Thread by @Matadon_

Une nouvelle étude parue dans Scientific Reports (pas Nature) montrerait encore des effets toxiques du glyphosate.

https://twitter.com/Veillerette/status/1120666053095370752

Disclaimer : l'étude porte sur de l'épigénétique, et j'ai pas forcément le bagage nécessaire pour en faire une critique approfondie, mais je vais soulever quelques points que j'ai noté, ou que certains autres ont soulevé.

Déjà il va falloir expliquer ce qu'est l'épigénétique rapidement.
L'épigénétique, c'est ce qui va toucher à l'expression des gènes. Deux cellules peuvent avoir le même génome, si l'epigenome est différent, alors la cellule se comportera différemment.

La métaphore classique c'est celle du livre de cuisine. Une recette est un gène, le livre a toutes les recettes, mais pour pouvoir les lire, il faut ouvrir la page. Certaines modifications de l'ADN vont le compacter ou le decompacter, et ainsi rendre la "recette" lisible ou non.

Ces modifications, c'est entre autre ce qui fait que deux jumeaux ne sont jamais de parfaits jumeaux, même si toutes les recettes sont les mêmes, elles ont pas été suivies exactement de la même façon, même si le résultat est très similaire.

Ce genre de modifications sont généralement effacées lors de la formation des gamètes, et ne sont donc pas transmissibles.
Mais pas toutes, et certaines se transmettent bel et bien à la descendance.

Par exemple, des drosophiles soumises à un stress lors de leur développement étaient malformées, et ces malformations se transmettaient à leur descendance, tandis que des drosophiles identiques génétiquement mais non stressées n'étaient pas malformées.
onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.111…

Avec tout ça on a toujours pas parlé de l'article.
Cet article montre que des modifications épigénétiques seraient induites par une exposition au glyphosate, et qu'elles seraient transmises à la descendance, induisant différentes maladies. (Chez des rats)

Les résultats montrent bien des augmentations significatives de l'incidence de diverses maladies chez les descendants des rats exposés au glyphosate.

Et je n'ai pas grand chose à dire sur ces résultats. Ils me semblent plutôt solides.
En revanche j'attire votre attention sur la méthodologie.

Durant la gestation des femelles, ces dernières ont reçu des injections intraperitoneales de glyphosate à 25mg/kg/jour.
On leur a INJECTÉ du glyphosate dans le péritoine. A des concentrations élevées.

25mg/kg/j, c'est la moitié de la DSE, ou NOAEL en anglais, la dose a laquelle on observe aucun effet toxique du produit. L'étude pourrait donc montrer que cette DSE est à revoir à la baisse.
Mais.

Premièrement, la norme sanitaire utilisée n'est pas la DSE, mais la DJA, la dose journalière admissible, qui est elle de 0,5mg/kg/j, soit 50 fois moins que la dose utilisée ici.

Deuxièmement, la DJA est une norme, quand on regarde les expositions réelles, on absorbe dans le sang des doses de l'ordre du microgramme.

En prenant les chiffres des glyphotests qui tournent autour de 1-3μg/l dans les urines, en considérant 2l d'urine par jour et que la personne fait 60kg, ça fait 0,1μg/kg/j, soit 250000 fois moins que la dose utilisée ici.

Et enfin, et surtout, la voie d'exposition n'est pas pertinente. Personne ne s'injecte du glyphosate directement dans le bide. La voie pertinente c'est l'absorption dans le sang via ingestion. Cette étude ne permet pas de voir cela.

En fait, contrairement à @Veillerette, les auteurs sont bien conscients de cela. Ils notent dans la discussion que cette étude ne permet pas une évaluation des risques, elle permet seulement d'identifier un danger.

Encore une fois la distinction entre danger et risque n'est pas faite, et une étude montrant un danger, et non un risque, est mise en avant pour effrayer le public, qui pourtant ne court aucun risque.