise anodine de Bloch, qui résume la pathologie dont vous souffrez.

Si vous n’arrivez pas à faire confiance à quelqu’un qui est incapable de mentir, ou si vous prenez la franchise à tout prix pour un signe d’amitié, plongez-vous dans la querelle Kant-Constant sur le droit de mentir…

lepoint.fr/dossiers/hors-…

Si vous avez tendance à imaginer votre propre cadavre dévoré par des vers – sans vous apercevoir que c’est une façon de faire comme si vous n’étiez pas mort en mourant… Lisez "De la nature des choses" de Lucrèce.

Si vous croyez aux vertus du cannabis thérapeutique, lisez le chapitre 49 du Tiers-Livre (Rabelais) et son éloge du « Pantagruelion ».

Si vous voulez lire dans l’avenir (maintenant qu’il est passé), lisez Moby Dick.

Enfin, si vous aimez gagner du temps, lisez « A la recherche du temps perdu ».
Et, tel Sisyphe, à la toute fin, recommencez. 😉