Thread by @ClaudeGuibal

La Syrie, tombeau des institutions internationales... (à dérouler...)
#ghouta #edito
Je me permets de copier ici le texte de mon édito diffusé sur @franceinter cette semaine..

Depuis plusieurs jours en effet, mon téléphone vibre chaque minute. Ce sont les notifications du groupe whatsapp dont je fais partie, comme de nombreux autres journalistes, français et internationaux. En sont membres aussi des habitants et des soignants de la Ghouta.

Leurs témoignages tombent, les uns après les autres, dans la mémoire de nos smartphones. Des bouteilles jetées à la mer d'Internet.

Depuis sept ans, le conflit syrien a entrainé le monde dans des ténèbres telles qu'on en a aujourd'hui oublié les premiers échos. Comme ces gamins de Deraa, emportés par le souffle des printemps arabes, qui en 2011 ont écrit sur un mur, à la sortie de l'école "mort au dictateur".

Leur corps supplicié, rendu à leur parents qq temps plus tard... Cette horreur qui a cristallisé les colères et fait peu à peu entrer la Syrie dans la spirale de la folie meurtriere, la torture, les gaz, la terreur, le jihadisme, la barbarie.

Le conflit syrien soulève, chez tant d'entre nous, un sentiment de compassion sûrement, de révolte peut- être, de culpabilité injuste pour certains, d'incompréhension,mais surtout d'impuissance, de résignation triste devant la répetition des faits, d'abandon...

.... ce "oui, mais que faire, quelle solution. Il est trop tard... "
A chaque Verdun, Auschwitz, Srebenica, Alep, et tant d'autres lieu de souffrances, à chaque petit Aylan mort sur une plage, on dit plus jamais cela.

On l'a dit après la 1ere guerre mondiale, dont on commémore la fin cette année. Plus de 18 millions de morts...
Pour éviter que cet enfer ne recommence, on a crée la Société des Nations...

Un espace de résolution de conflit qui faute de mécanisme contraignant, n'a servi à rien devant la surenchère folle d'Hitler et Mussolini...

Alors, à la fin de la 2e guerre mondiale, on a donc crée les Nations Unies, avec cette fois, des outils, comme le conseil de sécurité, les casques bleus etc, censés aider à faire respecter le droit international...

Puis avec les guerres d'indépendances, et la multiplication des guerres asymétriques, on a aussi précisé les règles de la guerre. Des protocoles ont été ajoutés aux conventions de Geneve, pour indiquer les lignes rouges...

Ne pas cibler les populations civiles, ni les infrastructrures qui permettent sa survie...
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Tout cela est réduit à néant.

On cible les marchés, les boulangeries, les hôpitaux. On coupe l'eau, les routes d'approvisionnement, on affame. On terrorise, on instrumentalise les peurs.

Avec l'abandon de la communauté internationale, la militarisation de la révolte, la radicalisation de toutes les partie, l'implication des puissances régionales, l'entrée en scène des jihadistes, toutes les lignes sont brouillées en Syrie.

En Syrie, chez les belligérants, oui, il n'y a plus de monopole des gentils ou des méchants. La complexité est telle qu'on ne veut plus regarder...

Les jeux d'alliances sont devenus fous, comme avec kurdes, qui se battent contre le régime syrien à Deir Ezzor mais s'allient avec lui contre les Turcs à Afrin...

Alors oui, la guerre en Syrie, c'est vraiment le tombeau des institutions internationales...

L'invasion de l'Irak en 2003 par les Etats Unis l'avait déjà montré, la Syrie confirme l'inutilité totale des Nations Unies dès lors qu'un pays doté du droit de véto est impliqué dans un conflit, comme ici la Russie...

Cette guerre, c'est aussi le linceul de la realpolitik... Ce concept géopolitique selon lequel on peut accepter de sacrifier des considération éthiques si cela sert une stratégie d'intérêts à court, moyen ou long terme..

Mais en Syrie les concessions faites à la morale et la dignité n'ont produit AUCUN effet positif...

Elles n'ont rien empêché, ni la barbarie, ni la contagion de l'instabilité, ni l'indignité, ni les millions de réfugiés qui, soyons réalistes, ne rentreront pas chez eux.
Et cela, il faudra bien, un jour, accepter d'y réfléchir.