Thread by @Maitre_Eolas

En prévision du Grenelle des violences conjugales, voici quelques données du phénomène des homicides conjugaux (j’entends par là toute mort volontaire causé par le conjoint, marié ou non, ou l’ex-conjoint).
TW violences conjugales.

Il s’agit des chiffres de l’année 2016, mais le phénomène est relativement stable d’une année sur l’autre. Je ne vais pas recourir aux pourcentages car vu le nombre en cause, ça n’a guère de sens. Les données brutes suffisent.

Un petit panorama :
2012 : 147 femmes tuées par un homme, 26 hommes tués par une femme, 0 homme tué par un homme, 1 femme tuée par une femme. Total 174 (au dessus de la moyenne)

2013 :
121 femmes tuées par un homme,
24 hommes tués par une femme,
1 homme tué par un homme,
0 femme tuée par une femme.

2014 :
118 femmes tuées par un homme.
23 hommes tuées par une femme.
2 hommes tués par un homme.
0 femme tuée par une femme.

2015 :
115 femmes tuées par un homme.
20 hommes tués par une femme.
1 homme tué par un homme.
0 femme tuée par une femme.

2016 :
109 femmes tuées par un homme.
28 hommes tués par une femme.
1 homme tué par un homme.
0 femme tuée par une femme.
Total : 138
2015 : 136
2014 : 143
2013 : 146
2012 : 174 (dont Jacqueline Sauvage)

Dans les cas des femmes victimes :
29 assassinats (meurtre prémédité)
76 meurtres non prémédités, « dans le feu de l’action » en quelques sortes.
4 coups mortels (pas de volonté de tuer)
Hommes victimes : 3 assassinats, 25 meurtres, 1 coup mortel.

Donc le cas de loin le plus fréquent est une volonté de tuer mais qui n’a pas été planifiée. Les violences mortelles sans intention de tuer sont très rares, la préméditation plus fréquente.
CE NE SONT PAS DES MORTS ACCIDENTELLES : elles sont bel et bien voulues.

Là encore, la tendance existe sur la durée. H et F :
2015 : 38 assassinats, 92 meurtres, 6 coups mortels.
2014 : 40 assassinats, 91 meurtres, 12 coups mortels.
2013 : 38 assassinats, 104 meurtres, 4 coups mortels.
2012 : 31 assassinats, 131 meurtres, 12 coups mortels.

La tendance est archi claire : la violence qui dépasse ce qu’a voulu leur auteur est l’exception. L’auteur a décidé que l’autre mourra, c’est le but recherché.

La majorité des faits a lieu dans un coupe marié (70 cas en 2016), ou en concubinage : 46 cas, un sur trois), ou ex-concubins (18). Seulement 3 cas chez des divorcés et seulement 1 chez des pacsés (En 2016, on a célébré 233000 mariage et 192000 PACS)

Les faits ont lieu trois fois sur quatre avec une arme. 46 faits avec arme blanche (couteau, marteau, matraque…), 49 avec une arme à feu, 12 armes par destination (objet utilisé pour tuer qui n’est pas en soi une arme). 13 strangulations. 9 par des coups jusqu’à la mort.

Ajoutons un cas ou la victime a été brûlée vive, deux empoisonnements, une défenestration et une noyade.

Le mobile invoquée est de loin la séparation (49 cas) ou une dispute (33). Loin derrière on a la jalousie (11 cas), la maladie ou la vieillesse (12), folie ou dépression (9), en réaction à des violences subies hors légitime défense (5), les difficultés financières (5).

Les hommes tuent principalement, et de loin, en cas de séparation (47 cas). Il y a une piste à creuser ici. Puis dispute (15), jalousie (11).
Pour les femmes, c’est d’abord dans le cadre d’une dispute (18), les violences subies (4), la séparation (2). Pas d’homicide par jalousie.

Le contexte de violences antérieures dans le couple est assez complexe à appréhender. Premier constat : il n’est pas majoritaire, sans être négligeable. En gros 4 cas sur 10 révèlent des violences antérieures. Ça fait 6 sur 10 sans. Ça pose un gros problème de prévention.

37 victimes ont déjà été victimes de violences dont 30 femmes, 22 auteurs dont 17 femmes et 8 cas où les violences étaient réciproques.
Donc les femmes passant à l’acte sont majoritairement des victimes de violences, pas chez les hommes.

4 fois sur 10, l’auteur, H ou F, était connu des services de police.
La contraposée est effrayante : dans 6 cas sur 10, la police n’a jamais pu être alertée sur l’existence d’un risque.

Comme facteur de risque, là encore, l’alcool est fréquent, sans être majoritaire.
31 auteurs étaient alcoolisés (20 hommes, 11 femmes), 13 buvaient habituellement.
28 victimes étaient alcoolisées, 7 en buvaient habituellement mais étaient sobres au moment des faits.

Dans 14 cas, il y avait des stups, chez l’auteur dans 7 cas, la victime dans 3, chez les deux dans 4. Dans 21 cas (9 auteurs, 5 victimes, 7 couples), il y avait consommation habituelle mais pas au moment des faits.
Ca ne semble pas avoir un rôle causal prépondérant donc.

Le jour où on meurt le moins est le samedi, le plus, le dimanche, mais l’écart est plutôt faible (autour de 20 ont eu lieu un lundi, mardi, mercredi jeudi ou vendredi, 11 un samedi, 28 un dimanche).

Le mois où on meurt le moins est septembre (moitié moins), le plus, novembre (le double).

La mort a lieu dans une écrasante majorité au domicile du couple, de l'auteur ou de la victime (122 affaires, presque 9 fois sur 10).

La répartition sur le territoire est homogène. Le faible nombre rend les évolutions peu significatives. Les trois départements les plus frappés sont la Moselle, l’Hérault et le Rhône avec 5 cas chacun.

Rapporté à la population, c’est la Corse qui domine de loin le classement.

Enfin, et ce n’est guère étonnant, les faits ont lieu majoritairement chez les retraités (40 auteurs, 28 victimes) et les personnes sans emploi (41 auteurs, 64 victimes) Suivent les salariés (23 auteurs, 35 victimes), les autres CSP n’ayant pas de chiffres significatifs.