Thread by @severinebv

Ok. Parlons-en, du sexisme dans la pub.
Thread (long).

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Octobre 2017.
#balancetonporc prend d’assaut nos timelines.
Le milieu publicitaire bruisse. Des comités de crise s’organisent dans des agences. Des dirigeants d’ordinaire très vocaux rasent soudainement les murs.

On chuchote. Des noms reviennent. Toujours les mêmes. On se demande, avec un mélange d’excitation et de peur, lequel sera le premier à tomber.

En parallèle, les conversations commencent. Il y a deux camps.

D’un côté, ceux qui espèrent du changement, ont encore en travers de la gorge une, deux, cents histoires qui leur donnent la gerbe.
De l’autre, le camp des « oh ça va, n’exagérons pas », « ça a toujours été comme ça », « on même peut plus rigoler ».

On se parle et des histoires remontent. Des histoires horribles que l’on avait refoulées parce que personne dans ce milieu n’a jamais agi autrement que comme si c’était normal.

Le petit milieu de la pub est à fleur de peau. Le cinéma, les médias ont commencé… c’est notre tour, non ?

Et puis, rien. Le tremblement de terre n'aura pas lieu.

De mémoire, un courageux article sur Medium, et quelques posts Facebook. C’est à peu près tout ce qui a été dit à l’époque sur le sexisme dans la pub. On a toutes et tous fermé nos gueules.

Et pourtant, tout le monde est d’accord : le sexisme est partout. Absolument partout. De la blague de couloir aux processus de recrutement, de la moindre réunion à la structure de direction des agences.

Des femmes (souvent UNE femme, faut pas déconner) au codir, ou parfois même juste un ratio de plus de 50% de femmes dans une boîte suffisent souvent aux agences à se dire que chez elles, tout va bien.

Et pourtant, on a TOUTES vu, entendu, vécu ça. Une remarque, un regard insistant, une main au cul, un message obscène, une pression sournoise, une agression. On a toutes fait attention à la façon dont on s’habillait pour éviter des remarques, ou pire.

Alors pourquoi on s’est tues ?

Ce n’est un scoop pour personne. Il s’agit autant de sexisme que de domination.

La domination d’individus souvent dans une position de pouvoir, sur des jeunes femmes souvent dans une position précaire, dans un milieu où l’on sait tous qu’il y a 30 personnes prêtes à nous remplacer si l’on ne fait pas l’affaire.

Mais aussi la domination d’un système, le fameux « tout le monde se connaît ». L’impression, souvent justifiée, que l’on se grillerait si l’on parlait. L’impression qu’il faut encaisser si l’on veut survivre d’abord, et progresser ensuite.

Dans notre milieu qui se veut progressiste, l’omerta est terrible et les structures archaïques.

La Ligue du LOL nous a montré à quel point la domination est ancrée, et comment elle se crée dans l’entre-soi dans les milieux pourtant les plus hype et les plus modernes.

Et les réactions à l’article du Monde sont à peu près toutes les mêmes : du soulagement. La satisfaction de voir ces histoires que tout le monde connaît enfin sortir. Il aura fallu une intervention extérieure.

Mais au-delà d’agissements dégueulasses, ce qui me rend malade dans cet article, c’est que l’on pressent que ceux qui agissent comme ceux qui couvrent n'ont pas aussi honte qu'ils le devraient, et que ceux qui savent ne sont pas aussi choqués qu'ils le devraient.

Les leçons de l’après-affaire-Weinstein devraient être apprises, et pourtant, on continue à accuser les femmes d’être des allumeuses et à plaider qu’on ne savait pas.

Du côté des femmes, nous continuons à avoir peur.

J’ai honte de ce milieu. De mon inaction, de notre inaction, de notre incapacité à nous indigner au-delà du cercle de nos proches.

J’ai honte pour toutes ces femmes que l’on ne sait pas écouter et qui restent parfois blessées à vie.

Alors la question c’est : et maintenant ?
On fait quoi, maintenant ?

Je ne prétends pas avoir la réponse.
Si c'était facile, on l'aurait déjà fait.
Commençons par parler. Mes DM sont ouverts.