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Chapitre 6 de notre thread sur la triste comédie des derniers jours de la monarchie !
Le 5 mai 1789, le roi, peu à l'aise en art oratoire, prononce un discours dans une salle monumentale et comble : sa famille, le public, et plus de 1150 députés venus pour une lutte historique.
Le 5 mai 1789, le roi, peu à l'aise en art oratoire, prononce un discours dans une salle monumentale et comble : sa famille, le public, et plus de 1150 députés venus pour une lutte historique.
Pour rappel, le thread a commencé ici —>
Et le chapitre précédent (le 5) se trouve ici —>
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L’esprit de division remarquable de la cérémonie d'ouverture, la veille, ne concerne pas que les députés du tiers. Le clergé se divise lui-même entre haut clergé et bas clergé, les premiers étant conservateurs, les autres plutôt libéraux.
Le 5 mai, lors de la première séance des états généraux, des curés disputent les bancs de devant aux évêques, et ne s’inclinent que lors de l’arrivée au premier rang du cardinal de la Rochefoucauld, seul cardinal des EG.
Le seul député du tiers à être paysan rejette l’uniforme de son ordre et vient habillé en fermier, sous les applaudissements du public venu en nombre dans les tribunes.
Mirabeau arrive. Il s’est fait une réputation (pas volée) de coureur de femmes des autres ; il s’assoit, les députés autour se relèvent et vont s’installer plus loin du personnage, qui préfère en rire, surtout lors du retour de ses voisins à ses côtés, faute de place suffisante.
Ambiance entre le roi et le duc d’Orléans son cousin : ce dernier siège avec les députés nobles, snobant la famille royale ; il se justifie en affirmant que son dévouement pour Sa Majesté s’y verra bien davantage ; le roi lui répond : « C’est ce que votre conduite m’apprendra ».
Une voiture, quatre rois : le roi monte en voiture pour se rendre à la première séance, avec ses deux frères et le jeune duc de Chartres (16 ans). C’est la dernière fois que les futurs Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe se croisent tous les trois...
Louis XVI entre sous les applaudissements. Contrairement aux EG de 1714, le tiers n’a pas à s’agenouiller, preuve que l’esprit de hiérarchie semble déjà bien entamé. « Tout le monde aurait trouvé cette action ridicule, en désaccord avec les idées du temps » (Mme de Staël).
Le roi, aussi, n’a clairement pas la prestance de Louis XIV. Mme de la Tour du Pin décrit un homme qui « se tenait mal, se dandinait. Ses mouvements étaient brusques et disgracieux, et sa vue, extrêmement basse, (...) le faisait grimacer ».
Le discours d’un roi. Celui-ci rappelle le but des EG : l’assainissement des finances, par des lois créées avec le concours des États généraux. Cette idée met en tête des députés que les EG partagent un pouvoir législatif avec le roi, une brèche énorme dans l’idée d’absolutisme.
Élargissant encore la brèche, Louis XVI emploie l’expression « représentants de la Nation » en parlant des députés. Les partisans d’une monarchie constitutionnelle, révolutionnaires de la première heure, et guillotinés de la dernière, pensent que le roi accèdera à leurs idées.
Le roi achève, remet son chapeau, signe à la noblesse qu’elle peut en faire autant. Les députés du tiers se couvrent aussi, marquant l’égalité à laquelle ils aspirent, mais on leur dit de se découvrir. Le roi, solidaire du tiers, se découvre pour que personne n’ait de chapeau.
Au tour de Necker de parler. Le ministre salue profondément le roi, plus discrètement les deux ordres majeurs, puis s’incline encore plus démonstrativement devant le tiers que devant son roi…
Ces courbettes ne changent pas grand-chose : le tiers voit Necker ne parler que de dette, alors que les députés viennent changer le pays entier ; et lorsque l'orateur fait remarquer que leur présence n'est due qu'à ses efforts auprès du roi, leur réaction se résume ainsi :
Necker promet le sacrifice à venir de la noblesse et du clergé concernant la fin de leur privilège fiscal, mais demeure flou sur la façon de délibérer là-dessus. Ce manque de prévoyance sur les procédures fut la cause de bien des malheurs, nous le verrons…
Le discours dure trois heures. Quelques applaudissements l’ont entrecoupé, mais il s’achève dans un silence glacial : personne n’est satisfait, tout le monde est ennuyé. « Je crois n’avoir jamais éprouvé tant de lassitude que pendant le discours de M. Necker » (Mme de Gouvernet).
Necker essaie de préparer tout le monde à des délibérations communes entre les ordres sur certains sujets (sinon, à quoi bon avoir un tiers deux fois plus nombreux que les autres ordres ?), encore un débat qui empoisonnera la suite des états généraux.
Le roi se retire sous les vivats ; la Reine se lève, fait une révérence d’une grâce majestueuse, puis une seconde, sous un redoublement d'acclamations. Un peu d’élégance peut faire oublier bien des rancoeurs…
Le 5 au soir donc, Le couple royal se rend au Salut du Saint Sacrement, puis à Meudon, rendre visite à leur fils toujours gravement malade.
C’est la fin de notre fil ! La suite se penchera plus synthétiquement sur le joyeux bordel qui commence entre députés ; après cette journée des discours du pouvoir, la boîte de Pandore s'ouvre.
