Thread by @Soul_Brotha

Le programme du Paris Podcast Festival est tombé hier et j'estime qu'on peut quand même déplorer le fait qu'il symbolise à ce point le rétrécissement du monde du podcast français et sa structuration à marche forcée en "studios de production".
(ceci est un thread)

Le podcast est le medium le plus décentralisé possible : quelques micros et un PC suffisent à produire quelque chose qui demande surtout de l'imagination, du talent et du travail.

Alors permettez-moi de déplorer que la structuration du podcast français se fasse autour de quelques grandes structures, montées par des journalistes, basées dans une seule ville et que le modèle de financement soit principalement celui du branded content.

Il est devenu quasiment impossible de monter un podcast à partir de 0 sans ce qu'on appelle un "relais de notoriété". Autrement dit, il faut déjà être connu et connaitre des gens connus pour avoir une chance d'obtenir du succès.

(Disclaimer: je dis même pas tout ça pour mes petits projets, je suis très content et même étonné de leur réception. Je fais ça avant tout pour le plaisir de créer des choses qui me font rire et m'émeuvent)

Au final, on se retrouve aujourd'hui avec un catalogue de podcasts extrêmement ramassé. Les studios se tirent la bourre et se copient les uns les autres, plus ou moins. Tout le monde doit avoir ses podcasts de genres, de société, de bouffe, de culture, de reportages...

J'ai rien contre ça et après tout, ces podcasts trouvent incontestablement un public. Mais quand même ! Ne pourrait-on pas trouver plus de variété dans cet immense champ d'exploration ? Je pense que si.

Si peu de podcasts me font rire, m'intriguent ou ne serait-ce que m'intéressent. Certes, je suis chiant mais c'est si dur que ça d'avoir des idées ou ne serait-ce que de la tchatche ? Pour moi, le champ des podcasts est comparable à l'ouverture des radio libres dans les années 80

Pour quelle raisons ces studios doivent tous se trouver à Paris ? Au nom de quoi le podcast devrait suivre le chemin de tous les autres médias ? C'est à dire rester dans une logique de réseautage et de microcosme. Et pourquoi faudrait-il du financement, d'ailleurs ?

Binge, Nouvelles Ecoutes, Louie et les quelques autres ont le mérite de démocratiser le podcast, donner des moyens à des gens de monter des projets. Mais la rançon de ce succès est une terrible standardisation de la création... et de la génération de revenus.

En passant, une pensée pour Henry Michel qui a porté plus loin que n'importe qui le projet d'une production décentralisée faisant des pieds de nez à Paris. Ca n'enlève rien à ce qu'on peut lui reprocher sur vous-savez-quoi mais cette réussite là est, pour l'instant, unique en Fr.

Immense respect aussi pour des gens comme Anouk Perry, Daniel Andreyev ou la team Fréquence Moderne qui ont prouvé et prouvent encore qu'on peut proposer d'autres idées, d'autres modèles, d'autres façons de parler dans le micro.

On avait (et on a encore !) l'opportunité de créer des programmes indépendants, innovants mais non, il a fallu créer des sources de revenus, se rendre dépendant d'annonceurs et de "business model" (en attendant des prises de parts dans les studios qui ne manqueront pas d'arriver)

Et bien sûr, il a fallu centraliser, standardiser, confisquer dans des structures dures d'accès un mode de création qui pouvait se faire partout, tout le temps, par n'importe qui. Ne me parlez pas de "méritocratie". Dans le podcast comme ailleurs ça n'existe pas.

De toute façon là, plein de grands médias tradi se mettent au podcast et vont utiliser leur rouleau compresseur pour tout bouffer à terme. Les studios seront mis en péril par ce qu'ils ont crée. Ils seront contraints de multiplier les branded contents. É finita la commedia #fin