Thread by @e_buge

En octobre 1918, la France est confrontée à l’épidémie de grippe dite « espagnole », dans un contexte de guerre.

Le 25 octobre, le Gouvernement est interpellé à la Chambre sur cette question.

On retrouve dans ces échanges la plupart des préoccupations actuelles...

[À dérouler]

C’est le député Lucien Dumont qui aborde le premier la question, en pointant les conséquences de la promiscuité (notamment dans les files d’attente) dans la diffusion de l’épidémie

Il est rejoint par le député Fernand Merlin, qui dresse un bilan alarmant de l’épidémie :
- près de 2000 décès par semaine en France
- 400 décès par jour à Barcelone

Il cite également le rapport de l’Académie de médecine qui prescrit des mesures préventives :
« 1° éviter tout contact avec les malades contaminés
« 2° isolement des malades, désinfection des locaux en cours et après la maladie »

#RESTEZCHEZVOUS

Il profite de son intervention pour remercier chaleureusement à la tribune les médecins, infirmiers et infirmières, qui « donnent leurs jours et leurs nuits », suscitant l’approbation de la Chambre

#MerciAuxSoignants

Le député Merlin pointe aussi les défauts d’organisation des ministères en matière de santé publique.

Il n’existe pas, à l’époque, de ministère de la santé. Il ne sera créé qu'en 1920

Le député Charles Bernard insiste pour sa part sur le manque de médicaments et de savon, du fait de l’effort de guerre, prenant l’exemple des pénuries dans les lavoirs.

Le député Poirier de Narçay demande des mesures de fermeture des théâtres et des cinémas, citant celles qui ont été prises à Lyon et en Suisse, pour limiter les « réunions du soir » qui donnent lieu à des « agglomérations inutiles » de personnes.

Puis viennent les exemples édifiants de pratiques qui ont contribué à la diffusion de l’épidémie :
- rassemblement en un même lieu de 200 malades venant du front et de 200 blessés non malades
- les malades qui prennent le métro et « promènent leur grippe »

Il revient à Albert Favre, sous-secrétaire d’État à l’intérieur, de présenter les mesures prises par le Gouvernement.

Il commence par le contrôle renforcé aux frontières suisses et espagnoles, qui ne convainc pas vraiment : « les microbes n’ont pas de carte de visite »

Il rappelle les recommandations de l’Académie de médecine :
1° éviter tout contact avec les malades
2° isoler les malades
3° mais aussi doter les professionnels de santé de masques, ainsi que le font « les Américains dans leurs hôpitaux de grippés ».

#ResterChezVous

Sur la préconisation de la commission d’hygiène, le ministre rappelle que le Gouvernement a décidé de ne pas fermer les écoles, mais d’inciter les maîtres à la vigilance.

« Ils ne sont pas médecins » répond un député.

Des médecins militaires (en fait des médecins mobilisés au front) seront rappelés pour soigner les civils, là où les médecins manquent pour s’occuper des malades de la grippe.

Le ministre annonce enfin la réquisition de certains médicaments et de certaines usines de production de médicaments, en particulier dans le Rhône. Ces usines participaient déjà fortement à l’effort de guerre.

Au final, la Chambre adopte une résolution large, peu contraignante pour le Gouvernement.

Ce n’est là qu’un des nombreux débats qui auront lieu à la Chambre à ce sujet.

Plusieurs députés mourront en 1918-1919 de la grippe, donnant lieu à de nombreux éloges funèbres en séance.

Pour celles et ceux qui veulent profiter de ce #confinement pour découvrir les archives parlementaires, c'est une mine d'informations:
- site de l’AN: archives.assemblee-nationale.fr
- Gallica: gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb3…

Et la page de la séance du 25 octobre 1918: gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt…