Thread by @Nyflutalor

Les mycoses c'est pas bénin, thread.

Bon d'accord, des fois ça l'est. Y a des gens, ça les gratouille, iels se mettent un ovule dans le vagin et de la crème sur la vulve, et en 3 jours, une semaine max, c'est plié.

Mais y en a d'autres comme moi qui fucking douillent leurs morts.

Là j'écris ce thread parce que je viens de hurler de rage, je suis à un moment particulièrement de désespoir.

Et j'ai envie d'abandonner ce thread à chaque tweet, parce que j'aimerais juste ne plus y penser.

Mais de toute façon j'y pense tout le temps, parce que j'ai mal tout le temps et que je passe bcp de temps à éplucher le net pour trouver les meilleurs remèdes.

Mycose pour moi = douleur, découragement, fatigue, tabou social, impossibilité de s'en remettre à la médecine, manque de reconnaissance.

C'est ce qui motive ce thread, je veux que le monde sache que c'est un réel handicap et le prenne + en compte.

Ah et ça c'était les significations à court terme parce que c'est celles que je supporte pas et c'est celles dans lesquelles je suis en ce moment, mais il y a aussi celles à long-terme :

Mycose pour moi = absence de vie sexuelle, non-consommation d'alcool.

Celles-là je m'en suis accomodé et je n'en souffre qu'en de rares occasions, mais oui, la mycose a très clairement influencé ma vie.

Ok, je développe.

Douleur : la mycose consiste officiellement en une démangeaison de la zone vulvo-vaginale. En fait quand elle est au plus fort, ça gratte pas, ça fait mal. Ça brûle, ça lance, je sais pas, mais imaginez un champignon en train de vous bouffer les muqueuses.

Pour info, elles sont rouges, gonflées, et lisses, dans ces pires moments.
Je vous passe pas les détails, quand la mycose est vaginale c'est moins douloureux, mais + de l'ordre de la démangeaison. Mais de la démangeaison à l'intérieur du vagin, quoi. Je vous laisse imaginer.

Non je vous laisse pas imaginer : c'est la zone la plus innervée du corps, c'est central, et tu peux pas juste remuer pour te la gratter. C'est fatigant.

La fatigue elle se noue dans le ventre pas mal, parce que tu contractes les abdos s'en t'en rendre compte pour résister.

Et donc c'te mycose elle est aussi vulvaire en général ! Beh voui, ça descend du vagin et ça vient contaminer tout ce que ça peut.

Et donc sur la vulve, c'est là que T'AS MAL. Mais la vulve c'est pas un truc uniforme, nan y a plein de trucs dedans ! Alors je suis sympa, je vous détaille.

Bon d'abord y a les plis de l'entrée du vagin, qui brûlent. Les petites lèvres autour, aussi, la zone la + proche du vagin qui prend le + cher sur la durée.

Après si t'as pas de chance, toute la partie jusqu'à l'anus devient grave irritée et quand tu pisses c'est comme si tu mettais du citron sur une plaie, nice.

Quand les grandes lèvres sont atteintes ça refait plutôt démangeaison que douleur pure, mais le genre de démangeaison où pendant que tu te masses avec ton remède, ta main se met à gratter et tu peux rien y faire. Donc après tu douilles.

Et le clou, le clitoris. Au niveau du gland, si il est touché, ça pique par plus ou moins grands pics de douleur. Et en même temps... Ça le stimule. J'ai parfois droit aux frissons dans les jambes et aux bouffées de chaleur. Comme une masturbation sans du tout de plaisir.

Vraiment chelou, la première fois je me suis demandé si j'avais de la fièvre avant de capter le bail.

Bref, côté douleur, j'ai à peu près fait le tour. Vous mixez toutes ces douleurs et vous vous rappelez que c'est la partie la plus centrale et la plus innervée du corps. La fatigue, c'est la conséquence directe : avoir mal, ça fatigue.

Cette douleur, vous imaginez bien, elle empêche de faire des trucs. Marcher, au + bas, c'est compliqué. Même d'une pièce à une autre, une fois assis-e tu veux pas réveiller la douleur.
Elle prend une part de ton esprit de manière constante aussi, dc elle nuit à la concentration.

Elle te fait te retenir plus longtemps d'aller pisser aussi.

Elle t'empêche de faire du vélo aussi. Complètement à court terme, et à long terme, surtout pas du vélo à selle trop haute. Parce qu'à long terme tu contrôles absolument les frottements sur la vulve, par peur des rechutes.

De te baigner aussi, parce qu'à long terme tu contrôles absolument le taux d'humidité auquel t'exposes ta vulve, par peur des rechutes.

Ça m'amène au côté social.

Ma première, je l'ai eue à 15 ans. À l'époque y avait à la radio une parodie de chanson qui faisait "elle m'a filé une myyyycoooooose", et en dehors de ça, j'en avais absolument jamais entendu parler.

Donc j'ai commencé par associer ça à la honte, et donc, forcément, au silence.

Imaginez-vous cette souffrance qui handicape pour autant de trucs du quotidien, mais dont tu t'interdis de parler ?

Alors chez des ami-e-s, si on te prête un vélo pour aller quelque part, soit tu acceptes et tu crains, seul-e avec toi-même, de rechuter, soit tu refuses. Si tu refuses, soit tu expliques pourquoi, soit tu t'inventes une excuse parce que tu as honte.

Dans les deux cas tu as le sentiment de passer pour un-e chieur-se.
Baignade ? Oh non, j'aime pas ça. Alors tu passes pour la personne pas fun qui se laisse pas aller à des trucs spontanés. Et tu finis par y croire.

Alors que tu es obligé-e de contrôler autant, sinon tu connais trop bien les conséquences.

A table, j'ai oublié un truc, je demande à quelqu'un-e d'aller me le chercher ou j'y vais ? J'veux pas faire chier. Mais en même temps j'ai mal.

Bon, là je parle de ce que je connais, mais je suppose que ce mécanisme est commun à la plupart des handicaps. Ne laissez pas les gens penser qu'iels font chier le monde.

Ok, côté social, je pense que vous vous représentez à peu près. Et même quand on a combattu la honte et qu'on en parle ouvertement, il reste le côté invisible du handicap.
Le sentiment d'imposture quand tu essayes d'expliquer à quel point c'est rude à des gens qui ne savent pas.

La découragement quand iels zappent et te demandent un truc chiant ou te proposent un truc auquel tu peux pas dire oui.

Ah oui, pas de sucre aussi, pour éviter la rechute.

Le nombre de fois où j'ai envie de brancher la conscience des gens sur mon corps quelques minutes pour qu'iels captent.

Et le revers de la médaille quand t'arrives à en parler, c'est que les gens y vont de leur conseil. Sauf qu'au bout de 6 ans... Ben tu les connais tous. Et quand un mec cis te conseille comme le messie un truc que tu sais déjà... Flemme.

Bon, j'arrive au côté médecine maintenant. Comment on se soigne de ça ? Le classique, c'est un ovule vaginal d'econazole et diffusion lente + de la crème d'econazole matin et soir sur zone propre et sèche, pendant 15 jours.

Ah oui dans les contraintes sociales, rajoutez ça : tu peux pas dormir dans des endroits où y a pas l'eau chaude, et où tu peux pas passer un quart d'heure dans la salle de bain matin et soir, et t'as besoin d'une serviette propre à chaque fois en théorie.

Je vais pisser, on se retrouve dans... 1/4 d'h ? Ah et rappelez-moi de vous dire que j'ai niqué mes fringues quand je reviens. Passion exhaustivité.

Donc les médecins souvent savent pas quoi te dire si ovule + crème ça marche pas. Si tu rechutes dès la fin du traitement. Alors certain-e-s te donneront un traitement de fond, un antifongique par voire orale, pour s'attaquer aux colonies de candidas par l'intestin.

Selon l'hypothèse que tu te fais réinfecter à chaque fois à travers la paroi vaginal-anal pcq t'as une candidose généralisée.

Bon, perso, j'ai fait une de mes récidives sous traitement oral.

(Je vais différencier rechutes et récidives ainsi, rechute = ça empire alors que ça allait mieux, récidive = ça recommence alors que c'était guéri depuis qq temps.)

Donc après, les médecins te disent que c'est tes habitudes qui provoquent ça : tu t'essuies dans le bon sens ? tu fais pas de douches vaginales ? Tu te laves pas avec n'importe quel savon ? Tu portes bien des culottes en coton ? Pas des pantalons serrés ? Pas trop d'alcool ?

Tu te sèches bien après la douche ? Tu dors bien sans culotte et de préférence sans pyjama ? (Oups, nouvelle contrainte sociale)

Bitch please, ça fait des années que je porte que des robes et des sortes de baggys (ouaip, la mycose a même influencé mon style)

Internet complète : mange moins de sucres, évite les aliments acidifiants, ton ph global doit être trop bas, etc.

Bon donc ça c'est pour limiter les risques. En préventif disons. Mais quand elle est bien là la mycose, faut bien du curatif ?

Et quand t'en as marre de verser des fortunes à des laboratoires pour rechuter (de ta poche en plus, pcq tu repasses pas par le médecin à chaque rechute donc tu prends sans ordonnance), tu cherches les autres remèdes.

Tu trouves vite ail et huile de coco. Puis des mélanges d'huiles végétales et huiles essentielles. Tu cherches ce qui marche le mieux pour toi. Les gens qui te conseillent de vécu ne sont jamais unanimes. Donc tu tentes des trucs mais t'es jamais sûr-e de faire bien ce qu'il faut

Et t'as plus de référent-e médical-e depuis longtemps parce que t'as bien 3 pas d'avance sur taon médecin. Comme iel a pas grand chose dans sa tête au chapitre mycose, t'en sais 10 x + avec les heures passées sur internet. Mais pas de discernement parmi ça.

L'argent colloïdal, miracle ou arnaque ?
Ouais fin même si ça soigne ça assèche aussi donc mauvais bail. Avec liniment peut-être ? Quelle concentration en HE ? L'hydrolat ça marche pareil ? Ah ouais mais c'est acide, pas bon.
Je détaille pas les thunes que ça représente.

Y a aussi le moment où ça fait tellement longtemps que tu te démènes que tu te mets à douter. Est-ce que j'ai bien une mycose ? Est-ce que ce qui me fait mal c'est pas juste l'irritation liée au traitement ? Est-ce que ça veut dire qu'il faut que je continue ou qu'il faut que /

J'arrête ? C'est quoi déjà la sensation normale d'une vulve ?

Quand lae médecin te propose des trucs que tu connais pas, t'as envie d'y croire, peut-être que c'est le miracle ??

En général t'as tort. Le dernier truc m'a fait rechuter... Si internet n'est pas fiable, les médecins et les pharmaciens ne le sont pas plus :'(
Le seul intérêt de la médecine c'est de te faire des analyses pour vérifier que c'est bien candida albicans contre qui tu te fightes.

Me reste un sujet je crois. (Désolée pour ce très long thread)

"Bon, et plus de rapports sexuels jusqu'à guérison." M.D.R.

Le plot twist de ce thread, c'est que chaque récidive était liée à un rapport sexuel. Que en vrai, l'abstinence est la meilleure solution pour pas récidiver.

Et pour pas rechuter évidemment, mais la question se pose même pas en fait, parce que si t'es pas guéri-e, le sexe ça fait mal.
Dans quelle culture du viol on vit pour avoir besoin de conseiller ça ?

Et j'ajouterais que c'est vraiment pas suffisant comme conseil, si les personnes ont des terrains récidivants il faut conseiller l'abstinence pendant 3 mois au moins, parce que c'est tout ce temps que le terrain reste fragilisé.

C'est pas un médecin qui me l'a dit, c'est ce site, et bien trop récemment : legeneraliste.fr/actualites/art…

Et pourquoi certain-e-s chopent immanquablement une mycose à la moindre mini faute d'hygiène lors d'un rapport sexuel dans les rares qu'iels ont, comme moi ?

Aucune. Idée.

Alors y a des gens qui disent que c'est psychosomatique, que c'est mon corps qui me dit des trucs. Je me suis dit ça un moment mais ça mène franchement à rien si je peux pas traduire, et j'ai déjà changé tellement mon mode de vie pour lui que je vois pas quoi faire de plus.

Non, je considère simplement que je suis une mycosée chronique. Un jour ça s'arrêtera peut-être mais accepter cet état de fait comme une fatalité c'est la seule manière de le supporter. Parce que l'espoir que ce soit bien fini à chaque guérison et le découragement à chaque /

Récidive, c'est pas vivable.
Donc je suis malade, tout le temps, et j'adapte mon mode de vie pour limiter le nombre de crises.

Parfois, quand je n'ai rien eu depuis longtemps, j'oublie les premières raisons pour lesquelles j'ai arrêté le sexe, l'alcool, réduit le sucre... J'oublie ma maladie, je fais moins gaffe, et bam, récidive. C'est ce qu'il s'est passé là après 10 mois.

J'ai fait du sexe à hygiène limite, fait du vélo à selle trop haute, pris un bain et me suis masturbée. Peut-être même que j'ai mangé des choses sucrées.

Je vous parlais du conditionnement de ma sexualité. D'abord, bien sûr, il y a le patriarcat. Pas facile, d'office, de chercher et d'apprendre à trouver et réclamer son plaisir.

Mais avec ça, ma sexualité s'est construite dans les mycoses. J'ai eu ma première après mes premières masturbations, j'en ai re-eu après me premiers rapports, et ainsi de suite. Les conséquences se résument facilement :

Comment apprendre le lâcher-prise dans la peur ?

Seule l'hyper-controle protège de la récidive, et l'hyper-controle ne permet pas la recherche à 2.

Toute seule si, la mycose ne m'a pas volé l'auto-plaisir sexuel :)

Mes chèr-e-s, je crois que je me taris enfin. C'était long, bravo si vous avez tout lu. Partagez pour lever le silence sur nos mycoses, qu'on ne souffre plus dans le mutisme honteux. Et pour les non-concerné-e-s, que vous sachiez, un peu, ce qu'on peut vivre.

AH, comment j'ai flingué mes fringues ?
Parce que l'huile de coco ça coule, tout comme les autres huiles d'ailleurs mais celle-là pire, et ça ne se retient pas d'aller jusqu'au pantalon de toile légère, et ça ne part pas à la machine. Plusieurs pantalons, toutes mes culottes.