Thread by @Bunker_D_

Découpage d'un tract.
Ça commence bien, dès le titre. Pour voir des coquelicots, il suffit de sortir des villes à la bonne période de l'année. Cf le hashtag #mescoquelicots.

https://twitter.com/Bunker_D_/status/1039590668774060032

Comme le souligne @GeWoessner, le coquelicot n'est pas menacé. Le fait sacrifié sur l'autel de la comm'.
Pourtant il y a à critiquer : sur 102 plantes messicoles, 7 sont disparues, plus de la moitié en situation précaire. On a besoin d'une environnementalisme du vrai.

Tous les pesticides ne tuent pas toute chose, du moins jusqu'à preuve du contraire pas dans les quantités actuellement utilisée.
Parler de "les pesticides" comme un tout homogène empêche de penser la situation dans toute sa complexité, et permet un discours catastrophiste.

Il suffit alors d'omettre la notion de dose en dénonçant l'omniprésence des résidus.
La manœuvre n'est pas nouvelle, je l'ai déjà été critiquée : bunkerd.fr/chiffres-rassu…

Comme excuse (quand on en trouve une), l'effet cocktail ou la perturbation endocrinienne. Le premier implique simplement de revoir certaines limites à la baisse (pas toutes : la synergie n'est pas systématique). journals.plos.org/plosone/articl…

L'EFSA travaille à une meilleure intégration de ces réalités. L'inquiétude est limitée grâce aux marges déjà existantes.
efsa.europa.eu/fr/press/news/…
efsa.europa.eu/fr/press/news/…
efsa.europa.eu/sites/default/…

La perturbation endocrinienne est plus compliquée. Là encore, les choses doivent être améliorées, et on y travaille. Mais on ne peut pas tout accuser d'être perturbateur endocrinien parce que ça arrange un discours.
efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.2903/j.…

Si l'on veut défendre un "zéro danger" et bannir sans indication de risque car l'indémontrable (zéro effet) n'est pas démontrer, cette stratégie fait-elle sens ? Que dire de tous les autres produits de la vie quotidienne, y compris les composés naturels des fruits et légumes ?

On repars à mettre tout dans le même panier. C'est un déshonneur par association : chaque pesticide est jugé à l'aune d'autres (car ces effets existent mais tous les pesticides ne sont forcément pas en cause).
Cette fois en plus, on tape dans le registre de la peur.

Nonobstant la pétition de principe ("ne pas être d'accord, c'est être fou"), les chiffres flippants.
Dans les faits :
- 489 substances actives sont approuvées aujourd'hui en UE pour 1381 enregistrées,
- 1975 formulations phytopharmaceutiques autorisées en France.

Lyrisme et appel aux émotions. À part ça, les pesticides ne sont pas les seuls responsables, mais ils jouent un rôle. Eux et surtout les pratiques agricoles dans lesquels ils s'incrustent.

Un insecticide risque souvent de tuer des organismes non cibles ; mais même sans herbicides, désherber désherbe.
Le désherbage mécanique serait par exemple plus responsable dans la raréfactions des messicoles, justement, que le désherbage chimique.

https://twitter.com/GeWoessner/status/1039645663443787778

A contrario, un herbicide de synthèse comme le glyphosate peut servir des pratiques efficaces dans la préservation de la biodiversité au sol. C'est souvent une question d'usages, pas d'outils. (Pas que : des produits dont des dommages colatéraux.)

https://twitter.com/Bunker_D_/status/1004294898718265344

L'appel se termine sur ce qui ressemble à une blague :
« Ah bas les pesticides ! ... Heu non, zut... Ah bas les pesticides de synthèse ! »

Bah oui. Parce que les pesticides, c'est important pour protéger les récoltes. C'est important pour l'environnement (moins de surface nécessaire), pour la santé (évitement des mycotoxines), pour l'accessibilité à la nourriture (prix raisonnables)...

Le bio aussi utilise des pesticides. Même pire : l'interdiction d'un insecticide bio, la roténone, a pu être retardée pour permettre à l'agriculture bio de trouver une alternative autre que les insecticides maintenus (refusés parce que "pas naturels").
fr.wikipedia.org/wiki/Roténone

Voilà toute l'hypocrisie (sûrement involontaire) de la démarche. Parce que les pesticides bio sont aussi concernés par tout ce qui a été dit.
Les insecticides bio sont des insecticides.
Les pollinisateurs sont concernés par le spinosad et les pyréthrines.
…gne-franche-comte.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/_Bilan…

Et la santé ? Les sections neurotoxiques de certaines pyréthrinoïdes se retrouvent parmi les pyréthrines.

https://twitter.com/Bunker_D_/status/859385904225558529

Remettons le "-logie" des sciences dans écologie.
Il faut agir pour l'environnement. Des changements sont nécessaires.
Mais ce n'est pas en caricaturant les faits, en niant les données, et en s'attachant à des dogmes (comme le rejet de la synthèse) que l'on agit justement.

Ce n'est pas en interdisant des outils a priori selon des principes fallacieux que l'on aboutit à des pratiques optimales. C'est en analysant les pratiques et les produits (tous, sans passe droit pour les "naturels"), et en travaillant à démocratiser les meilleures pratiques.

Cessons de présenter le bio comme la panacée au prétexte qu'il fait mieux qu'un conventionnel dépassé. Cessons de caricaturer le non-bio comme des "monocultures arrosées de biochimie". Parlons des pratiques agro-écologiques des agriculteurs conventionnels, et soutenons-les.

Il y a urgence pour un environnementalisme des réalités, non des fantasmes.
Il faut réagir aux problèmes tels qu'ils sont dans toute leur complexité, ne pas s'arrêter au constat d'urgence pour ensuite recommander n'importe quoi. On tape difficilement juste les yeux bandés.