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To bio or not to bio ?
La première partie du reportage d’Envoyé Spécial d’hier est très intéressante. On y voit deux agriculteurs, l’un en bio, l’autre pas.
Mais pas sûr que le spectateur lambda comprenne tout, l'enjeu n'est pas très bien expliqué.
Décryptage dans ce thread.⬇️
Entre Vincent, « défenseur acharné du glyphosate », et Olivier, « qui ne veut pas participer à la pollution », les choses sont claires. L’un est un agriculteur conscient de ses responsabilités, l’autre moins. Et pourtant…

francetvinfo.fr/replay-magazin…
Olivier est partie prenante d’une révolution agricole, refusant la facilité des intrants de synthèse, et notamment des pesticides. Pour ça, il a développé des méthodes très complexes lui permettant de produire en bio.
Ce qui n’est pas dit très clairement, c’est que Vincent AUSSI est partie prenante d’une révolution agricole. Lui aussi a développé des méthodes complexes. Des méthodes lui permettant de ne plus travailler son sol, d’abandonner le labour.
Et l’abandon du labour, on peut argumenter sérieusement que c’est l’une des plus grandes révolutions agroécologiques de toute l’histoire de l’agriculture. Je fais une courte explication, pardonnez-moi s’il y a des raccourcis.
Vous vous rappelez, j’avais abordé l’histoire de l’agriculture sous l’angle de la fertilité. Un autre grand problème de l’agriculture, ce sont les adventices.
Les « mauvaises » herbes. Depuis le néolithique, ça se gère par la force.

Arrachage manuel, puis griffage à l’araire, puis labour. On parle de labour quand il y a retournement d’une tranche de sol, et ça se généralise dans la deuxième moitié du moyen âge, avec la charrue attelée lourde.
Jusqu’au début du 20ème siècle, ça se fait à la traction animale. Le soc de la charrue descend vers les 15cm de profondeur et ne travaille pas très vite, pas très fort. Ca préserve assez bien les sols.
Mais après la 2nde guerre mondiale, le tracteur se généralise, le labour devient plus puissant. Problème, le passage rapide du soc de la charrue compacte le sol au fond du sillon, et crée parfois ce qu’on appelle une semelle de labour.
Une couche de sol compacté en profondeur, qui laisse difficilement passer l’eau, l’air et les racines. Perte de rendement, risques d’inondation. On peut labourer plus profond pour la casser, mais on ne fait que pousser le problème plus loin.
Il existe aussi des méthodes dites de sous-solage pour casser les semelles, mais bon, c’est pas top. De plus, le labour profond perturbe beaucoup la vie du sol, qui s’organise par strates. Vie aérobie en surface, anaérobie en profondeur.
Labourer profond envoie donc au fond du sol des êtres qui ont besoin de respirer et en surface des êtres qui n’aiment pas trop l’oxygène. Le tout augmente la minéralisation du sol, c’est-à-dire accélère la libération de ses nutriments, notamment organiques.
Résultat, le taux de matière organique du sol a tendance à baisser. Ce qui veut dire que le sol perd du carbone, donc en envoie dans l’atmosphère. On a donc une tendance à avoir moins de matière organique et moins de vie dans les sols avec le labour.
En fonction du climat, du sol d’origine, des méthodes précises utilisées, du type de cultures… ça peut être plus ou moins problématique. Pas forcément dramatique, non plus, et le labour conserve l’avantage de préparer les sols et d’être bien compatible avec le bio.
L’agriculture de conservation consiste à trouver des méthodes pour remplacer les fonctions du labour et des autres travaux des sols : gestion des adventices, aération du sol, sol propice au semis. La méthode la plus avancée, le semis direct…
…règle ces problèmes en intercalant une culture spéciale entre les cultures principales, qui a l’avantage de faire le travail de décompaction avec ses racines (aidée par la vie du sol retrouvée puisque plus perturbée).
L’agriculteur tue ensuite (généralement au glyphosate) cette culture intercalaire, qui vient agir en paillis, protège le sol et gène la repousse d’adventices. Il sème alors directement sa culture principale avec une machine spéciale au milieu du paillis.
Il n’a pas eu besoin de labourer, son sol se régénère, recapte du carbone, redevient vivant. Il fait beaucoup moins de passages au champ, consomme beaucoup moins de pétrole. Et moins d’engrais parce que la culture intercalaire est un engrais vert.
En fait, l’agriculteur qu’on a dans le reportage, c’est un putain de bon agriculteur, qui fait un vrai travail en conscience, tout comme son collègue bio. Si ça ne vous est pas paru évident, c’est peut-être qu'on n'avait pas envie de vous le faire savoir...
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