Thread by @GingerForce1

Je passe en speed avant de retourner dans ma grotte.
Suite à mon thread d'hier, j'ai discuté avec plusieurs personnes, elles-mêmes ace et/ou aro, ce qui a apporté quelques réponses mais aussi soulevé d'autres questions. On m'a notamment dit que le terme MOGAI était plus inclusif

que celui de LGBT+, mais que tout le monde ne l'aimait pas forcément pcq justement il accueillait pas mal de gens (comme potentiellement des aro hétéro cis), quitte à diluer les identités dans un gloubiboulga dépolitisé.

J'ai aussi demandé si, pour ces militant.e.s, tout ce qui n'était pas hétéro et cis devenait automatiquement part de la communauté LGBT, et là ça a été beaucoup plus flou. Certain.e.s me disent que oui, pcq tout ce qui sort de la black box est de facto discriminé ;

d'autres me disent que non, pcq ça dilue les luttes LGBT, est super dépolitisant, et fait de l'auto-définition une valeur centrale, ce qui empêche de s'organiser en classes et en luttes.

Hier soir, j'ai vu dans mes mentions que plusieurs personnes m'avaient dit que c'était à cause de gens comme moi que les communautés LGBT n'étaient pas safe. Mais... elles ne l'ont jamais été ? On a toujours eu des viols, des agressions sexuelles, des violences, des TERF, ou

juste, simplement, des divergences d'opinion ? Je ne vois pas ce que les communautés LGBT ont à voir avec les espaces affinitaires ; ce sont des groupes humains pouvant reproduire des schémas excluants violents, et qui n'ont jamais été, par définition, des safe space

Ces dernières années on a beaucoup mis l'accent sur l'auto-définition au sein de la communauté LGBT, peut-être justement en oubliant qu'à la base, ces définitions étaient imposées. On était "normal" (= hétéro et cis) ou "déviant", "sodomite", "malade" etc

On n'était pas LGBT par choix, on l'était pcq on était mis.es au ban, qu'on subissait des viols, agressions etc, pcq on n'était pas hétéro et/ou cis. Cette catégorisation elle a été imposée par celleux qui n'étaient pas LGBT et qui ne subissaient pas les

violences liées à ça ; du coup, je trouve que faire de l'auto-définition une valeur centrale, ça empêche de se voir en tant que groupe social

De +, je vois pas mal de personnes ace se définir "ace et bi" ou encore "lesbienne ace". Donc, "ace", c'est quoi ? L'absence de sexualité au sein d'une relation amoureuse ? Une orientation sexuelle en elle-même ? Du coup, on peut être cis het et ace ? Et... faire partie des LGBT?

On peut aussi prendre le truc à l'envers : dire qu'être lesbienne c'est coucher avec des meufs, ça n'a pas de sens pcq que tu couches ou non c'est de la lesbophobie / homophobie que tu vas te ramasser, pas de l'acephobie

Canoniquement, on a défini les personnes comme LGBT sur la base de leur orientation sexuelle et/ou leur identité de genre. En gros. C'est pour ça qu'introduire une notion de dimension amoureuse (comme ce que m'ont dit certain.e.s ace), je trouve ça confus

parce que ça revient à remettre en cause la nature de l'engagement de toutes les personnes ayant milité pendant des décennies au sein des luttes LGBT, et à potentiellement inclure des ace mais cis het dans celles-ci

Je me permets de rappeler également que je suis une mamie dans le milieu comparé à certain.e.s ici. Je vais sur mes trente ans, ça fait 17 ans que j'ai fait mon premier coming-out, et ça fait 14 ans que je milite de plein de manières différentes dans les milieux LGBT

Donc on ne se ressemble pas, nos luttes et notre vocabulaire non plus, pas nécessairement.

Par exemple : je trouve super pourri le débat "bi / pan". Je me considère comme bi (et je sais que je ne suis pas la seule) parce qu'au moment de mon premier coming-out, on ne parlait pas

de pansexualité, mais de bisexualité, et qu'à ce moment-là c'était ce qui se rapprochait le plus de ce que je ressentais. Du coup je trouve ça super insultant de venir dire aux bi que ce sont de vilain.e.s intolérant.e.s pas assez inclusif.ve.s alors que ces critiques

viennent des mêmes personnes qui placent l'auto-définition comme valeur centrale...?

Je crois que vous n'avez pas idée d'à quel point les milieux militants sont devenus flippants. Avant, on se battait contre des collègues qui tenaient des propos transphobes ou harcelaient des militantes, maintenant on tient des compétitions de wokitude

On a tou.te.s tenu des propos excluants à un moment ou à un autre, moi la première. Par ex j'arrive plus à regarder mes premières vidéos sur le sujet pcq je trouve q plein de choses ne vont pas. Ms je les laisse en ligne, pcq elles marquent une étape dans mon engagement militant

On est hyper prompt.e.s à balancer des "cancelled" à la moindre connerie d'un.e militant.e LGBT / féministe. En revanche toutes les semaines on a des harceleurs et des violeurs qui intègrent nos rangs mais ça, ça passe crème.

Mon avis sur le sujet une bonne fois pour toutes : la pureté militante c'est de la merde, ça n'existe pas, et c'est très présomptueux, pcq c'est considérer qu'on naît woke sur le dos d'une licorne magique au bord de l'autoroute du bonheur

BREF. Passons.

La définition de l'asexualité me semble très vague, certain.e.s ace m'ont dit que ça concernait l'absence de relations sexuelles, d'autre que c'était une dimension amoureuse, d'autres une absence pure et simple de désir

Je lis aussi beaucoup que les ace sont oppressé.e.s par l'injonction à l'hétérosexualité. Parce que ce n'est pas le cas des bi ? Des lesbiennes ? Des meufs hétéro, aussi, contraintes de céder parce que "boys will be boys" ?

C'est pas pcq on n'est pas ace qu'on ne subit ni d'injonction à l'hétérosexualité ni de violences genrées ni de violences sexuelles. Parler d'hétéronormativité ok mais dans ce cas-là faut parler de systèmes et de schémas sociaux, pas de vécus individuels

Sans compter que je vois jamais aucun.e ace parler du fait que gay, bi... sont des identités imposées au cours de l'Histoire, tandis que l'asexualité relève de l'auto-définition, justement pcq elle a été invisibilisée. Et ça, ça fait une grosse différence

Je vois aussi que beaucoup parlent de visibilité, mais concrètement, ça a changé quoi pour les bi (par exemple) d'être visibles ? Les violences ont diminué ? L'hétéronormativité a reculé ? Les camps de reconversion sexuelle n'existent plus ?

Si vous me suivez depuis un ptit moment ici vous savez que je raisonne beaucoup en terme de classes sociales. Dans cette optique, en quoi les ace représentent-iels une classe sociale, surtout dans la mesure où elleux n'arrivent pas à trouver un consensus pour se définir ?

Et, si on part du principe que les vécus priment et que l'individualité et la parole de chacun.e doivent être pris en compte, est-ce que ça ne remet pas en question toute l'histoire des LGBT, qui n'est plus qu'une accumulation de vécus individuels ?

Voilà. Je retourne câliner ma chienne et monter mes vidéos. Bye