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Au-delà de l'exagération, de son premier tweet, il est intéressant d'examiner le véritable argumentaire développé par Usul
Cela permettra de mettre en évidence un faisceau d'habitudes cognitives à déconseiller
Cela permettra de mettre en évidence un faisceau d'habitudes cognitives à déconseiller
L'argument central d'Usul est que la réputation de la presse doit être ménagée, car celle-ci constitue un garde-fou contre les grands groupes industriels
Il y a une 'cosmologie' qui sous-tend cet argument, qui place certaines entités/institutions (la presse) dans le camp du Bien par défaut, et les grandes entreprises (ici, industrielles) dans le camp du Mal
Usul cherche ici à préserver cette cosmologie, à minimiser les éléments de réalité qui la compliquent, la mettent à mal
Ce qu'il demande, à ceux qui le lisent, d'accepter, c'est que, si les médias ont publié des choses fausses en grande quantité pendant de nombreuses années sur des questions de technologie qui impliquent les industriels,...
... il ne faut pas trop insister sur ce point, car cela met à mal la portée de critiques journalistiques futures de la technologie et des grands groupes industriels
Pour ce faire, il envoie sous le bus les efforts de nombre de scientifiques, journalistes, vulgarisateurs, qui ont beaucoup travaillé ces derniers temps pour sortir leurs congénères de l'emprise de cet obscurantisme technophobe si prégnant dans les médias
Un obscurantisme technophobe qui est lui même lié à cette même cosmologie décrite plus haut : les technologies industrielles utilisées par les grandes entreprises sont suspectes par définition, il faut donc les dénoncer
L'appel d'Usul à ménager les médias parce qu'ils peuvent lutter contre les grands entreprises, est un concentré de pensée en bloc, de tribalisme politique; surtout quand il est rappelé à quel point des médias se sont trompés (dans le meilleur des cas)...
... ou ont peut-être menti sciemment (dans le pire des cas) sur toutes ces questions de technologie, d'agriculture, de santé : OGMs, glyphosate, nucléaire
Mais Usul veut préserver sa cosmologie
Mais Usul veut préserver sa cosmologie
Usul a raison sur le point suivant : les grands groupes industriels ont une influence importante sur le monde, sur les humains et leur environnement, il est donc légitime et important de regarder ce qu'ils font et de ne pas leur faire confiance aveuglément
Mais sa vision est --sans surprise-- autrement plus dichotomique, puisque pour lui, cette vigilance doit être combinée à une hostilité de principe
Au contraire, Usul est très optimiste à l'égard de la presse, dont il dit qu'elle "[œ]uvre en principe pour l'intérêt général", ce qui tranche franchement avec sa critique récurrente des médias dans ses productions audiovisuelles
Cela donne l'impression qu'Usul fait preuve d'une candeur aussi soudaine que bienvenue (pour lui) envers la presse, quand cette dernière peut-être mobilisée comme contre-pouvoir face aux grandes entreprises
En insistant sur ce qu'il présente comme un conflit entre industriels (forcément méchants, car motivés par l'appât du gain) et presse (gentille, car "qui oeuvre en principe pour l'intérêt général"), Usul opère une polarisation du désaccord
Polarisation qui place les auteurs de la tribune #NoFakeScience dans le camp des premiers, malgré eux, car ils n'auraient pas vu (d'après Usul) que c'est là que se place la vraie ligne de front
Usul, grand prince qu'il est, vient donc, tout en saluant leur "bonne foi", les secourir de cette position vulnérable, "manipulable"
Or, ce que rappelle la tribune #NoFakeScience, c'est justement qu'une bonne partie de ce qu'a produit la presse sur certains sujets scientifiques et technologiques, va à l'encontre des connaissances scientifiques
"Œuvrer pour l'intérêt général", cela commence peut-être, pour un journaliste, par ne pas mentir à ses lecteurs, une règle qui me semble plus centrale pour la presse que cette croisade anti-industrie et anti-entreprises dont Usul semble croire qu'elle est sa mission
Usul faisant l'apologie des médias alors qu'une partie (importante) de ceux-ci a propagé bêtises et mensonges dans l'espace public pendant des décennies,...
... c'est un peu comme le croyant chrétien qui dit sa religion détient quand même la vérité sur les questions les plus importantes comme la morale, le salut et l'origine ultime de l'univers...
... alors même que la physique, la géologie, la biologie, l'archéologie ont explosé toutes ses prétentions à dire sur le vrai sur l'histoire et le fonctionnement de l'univers, de la Terre et de la vie
Usul rappelle à l'ordre les auteurs de la tribune #NoFakeScience en invoquant donc une sorte de plan supérieur de l'existence, structuré par cette cosmologie décrite supra
Il y a le Bien et le Mal, nous rappelle-t-il, et ceux qui tiennent à ce que les meilleures approximations de la vérité que nous connaissons ne soient pas trop déformées dans les médias, risquent de fragiliser ceux qui font le Bien aux dépends de ceux qui font le Mal
Cela illustre de manière saisissante la différence entre "esprit critique" et "pensée critique"
L'"esprit critique" cherche à comprendre, il est conscient de ses biais, de sa propension à se tromper, mais il s'efforce de minimiser les erreurs que ces limites cognitives vont le rendre susceptible de faire
La "pensée critique", elle, sait déjà ce qu'elle va conclure : celle qu'elle a identifié comme "les puissants", "les dominants", sont dans le faux, le mensonge, et il s'agit de trouver les cinquante nuances de cette tromperie cynique
Ici, "les puissants", "les dominants", ce sont les grands groupes industriels, dont les technologies ne sont pas vouées aux gémonies par les auteurs de la tribune #NoFakeScience
Usul en conclut que lesdits auteurs sont "manipulables"
Usul en conclut que lesdits auteurs sont "manipulables"
L'intervention d'Usul est donc un rappel à l'ordre en direction de sa cosmologie du Bien et du Mal
Les désaccords et malhonnêtetés sur des questions de fait ne sont, de ce point de vue, que des péripéties de troisième zone
Les désaccords et malhonnêtetés sur des questions de fait ne sont, de ce point de vue, que des péripéties de troisième zone
End thread
*aux dépens
