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1-D'humeur nostalgique, voici une nouvelle scénette. Nous sommes au printemps 1994. Ce qui s’appelle encore la 6e division légère blindée termine une période d’entrainement au camp de Valdahon. Le lendemain matin, tous les régiments retourneront dans les garnisons.
2-Je suis alors lieutenant, chef de section au 21e de Marine. J’ai préparé mes affaires pour le départ et rempli un document que le capitaine veut absolument pour le soir même. Je me hâte et part lui amener dans son bureau, au bout de l’allée centrale de la zone bâtie du camp.
3-En passant près du Foyer, j’entends quelques cris et me dit qu’il y a peut-être du rififi (c’est vieux, mais j’adore ce mot) qui se prépare. Je décide de déposer mon papier et de revenir illico (idem) au Foyer. C’est une erreur.
4-Revenant sur les lieux, je m’aperçois que la situation y a quelque peu évolué. Devant l’entrée du foyer, je vois plusieurs dizaines de marsouins polynésiens, en fureur. Dans mon tour d’horizon, je vois aussi des hommes allongés, et établit immédiatement un lien de cause à effet
5-A l’entrée du Foyer, une scène d’anthologie. Des Wallisiens sont en train d’utiliser un banc en bois comme bélier pour enfoncer la porte du Foyer. A l’intérieur, des légionnaires sont à train de rejouer Camerone en lançant des bouteilles de 33cl de Kronenbourg sur eux. 
6-Je me dis fugitivement qu’il y a eu au moins un début de raisonnement tactique des deux côtés, c'est déjà ça, et m’interroge sur l’attitude à suivre. Je rejoins un officier de légion et décidons de constituer une force d’interposition, malgré notre dégoût pour cette mission.
7-Je comprends rapidement que le triptyque « légionnaires anglais-marsouins polynésiens-alcool (LA + MP +A2) » s’est révélé toujours aussi volatil. Constatons les risques, un officier de permanence de la Romaine (Légion, en langage marsouin) a ordonné la fermeture du Foyer.
8-C’est lors du repli que le drame s’est produit, une Kronenbourg venant percuter la tête d’un marsouin qui venait de sortir, transformant d’un coup le conflit latent en conflit ouvert, avec une montée très rapide dans l’échelle de l’emploi de la force.
9-Très rapidement en effet, les forces en présence se trouvent accrues de volontaires venant de partout. L’espace de bataille se trouvait ainsi augmenter de manière exponentielle. La force d’interposition mixte faisait de même tentant de « tirer la violence vers le bas ».
10-Survient alors un acteur extérieur, la Police militaire, qui dans le doute entreprend à son tour de calmer le jeu en frappant tout le monde.
11-Finalement, chaque chef retrouvant ses petits et à force de hurlements variés, on parvient à ramener et enfermer petit à petit toutes les troupes dans les cantonnements. On ferme évidemment toutes les popotes.
12-Les blessés les plus graves, une bonne douzaine, sont hospitalisés et les infirmiers deviennent les mecs les plus populaires des compagnies. Nous laissons le soin aux Commissaires d’évaluer les dégâts.
13-Au petit matin blême, tout le monde repart chez soi où une nouvelle pluie de pains, à signer cette fois, vient s’ajouter à celle, plus physique de la veille. Plus de vingt ans après, ces punitions sont montrés avec fierté au même titre que des citations.
14-Épilogue : 5 ans plus tard, je suis en Guyane au CEFE. Je vais saluer le chef du centre. Le légionnaire qui nous sert à la popote a une méchante balafre sur le visage. « Tu as fait ça où ». « A la bataille de Valdahon. Elle devrait être inscrite sur le drapeau du régiment ».
