On continue notre série d'articles consacré à la Peste noire. Aujourd'hui, épisode 3 : « Raison garder face à la peste ». Alors que la maladie dévaste les villes et cause des millions de morts, comment réagissent les individus et les autorités ? Un thread ⬇️ ! #histoire 
Écrit à la même époque, le Decameron de Boccace donne un tableau très vivant de la panique engendrée par la peste à Florence : « presque tous les esprits tendaient à une même fin, qui était de fuir les malades ».
Pour ça, les solutions sont très diverses : « certains formaient leur groupe et se rassemblaient dans des maisons retranchées » tandis qu'au contraire d'autres « professaient que bien boire, se réjouir, rire et se moquer de ce qui advenait était un remède infaillible »
Ceux qui en ont les moyens quittent les villes, à l’image des dix jeunes héros de Boccace, tous issus de la haute société florentine, qui se réfugient dans la campagne toscane. Ce qui n'est pas sans rappeler l’effervescence dans les gares parisiennes lundi... !
Les rumeurs courent que juifs et lépreux auraient empoisonné les puits ; et ce, malgré le démenti formel du pape Clément VI, qui rappelle que ce fléau les touche autant que les chrétiens. (image : géniale bd "Le temps est proche" de C. Hittinger)
D’autres y voient l'effet d’un châtiment de Dieu. Le mouvement des flagellants, qui pensent expier leurs péchés en se mortifiant lors de processions publiques, avait déjà connu un premier essor au milieu du XIIIe siècle ; mais il reprend de plus belle.
Ces désordres mettent les autorités au défi de trouver des solutions. Au Moyen Âge comme aujourd’hui, c’est de la science que les autorités attendent des réponses. Dès octobre 1348, le roi de France Philippe VI demande l’avis des médecins de l’université de Paris
Ceux-ci concluent que la conjonction exceptionnelle des trois planètes supérieures (Saturne, Jupiter et Mars) dans le signe du Verseau en 1345 aurait entraîné une corruption de l’air, laquelle serait à son tour à l’origine de la peste.
Vue de notre époque, cette explication astrologique semble fantaisiste, mais en réalité elle est à la pointe de la science de l'époque. Les médecins écartent sciemment l’hypothèse d’un châtiment divin pour expliquer scientifiquement l’épidémie
Médecin à Avignon et au service du pape, Guy de Chauliac est l’un des chirurgiens les plus célèbres de son temps. Dans sa Grande chirurgie, composée vers 1360, il détaille certains des remèdes élaborés pour combattre la peste
Pour prévenir la malade, il faut « se purger, purifier l'air par le feu, fortifier le cœur par des fruits et de la bonne odeur ». Pour guérir les malades, il préconise des saignées, des sirops toniques, conseille de cautériser les bubons. Tout est basé sur la théorie des humeurs
Mais ces traitements s’avèrent largement inefficaces. Guy de Chauliac dit que c'est la honte des médecins et donne raison aux dix Florentins du Decameron : car « pour la préservation, il n’y avait rien de meilleur que de fuir la région avant d’être infecté ».
Quelques décennies plus tard se mettent en place les premières quarantaines, seul moyen d’endiguer la pandémie. Car au Moyen Âge comme aujourd’hui, un seul mot d’ordre efficace : #RESTEZCHEZVOUS ! La suite, au prochain épisode !
