Thread by @Panda31808732

1. Suite aux propos de Thuram sur les Blancs et le racisme, on a vu ce zigoto, présenté comme un « militant anti-raciste », être invité dans quelques médias pour dénoncer le « racisme anti-Blancs ». Mais qui est-il et d'où parle-t-il ?

2. Monsieur de Béchade, qui se présente comme « militant antiraciste » et « humaniste », a cofondé fin 2017 l'association OLRA : « Organisation de Lutte contre le Racisme Anti-blanc ».

lepoint.fr/societe/une-as…

3. L'OLRA se présente comme une organisation « universaliste, apolitique et laïque ». Elle dit être indépendante, nie tout lien avec l'extrême-droite — qui porte historiquement ce thème du « racisme anti-Blancs » — et affirme ne pas être une association identitaire.

4. Quand on tape le nom de Monsieur dans un moteur de recherche, on voit qu'il n'est pas très connu, et que c'étaient essentiellement des sites d'extrême-droite qui avaient été intéressés par sa démarche (p. ex. on le retrouve chez Novopress, NDF, Boulevard Voltaire).

5. En décembre 2013, Valeurs actuelles avait commandé à l'Ifop un sondage sur le « racisme anti-Blancs ». Ô surprise, plus l'on va vers la droite du spectre politique, plus l'on estime que « le racisme anti-Blancs est assez répandu en France ».

ifop.com/wp-content/upl…

6. Le site de l'OLRA ne présente aucune étude, aucun travail sourcé, aucune antenne locale. Tous les passages médias que l'on y trouve sont ceux de Laurent de Béchade. Il y a littéralement 2 personnes à la page « qui sommes-nous ? » — plus Goldnadel, un avocat d'extrême-droite.

7. Bref, cette « association » ressemble fort à une coquille vide pour promouvoir son fondateur et lui fournir des titres ronflants. A-t-elle même des adhérents ? Des locaux ? Où est son bilan d'activités annuel ? Comment se fait-il que seul Monsieur parle dans les médias ?

8. Quant à son parcours : « Ancien conseiller de la Banque Transatlantique, M. de Béchade – qui affiche également ses liens avec l’OLRA sur le réseau professionnel LinkedIn – serait un membre de la famille de Béchade, issue de la noblesse française. »

parismatch.be/actualites/soc…

9. Ah ! Cette famille de Béchade-là ?… Si c'est le cas, on ne pourra pas dire que ce garçon n'a pas de la suite dans les idées… ;) [Bon sang ne saurait mentir]

10. Voyons ce qu'il raconte en janvier 2018 sur Boulevard Voltaire (site d'extrême-droite). L'entretien s'intitule : « Le racisme anti-blanc prend une ampleur conséquente ». Il vient de fonder son « association », on lui demande donc de présenter le projet.

11. On lui demande ce qu'il entend par « racisme anti-Blancs ». Après une non-réponse initiale en 9 lignes, il finit par dire que : « Le racisme anti-blancs est une projection, des préjugés et des stéréotypes qui sont attachés à la couleur de peau. »

12. Quels sont ces stéréotypes et ces préjugés ? lui demande-t-on alors. Voici la réponse. Attention les yeux, ça éblouit.

13. On touche au sublime. Observez l'extrême degré de confusion : pour lui, dire que les Blancs sont avantagés dans une société raciste où le Blanc incarne la norme, c'est non seulement raciste, mais c'est carrément l'équivalent de l'antisémitisme des années 30. Mais encore ?

14. La notion de « privilège blanc », forgée aux États-Unis par des antiracistes, désigne en gros l'ensemble des avantages dont bénéficient, toutes choses égales par ailleurs (important !), les Blancs comparés aux autres dans les sociétés où les Blancs sont la norme.

15. On pense ce qu'on veut de la notion, mais elle ne désigne jamais que le fruit passif d'un système de domination. Rien à voir avec le triptyque-type du racisme : altérisation négative, essentialisation et infériorisation de l' « Autre » ainsi créé (avec discriminations, etc.).

16. Dire que les Blancs bénéficient d'avantages dans une société raciste où ils occupent (en tant que groupe) le sommet de la hiérarchie n'est pas raciste, dire que les hommes bénéficient d'avantages dans une société patriarcale n'est pas sexiste, etc.

16b. C'est simplement la conséquence logique de rapports sociaux inégalitaires qui fonctionnent à leur avantage, et que l'on peut d'ailleurs facilement mesurer : représentation, distribution du pouvoir et des ressources (matérielles ou symboliques), etc.

17. La position de L. de Béchade revient en fait à dire que nommer la domination et le groupe qui occupe la place au sommet, c'est discriminer ce groupe... Ça n'a aucun sens.

18. En regardant la tonalité idéologique de ses messages récents sur son compte Twitter, on voit rapidement qu'on arrive dans des eaux bien droitières. Quelques exemples parmi d'autres...

19. Ici, un classique de l'antiféminisme : les féministes jalouses qui s'attaquent par aigreur à la Vraie Féminité. Ah, ces maudites sorcières qui tentent toujours de détruire la Nature Profonde de La Femme… ;) [Au bûcher !]

20. Un suprémaciste blanc commet un attentat raciste contre des hispaniques aux États-Unis après avoir laissé un manifeste où il loue d'autres attentats suprémacistes et reprend le fantasme raciste du « grand remplacement ». Réaction de Monsieur ?

21. Ce type est quand même très fort : il dit littéralement qu'il faut parler d'un attentat suprémaciste… mais il ne faudrait pas préciser la couleur, alors que l'auteur la revendique et que c'est le motif même de son attaque. Le dire serait même raciste ? Incroyable…

22. En parcourant ses messages, on trouve divers RTs ou reprises de l'extrême-droite : Bercoff, Goldnadel, Rieu, Valeurs actuelles. Mais ce RT de Bercoff est peut-être un auto-diagnostic des chasseurs du « racisme anti-Blancs » ?

23. Le RT de Valeurs actuelles est assez rigolo… En pensant documenter le phénomène, ils se sont bien ridiculisés. Même pas 4 messages « racistes » de l'heure sur un réseau qui compte des millions d'utilisateurs actifs… Quel torrent !

24. Sachant que la plupart de ce qu'ils appellent « messages racistes » sont de simples gamineries généralisantes — si vous avez du temps à perdre, voyez par vous-même sur le lien ci-dessous, leur « florilège » est tout simplement consternant…

https://twitter.com/Valeurs/status/1166993183986847744

25. [Note : la « cofondatrice » de l'OLRA nage dans les mêmes eaux idéologiques.

« Les colons d'hier seront les esclaves de demain », Ardisson a été débarqué de la télévision à cause du « racisme anti-Blancs » … Ça vous pose un profil. À chaque cause ses grands martyrs…]

26. Ici, une belle récup' dégueulasse, digne de la fachosphère — qui avait d'ailleurs fait campagne sur le même « argument » à l'époque…

27. Un exemple de désinformation, trouvée sur son LinkedIn où il a « aimé » plusieurs tribunes de son camarade Goldnadel (qu'il RT assez souvent) dans le FigaroVox. Si on clique sur celle à droite de la deuxième ligne, on tombe sur l'intox d'extrême-droite suivante…

28. Neill Irvin Painter, autrice US de « Histoire des Blancs », avait dit dans l'émission Quotidien : « Le blanc est stupide, il ment, il est corrompu, il harcèle les femmes… »

Goldnadel s'insurge et chouine sur le déni du racisme anti-Blancs, etc.

lefigaro.fr/vox/societe/20…

29. Mais d'où venait cette citation soigneusement isolée, avec coupure des phrases précédentes qui en expliquaient le sens ? De la fachosphère, évidemment. Quotidien montre ici les comptes d'extrême-droite dont l'intox était partie.

tf1.fr/tmc/quotidien-…

30. En resituant la phrase dans la séquence, on voit que Mme Painter parlait en fait de Donald Trump. On parle de plus d'une autrice dont le français n'est pas la langue maternelle, ce qui peut évidemment susciter quelques imprécisions de langage.

francesoir.fr/culture-m%C3%A…

31. C'est quand même fou : tous ces gens nous certifient que le « racisme anti-Blancs » est un phénomène massif et en expansion — mais alors, pourquoi ont-ils besoin de bidonner et manipuler des propos pour fabriquer leur adversaire ? Auraient-ils du mal à le trouver autrement ?

32. En résumé, on a donc un type militant sur un thème traditionnel d'extrême-droite, inséré dans un écosystème d'extrême-droite, aimant des articles d'extrême-droite et maniant une rhétorique et des idées bien à droite (pour être gentil). À part quoi il est « apolitique » … ;)

33. Venons-en maintenant à ses propos sur Cnews et au chiffre du « racisme anti-Blancs » qu'il brandit : « 1 personne blanche sur 7 » en aurait été victime (de 1:00 à 1:31 dans l'extrait ci-dessous).

34. Monsieur nous met au défi de le réfuter à partir de l'étude TeO [Trajectoires et Origines] 2016 de l'Ined. Eh bien allons-y…

Dossier de presse : ined.fr/fichier/s_rubr…
Chapitre 15 : ined.fr/fr/publication…

35. Le « 1 sur 7 » qu'il évoque vient de ce tableau, dans lequel 15% de la « population majoritaire non paupérisée » déclare avoir subi du racisme explicite. Premier hic, « population majoritaire » ne veut pas exclusivement dire « Blanc » ; second problème, c'est du déclaré.

36. Population majoritaire signifie en gros « né Français en France métropolitaine de parents eux-mêmes nés Français », donc sans ascendance migratoire directe. (Plus quelques autres situations, mais peu importe ici.)

36b. L'Ined n'utilise pas la notion de « Blanc ». L'étude a affiné et enlevé certains sous-groupes (ex. juifs, musulmans) pour bâtir la catégorie « population majoritaire non paupérisée », mais on n'a pas directement affaire au groupe « Blancs », ça reste une approximation.

37. Ensuite, c'est du déclaré. On a simplement demandé aux gens s'ils avaient subi du racisme, sans leur proposer de définition. Or le mot connaît des définitions très amples. L'étude suggère ainsi que les pauvres ont pu répondre oui en pensant à du « racisme anti-pauvres ».

38. Mieux encore : d'après l'étude elle-même, des membres de la population majoritaire contrariés d'avoir été appelés « sale raciste » peuvent avoir déclaré… avoir subi du racisme. On ne connaît pas la fréquence mais c'est assez cocasse pour être souligné.

39. Que resterait-il donc des 15% déclarés par la « population majoritaire non paupérisée » une fois retirés les non-Blancs qui y figurent encore et les erreurs d'interprétation (ex. les racistes vexés d'avoir été épinglés comme tels) ? Mystère.

40. Maintenant, astuce de charlatan pour aboutir au résultat « le racisme anti-Blancs est le premier racisme en France ». Simplifions et imaginons un pays de 67 millions d'habitants avec, disons, 80% de Blancs, 10% d'Arabes et 10% Noirs.

41. Mettons que 15% des Blancs déclarent avoir subi du racisme, un chiffre qui monte à 50% pour les Arabes et 60% pour les Noirs. Les Blancs sont donc bien moins touchés en proportion. Oui, mais comme ils sont très majoritaires, ils sont plus nombreux en volume.

42. Dans cet exemple fictif, cela ferait respectivement 8 millions de Blancs touchés, 3,4 millions d'Arabes et 4 millions de Noirs.

Résultat : le « racisme anti-Blancs est la forme de racisme la plus répandue ».

Du bon usage des chiffres, entre volume et proportion…

43. Mais L. de Béchade a la lecture bien sélective de cette étude, car d'autres passages sont plus clairs — et sans avoir besoin d'une interprétation idéologiquement orientée. Ainsi, la synthèse de l'Ined stipule bien que ces deux expériences n'ont en réalité rien à voir.

43b. Même si l'Ined n'utilise pas directement des catégories comme « Blancs », « Noirs », « Asiatiques », etc., on peut voir à quelles origines est liée l'expérience du racisme (ici, au travail).

44. Extrait de la conclusion du chapitre 15 consacré au racisme et aux discriminations.

45. Dans cette étude, l'Ined insistait bien sur le fait que le « racisme de réaction » touchant les « majoritaires » n'avait pas de caractère institutionnel, n'affectait pas leurs conditions d'existence matérielles et ne faisait pas système.

Source : liberation.fr/france/2016/01…

46. Donc non seulement les « preuves » que L. de Béchade avance n'en sont pas vraiment, mais l'Ined en conclut l'exact inverse de ce qu'il raconte : phénomène « sans commune mesure » et de nature différente. L'un des chercheurs interrogés le rappelle ici.
liberation.fr/checknews/2019…

47. C'est une stratégie classique de l'extrême-droite de procéder à des retournements rhétoriques sans le moindre sens concret pour semer la confusion et renverser la réalité, en prétendant que le terme dominant d'une relation est en fait dominé et inversement.

48. Exemple : aux États-Unis, des militants d'extrême-droite ont récemment organisé une « marche des fiertés hétérosexuelles » à Boston. Leur mot d'ordre était : « Les hétérosexuels sont une majorité opprimée. »

lefigaro.fr/international/…

49. Si les concepts de « racisme anti-Blancs », « sexisme anti-hommes », etc., ne sont pas pertinents dans notre société, c'est parce que des rapports sociaux asymétriques depuis des siècles ne sont, par définition, pas réversibles en un claquement de doigts.

50. Que le premier charlatan venu puisse passer dans des médias de masse en rebondissant essentiellement sur des polémiques lancées par l'extrême-droite en dit long sur le niveau consternant du paysage médiatique français…

À l'avenir : moins de Colgate, plus de sérieux — merci.