Thread by @TristanKamin

Je vous propose un retour sur le mix électrique du 23 décembre, parce qu'on peut en dire deux ou trois choses d'intéressantes. On peut y voir un tour d'essai pour le système électrique de demain.
#Thread #nucléaire #énergie #TransitionEnergétique
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C'était une période de très faible consommation. Enfin, forte par rapport à un plein été, hein, mais les fêtes, c'est une consommation en baisse par rapport à la norme décembre-janvier. Une journée entre 50 et 65 GW contre 65 à 80 en début de mois.
Illustration :

C'est souvent le cas en périodes de fêtes, mais en plus cette année le climat était doux.

Côté production, une bonne puissance hydraulique fil de l'eau+lacs stable autour de 10 GW, et de l'ajustage par les STEP sur une plage de 0 à 2-3 GW supplémentaires.

Côté gaz, c'est très stable et très faible à 2 GW, ne fonctionne que la cogénération et un filet de production par les centrales cycle combiné. Charbon à 50MW et fioul à 170 MW, insignifiants : autant dire que côté émissions de GES, on est très, très, très bas.

D'ailleurs si quelqu'un a fait des screens de @electricityMap ce jour là, je l'invite à les partager, la France va être vert foncé et toute l'Europe de l'Ouest tendra au vert je pense.

Et qu'en est-il du nucléaire ? Et bien on avait environ 45-46 GW disponibles, qui faisaient déjà depuis le début de la semaine précédente un cyclage jour/nuit. Vous l'aurez compris, tendance à la surproduction à ce moment.

On doit ça à, je le disais, une consommation en baisse… Et surtout, un vent marqué qui souffle fort sur toute la France et son parc éolien.

Pour info, parce qu'on me le demande à chaque fois ^^, ces figures proviennent du site @eCO2mixRTE : rte-france.com/fr/eco2mix/eco…

Revenons spécifiquement au 23 décembre, maintenant que l'on a le contexte pour le nucléaire et l'éolien. Au petit matin (4h), creux de consommation, le nucléaire abaisse sa puissance à 35 GW.

Et ce, malgré 4 GW de pompage dans les STEP et presque 5 GW d'exports.
5 GW d'exports, au passage, c'est assez peu pour la France : le vent et la faible consommation concernaient aussi nos voisins.

Ça se ressent d'ailleurs sur les prix de marché de l'électricité qui tombent à 1 €/MWh en France et sur la péninsule ibérique, et virent légèrement négatifs en Allemagne, Belgique et Autriche.

En milieu de journée, la consommation remonte, ainsi que les prix et donc les exportations. L'éolien carbure toujours à près de 10 GW, les exports remontent à 8 GW et le nucléaire remonte de 35 à 46 GW. +11 GW en quelques heures. Un poil de solaire s'ajoute.

Enfin, en soirée, alors que la conso atteint son maximum, l'éolien se calme et tombe à 6 GW (encore très honorable) et le solaire disparaît. Le nucléaire se maintient, et c'est l'hydraulique en hausse et les exports en baisse qui couvrent la différence.

Quelles leçons tire-t-on de ça ?
Rien de neuf en vérité, mais des rappels de ce que l'on sait déjà. Je vais reprendre quasiment mot pour mot un mail de Jean Fluchère, @MyrtoTripathi, tu lui transmettras mes remerciements s'il te plaît ? Je n'ai pas son contact ^^" !

1) Le nucléaire est techniquement tout à fait adaptable aux sautes d'humeur du vent et aux variations horaires de consommation (pour peu qu'il ne soit pas déjà à puissance max, ça va de soi).

2) Hors période de forte conso, les variations éoliennes se font au détriment de l'utilisation du parc disponible (notamment nucléaire), ce qui a pour effet de renchérir le coût du MWh nucléaire (un même parc qui produit moins, c'est une production unitaire plus chère).

3) L'adaptation du nucléaire a limité la baisse des prix de marché pour la France, nous épargnant de plonger dans les prix négatifs, limitant la perte de rentabilité pour tous les moyens de production en service à ce moment.

4a) Les prix de marché sont remontés avec la baisse de production éolienne. Autrement dit, quand l'éolien produit, les prix de marché descendent.

4b) L'éolien étant amorti par les taxes (tarifs garantis subventionnés), ça n'a pas d'impact sur sa compétitivité, mais altère la compétitivité de tous les autres moyens de production non subventionnés.

4c) Autrement dit, l'éolien joue à la baisse sur les prix de marché et à la hausse sur les prix payés par les consommateurs. Et nuit à l'investissement dans des moyens de production non subventionnés en Europe, notamment pilotables.

Ça fait écho à mes tweets d'hier sur le double-discours de la compétitivité des EnR : elles sont compétitives car subventionnées et mises en compétition avec des moyens de production dont elles dégradent la rentabilité…

Courage, plus que 100 milliards d'euros de taxes à payer pour finir de faire prospérer ce modèle économique :D (en espérant que ça finisse vraiment un jour…)